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BANLIEUES – Le malaise italien

Écrit par Lepetitjournal Turin
Publié le 25 novembre 2014, mis à jour le 25 novembre 2014

Le mois de novembre a été marqué par de fortes tensions à la périphérie de quelques grandes villes italiennes. L'agitation, amplement répercutée dans les médias, a été à son comble à Rome et à Milan. Autour de thèmes comme le droit au logement et l'immigration, c'est une véritable guerre des pauvres qui s'est révélée dans toute son ampleur aux yeux du grand public.

La société italienne connaîtrait-elle une guerre des pauvres ? Au cours du dernier mois, l'agitation sociale et les violences dans certains quartiers de Milan et de Rome ont été au centre de l'actualité nationale, se cristallisant autour de deux thèmes principaux étroitement imbriqués, le droit au logement et l'immigration. A Milan par exemple, dans le quartier Lorenteggio, situé au sud-ouest de la ville, des tensions ont éclaté, opposant les locataires en situation régulière des logements sociaux, les case popolari, aux personnes occupant de manière illicite des appartements du même type. Parmi les locataires réguliers, qui dénoncent les occupants sans droit ni titre généralement entrés par effraction dans des appartements inoccupés, on compte des Italiens et des immigrés qui ont attendu, parfois des années durant, qu'une place se libère dans un HLM de la ville. Ils dénoncent une situation de misère sociale et d'abandon et un sentiment diffus d'insécurité, allant même jusqu'à ne plus se risquer à sortir de chez eux dans la crainte de retrouver leur logement occupé après une absence, même de courte durée. Si la situation de Milan a été particulièrement médiatisée ? hier encore, toujours dans le quartier de Lorenteggio, des projectiles ont été lancés contre la police lors d'une opération d'expulsion d'occupants illicites ? d'autres villes connaissent des situations similaires : à Turin, des tensions récentes ont également eu lieu entre les squatters de l'ancien Village olympique de via Giordano Bruno et des représentants politiques de droite venus faire un état des lieux.

Des habitants exaspérés
Même situation à Rome, mais dans la capitale les choses se compliquent à la suite d'épisodes de violences contre des immigrés. Dans le quartier de Tor Sapienza, l'agitation a duré plusieurs jours après l'agression d'une jeune femme survenue le 9 novembre dernier, mais l'épisode ne constitue que la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. Au coeur de la polémique, un centre d'hébergement pour immigrés accusés de tous les maux du quartier. Insécurité, trafic de drogue, incivilités, toutes les difficultés quotidiennes d'un quartier périphérique explosent au grand jour, devenant le symbole national d'un phénomène commun à de nombreuses villes et amplement exploité au niveau politique par des partis comme la Ligue du Nord de Matteo Salvini ou Fratelli d'Italia de Giorgia Meloni. Les habitants de ces quartiers tiennent cependant à préciser qu'ils ne sont pas racistes, mais qu'ils proclament leur ras-le-bol devant le non-droit, le non-respect des règles et l'absence de l'Etat. La crainte d'une guerre des pauvres est donc bien réelle alors que les Italiens appauvris par une crise qui n'en finit pas se trouvent en compétition pour l'obtention des aides sociales avec des immigrés de plus en plus nombreux.

Quelles solutions ?
Face à cette situation, les appels au calme ne manquent pas. A la suite de nombreux responsables politiques, le pape François a exprimé son inquiétude, n'hésitant pas, le 16 novembre dernier, à parler d'une véritable "urgence sociale" aux conséquences imprévisibles. Walter De Cesaris, secrétaire de l'association Unione Inquilini (l'Union des locataires), a pour sa part tenu à préciser que les tensions autour du droit au logement ne sont que la pointe visible de l'iceberg et que les campagnes médiatiques récentes "isolent le problème de son contexte en interdisant de voir la véritable nature du problème". Il précise en effet qu'en Italie plus de 700.000 familles auraient droit à un logement social mais se retrouvent sur des listes d'attente qui s'allongent de plus en plus alors que les municipalités sont incapables de répondre à la demande. "Tel est le bouillon de culture de l'illégalité diffuse et de la guerre des pauvres dans le domaine des logements sociaux. Si on n'affronte pas en amont le problème des logements sociaux en Italie, on ne pourra jamais résoudre en aval celui des occupations illicites".
Christine Correale (www.lepetitjournal.com/Turin) mercredi 26 novembre 2014

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Publié le 25 novembre 2014, mis à jour le 25 novembre 2014

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