Première femme présidente des Conseillers du Commerce Extérieur de la France (CCE), vice-présidente du groupe cimentier Vicat et figure du Medef, Sophie Sidos Vicat était au Japon à l’occasion de la conférence des CCE organisée à Osaka le 30 mai 2025. Rencontre avec une dirigeante engagée pour le rayonnement des entreprises françaises, qui incarne une vision pragmatique, ambitieuse et inclusive de l’économie à l’international.


C’est sous un grand ciel bleu, dans le quartier élégant de Hanzōmon à Tokyo, que s’est tenue notre rencontre avec Sophie Sidos Vicat, au siège japonais du groupe LVMH. Dominant l’angle d’une rue paisible, cet imposant bâtiment de verre à l’architecture contemporaine reflète le prestige du luxe et du savoir-faire à la française. Nous avons été chaleureusement accueillis dans ses bureaux lumineux et épurés par Norbert Leuret, président de LVMH Japon et figure active de l’association des Conseillers du commerce extérieur de la France (CCE), présent à nos cotés pour l’entretien. Dans un cadre à la fois raffiné et avant-gardiste, à l’image du dialogue entre excellence française et dynamisme japonais.
Un parcours au service de l’industrie et de l’international
Vice-présidente du groupe cimentier Vicat, dernière entreprise française indépendante du secteur, présidente de la Fondation Louis Vicat et du Medef Isère, Sophie Sidos Vicat a construit une trajectoire singulière à la croisée de l’entreprise, de la responsabilité sociétale et de l’international. « Mon engagement a toujours eu pour fil rouge l’ancrage local et l’ouverture au monde », nous confie-t-elle. Depuis 2023, elle préside également les Conseillers du Commerce Extérieur de la France, un réseau de dirigeants qui accompagnent les entreprises françaises à l’export. Une première pour une femme, et un symbole fort pour le réseau. Elle a su fédérer les comités, renforcer les liens avec l’Élysée et porter la voix des entreprises françaises à l’étranger. « Le Japon et la France ont beaucoup à s’apporter, par leurs différences. En croisant nos cultures, on gagne en créativité, en innovation, en profondeur. »
« Une mission au service des entreprises françaises dans le monde »
Présent depuis plus de 120 ans, le réseau des Conseillers du Commerce Extérieur de la France est composé de 4900 chefs d’entreprise à travers 152 pays: les CCE, ces dirigeants bénévoles qui mettent leur expertise au service de la diplomatie économique française. « Notre rôle est d’être les capteurs du terrain », explique Sophie Sidos Vicat, une dirigeante de proximité qui a su impulser une nouvelle dynamique, ouverte et concrète.
Pour concrétiser cette mission d’appui aux entreprises à l’international, les CCE s’organisent autour de quatre grands axes d’action : le dialogue avec les pouvoirs publics, l’attractivité de la France, l’accompagnement à l’international des entreprises françaises et l’appui aux jeunes talents grâce au Volontariat International en Entreprise (VIE). Sophie Sidos Vicat précise que ces jeunes volontaires, souvent issus de formations d’excellence, découvrent une vocation internationale qu’ils n’auraient peut-être jamais envisagée autrement, et qu’une grande majorité d’entre eux restent dans les entreprises après leur mission. « Ces jeunes découvrent une autre culture, une autre façon de travailler, et pour beaucoup, c’est une révélation », explique Sophie Sidos Vicat. « Ils n’auraient jamais imaginé partir au Japon, et pourtant, une fois sur place, ils ne veulent plus en repartir. »
Le Japon, un terrain stratégique et stable
Pourquoi le Japon ? « C’est un pays stable, fiscalement clair, avec une vraie culture du partenariat », affirme la dirigeante. Si l’implantation peut sembler lente au départ, les entreprises qui prennent le temps de comprendre le marché y trouvent des relais solides. L’exemple de Veolia ou de JCDecaux, qui ont connu des débuts laborieux pour s’implanter au Japon, est aujourd’hui emblématique : « Ils ont su démontrer la valeur de leur offre dans un contexte japonais, parfois en créant des concepts nouveaux tels que le mobilier urbain. »
Ce concept, alors inexistant au Japon, a permis à JCDecaux d’apporter des infrastructures modernes et fonctionnelles dans les principales métropoles. Les municipalités perçoivent aujourd’hui des recettes grâce aux annonceurs, dans un modèle gagnant-gagnant.
La conférence d’Osaka : du concret pour les entreprises
Deux jours après notre rencontre à Tokyo, la conférence des CCE s’est tenue le 30 mai 2025 au Pavillon France de l’Exposition universelle d’Osaka, sous l’égide de Sophie Sidos Vicat. Pensée comme un véritable forum de solutions, cette rencontre a rassemblé plus de 150 acteurs économiques français et japonais.
Les échanges ont été structurés autour de thématiques ciblées, allant de l’amélioration du cadre de vie urbain aux concessions d’infrastructures, en passant par la coopération franco-japonaise dans les pays tiers et le développement du sport comme levier économique.
Des groupes comme EDF, Veolia, Vinci, Bouygues, Decathlon ou encore GL-events ont partagé leurs expériences aux côtés de partenaires japonais tels que Marubeni ou la préfecture d’Aichi.
« Le Japon est un partenaire de confiance, mais aussi un terrain d’innovation. Nos échanges doivent aller au-delà des échanges bilatéraux classiques. La vraie valeur ajoutée, c’est la coopération en pays tiers, sur des projets concrets, durables et visibles. » souligne Sophie Sidos Vicat. « Nous avons voulu sortir des grands principes pour aller vers l’action », poursuit la présidente des CCE. Parmi les réussites citées, l’exemple de l’entreprise japonaise Sakata, leader mondial des semences potagères et florales, qui a ouvert un laboratoire à Uchaud, dans le Gard, créant 80 emplois grâce à l’initiative Choose France.

L’Exposition universelle, vitrine du savoir-faire français
Dans le prolongement de la conférence, les conseillers du commerce extérieur ont été invités à visiter le Pavillon France de l’Exposition universelle d’Osaka. Inauguré quelques mois plus tôt, le site a franchi le cap symbolique du million de visiteurs le 23 mai dernier.
« C’est un succès planétaire », se réjouit Sophie Sidos Vicat. « Le Pavillon France est un hymne à l’amour et une invitation à l’audace et à l’engagement. »
Inspiré de la légende japonaise du fil rouge, le pavillon propose une vision poétique et engagée de l’avenir, guidée par trois formes d’amour : « s’aimer soi-même », « aimer les autres » et « aimer la nature ». Sa façade se déploie comme une scène de théâtre ouverte au public, tandis que ses côtés, voilés comme des rideaux, préservent une part de mystère.
À l’intérieur, les savoir-faire français sont à l’honneur. Grandes entreprises et PME du patrimoine vivant se côtoient dans un esprit d’excellence partagée. Les visiteurs peuvent y découvrir les produits de partenaires comme Axa ou Ninapharm, flâner dans la boutique Saint James, déguster des vins d’Alsace ou succomber aux viennoiseries de la boulangerie Kayser, dont les senteurs de croissants chauds accueillent les visiteurs dès l’entrée.
« Oser l’export, se lancer et valoriser l’apprentissage »
Interrogée sur les conseils qu’elle adresserait aux jeunes, Sophie Sidos Vicat est catégorique : « Il faut oser. L’international ne s’improvise pas, mais il est accessible. Un VIE, c’est une porte d’entrée formidable. »
Au-delà des parcours académiques classiques, elle défend une revalorisation urgente des métiers techniques et artisanaux. « On manque d’ébénistes, de maréchaux-ferrants, de savoir-faire rares. Il faut donner envie aux jeunes de croire en ces métiers. » Elle raconte sa rencontre avec un maréchal-ferrant, conseiller CCE à Riyad, qui exporte des chevaux vers les Émirats arabes unis.
« On valorise beaucoup les grandes écoles, mais on oublie trop souvent l’apprentissage. Or, c’est essentiel. » Elle évoque aussi les WorldSkills, une compétition internationale mettant à l’honneur les métiers manuels. Elle y a croisé un jeune ébéniste d’Auvergne-Rhône-Alpes, médaillé d’argent, promis à un bel avenir au Japon.
« Il faut accompagner ces jeunes dans leurs envies, leur donner les moyens de les concrétiser. L’apprentissage doit être soutenu, renforcé. Nous visons le million d’apprentis en France, et chaque parcours compte car ces profils techniques et passionnés font partie intégrante de la compétitivité française à l’international. »
Une vision de l’économie résolument tournée vers l’avenir
À travers ses multiples engagements, Sophie Sidos Vicat incarne une vision exigeante, lucide et engagée de la compétitivité française. « L’attractivité ne se décrète pas, elle se construit. Elle repose sur la stabilité réglementaire, la qualité de la formation, mais aussi sur la capacité des entreprises à s’impliquer pleinement dans les grandes transitions, notamment écologiques. »
Son message est clair : conjuguer performance industrielle, responsabilité sociale et diplomatie économique est non seulement possible, mais nécessaire. Une posture à l’image de cette femme de terrain, qui fait de l’action, du dialogue et de l’ambition collective les piliers d’un rayonnement français durable à l’international.
Pour en savoir plus :
- Conseillers du Commerce Extérieur de la France : https://www.cnccef.org/
- Exposition Universelle Osaka 2025 - Pavillon France : https://www.franceosaka2025.fr/
Photo de couverture par B.Chapiron - Grégoire Mercier (volontaire international) et Sophie Sidos Vicat au siège de LVMH Japon
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