Comme un pavé dans la mare : en Italie aussi, l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn a fait l'effet d'une bombe. Voyage au fil des pages des principaux quotidiens italiens pour analyser les différentes interprétations de l'affaire DSK fournies par les éditorialistes de la Péninsule
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Revue de presse (articles en italien) Il Sole 24 ore – Strauss-Kahn e il primato dei più deboli : aux USA chacun est égal devant la loi, et en Italie ? La Stampa – Strauss-Kahn al bivio della giustizia : un article de Jean-Marie Colombani Il fatto quotidiano – L'inferno in una stanza : une femme italienne aurait-elle eu le courage de dénoncer ? La Repubblica – Dostojevski nella suite : DSK personnage littéraire Il Giornale – Il segreto che nessuno raccontava, doppia morale in Francia : l'hypocrisie de la presse française Il Foglio - Strauss-Kahn e Berlusconi : peut-on comparer un violeur à un séducteur ? |
L'annonce de l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn étant tombée au moment des élections municipales concernant plusieurs communes dont des villes d'importance comme Milan, Turin, Bologne et Naples, elle n'a pas reçu l'attention que l'opinion publique italienne lui aurait probablement prêtée en d'autres circonstances. Certes, les nouvelles concernant cette affaire sont régulièrement relatées à la une des principaux quotidiens de la Péninsule. Toutefois, c'est sur la politique intérieure que se focalise actuellement le débat en Italie, et pour cause : le premier tour des municipales, transformées par Berlusconi en une sorte de référendum sur sa personne et sur l'action du gouvernement, a pénalisé les partis de la coalition de centre-droite (PDL et Ligue du Nord), et le Premier ministre a vu chuter ses préférences dans une ville clef comme Milan. Dans ce contexte, l'affaire DSK est donc passée au second plan. Il faut également dire que, par rapport aux descriptions détaillées des soirées du Bunga bunga ou à l'attention morbide que la presse de la Péninsule réserve habituellement aux faits divers les plus sordides, les détails piquants diffusés par les médias américains et français concernant le scandale sexuel dans lequel est impliqué DSK n'ont pas, cette fois-ci, obtenu la part du lion. L'analyse proposée par les éditorialistes de la presse italienne s'est davantage concentrée sur la nature des relations entre la France et les Etats-Unis, sur les conséquences économiques au niveau mondial de cette affaire ainsi que sur la succession ouverte à la tête du FMI.
Peut-on comparer DSK à Berlusconi ?
C'est par contre d'un œil désenchanté, parfois un rien polémique envers leurs voisins transalpins accusés d'avoir émis dans le passé des jugements quelque peu hâtifs face à la complexité de la situation politique de la Péninsule, que les Italiens observent aujourd'hui le débat suscité en France par les thèmes sensibles que pose l'arrestation de DSK. La théorie du complot –ou de manière plus générale celle d'un piège tendu à un adversaire politique considéré comme étant potentiellement dangereux- le respect de la vie privée d'un homme qui recouvre des responsabilités publiques, la présomption d'innocence et le rôle de la justice, les conséquences sur l'image du pays : voici des thèmes – et nous n'en citons que quelques-uns- qui ne sont certainement pas nouveaux pour un pays qui connaît depuis des années les tensions liées à deux grandes anomalies, celle des procès mettant en cause Berlusconi et celle des déclarations enflammées de ce dernier contre les juges.
Si la France se pose actuellement un certain nombre de questions (peut-on vraiment séparer l'homme public de sa dimension privée ? Les médias doivent-ils tout dire ? Quelle est la relation entre pouvoir et justice ? Comment éviter que l'image du pays ne soit ternie au niveau international ?), l'Italie a vu naître deux factions en fonction des réponses, deux mondes qui n'arrivent plus à dialoguer ni dans la société civile ni au Parlement. C'est ainsi que la perception de l'affaire DSK varie par rapport à l'appartenance politique : en parcourant les articles de ces derniers jours, c'est la presse de gauche qui se montre la plus dure dans ses jugements, tandis qu'à droite c'est la différence entre DSK et Berlusconi qui est mise en avant, en reprochant au passage l'attitude critique des médias étrangers envers le Premier ministre italien.
Luisa Gerini (www.lepetitjournal.com/Turin) lundi 23 mai 2011






