

Soixante ans après la création de l'Institut franco-japonais de Tokyo, la France crée aujourd'hui l'Institut français du Japon (IFJ), qui vise à fusionner les établissements de Tokyo, Yokohama, Kyoto et Fukuoka avec le service culturel de l'ambassade de France. Bertrand Fort, Conseiller culturel et directeur de l'IFJ, répond aux questions du petitjournal.com Tokyo
Lepetitjournal.com Tokyo: D'où vient l'idée de la création de l'Institut français du Japon ? À quelle problématique cela répond-il ?
Bertrand Fort: C'est une réforme qui a été amorcée il y a une dizaine d'années à Paris, sur le plan global. Elle répond à une volonté de renouveler les modalités de l'action culturelle française dans le monde entier. Il y a eu un livre blanc en 2007 qui comportait un volet culturel important et jetait les bases de la création d'une agence culturelle pour l'action de la France à l'étranger. Grâce à la loi du 29 juillet 2010, cette agence a vu le jour au 1er janvier 2011 avec la création de l'Institut français à Paris.
L'Institut français opère avec des moyens et missions élargis. C'est un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC), il succède à CulturesFrance qui était une simple association sous la loi de 1901. À l'étranger, en miroir de ce qu'il se passe à Paris, chaque ambassade met en ?uvre la fusion entre son service culturel et les instituts culturels de son pays, hors Alliances françaises qui restent des associations de droit local et gardent leur autonomie. Au Japon, nous créons donc l'Institut français du Japon (IFJ) qui fait partie d'un ensemble plus vaste que l'on appelle le réseau culturel français au Japon, supervisé par l'ambassade et qui rassemble également les cinq alliances françaises de Sendai, Sapporo, Osaka, Nagoya et Tokushima, la Maison franco-japonaise située à Ebisu-Tokyo, le Lycée français international de Tokyo et l'école française du Kansai.
L'Institut français du Japon est donc loin de constituer l'intégralité du réseau culturel au Japon, mais en constituera malgré tout l'épine dorsale, le pilier central. Son directeur et le Conseiller culturel seront une seule et même personne pour une meilleure coordination du réseau. L'IFJ va mener son action dans cinq secteurs différents : artistique (arts de la scène et visuels) ; industries culturelles et audiovisuelles ; le livre, le français et la francophonie ; le secteur universitaire et scolaire et, une innovation, son pôle débat d'idées, créé en projet pilote au Japon et dont le concept sera peut être repris ailleurs. Ce dernier a pour objet d'organiser des échanges sur tous les sujets jugés stratégiques dans l'action de la France, au sein des établissements culturels français au Japon, et en partenariat avec les institutions japonaises. Les sujets abordés pourront aussi bien être économiques, politiques ou encore strictement culturels. Nous avons déterminé trois axes thématiques pluriannuels: un premier qui tourne autour de "La ville de demain" sous tous ses aspects, un deuxième sur les questions de l'après-crise, et un dernier sur "La société du numérique". L'année prochaine nous auront également un axe géographique très intéressant qui sera celui de la Méditerranée sujet qui intéresse beaucoup nos partenaires japonais et fait écho à MarseilleProvence Capitale européenne de la Culture et qui va lui aussi transcender l'essentiel de notre programmation pour l'année 2013. Ces thèmes lui permettront de lui donner plus d'identité, de visibilité et de lisibilité.
Quels changements vont être opérés au niveau organisationnel et logistique ?
Les établissements de Tokyo, Yokohama, Kyoto et Fukuoka seront toujours dirigés par un directeur, qui va devoir adapter localement les grands rendez-vous de la France au Japon décidés collectivement et coordonnés par les pôles de l'Institut français du Japon. En plus de cela, chaque établissement a bien sûr la possibilité de prendre des initiatives selon son contexte régional et en fonction de ses besoins. Simplement, l'année va être rythmée par un certain nombre de rendez-vous qui vont être coordonnés d'un point de vue national. Cela concerne, entre autres, le mois du numérique, la fête de la francophonie, journée de la terre, fête de la musique, l'Académie française de musique et la folle journée, la journée du goût ou encore le festival littéraire Feuilles d'automne.
Au niveau budgétaire, il y aura un budget unique, chaque établissement disposant d'une enveloppe annuelle, lui permettant d'agir conformément aux objectifs assignés, l'idée étant bien sûr de mutualiser davantage les moyens. Il faut par exemple permettre aux instituts de province et aux alliances françaises de bénéficier davantage des invitations, souvent émises depuis l'IFJ à Tokyo. Les établissements de province devraient grandement bénéficier de cette fusion puisque ce seront des moyens supplémentaires qui leur permettront d'engager des partenariats avec des acteurs locaux. Cela devraient leur permettre d'avoir une offre culturelle beaucoup plus importante.
Quelle est votre vision des relations franco-japonaises ? Qu'est-ce que la création de l'IFJ va apporter dans le futur ?
L'aura de la culture française est, au Japon, sans commune mesure dans le monde. Cela étant, notre objectif est de faire passer auprès des Japonais l'image d'une France créative et moderne, en plus de son patrimoine: La France vaut autant par les créateurs d'aujourd'hui que par ceux d'hier. Et fondamentalement notre stratégie est de développer ce qui est la raison d'être de notre action, c'est-à-dire de faire connaitre les acteurs d'aujourd'hui avec plus de partenariats avec les japonais, de mises en relations, d'intermédiations. Mais pour cela il faut se doter d'une organisation mieux structurée, plus lisible et plus visible, coordonnée, et c'est l'Institut français du Japon qui va nous la donner. Cela devrait également nous permettre de travailler davantage avec les partenaires privés, dont nous souhaitons qu'ils soient parties prenantes de nos projets, y compris de la réflexion qui les préside.
Propos recueillis par Quentin Weinsanto (http://www.lepetitjournal.com/tokyo.html) jeudi 10 mai 2012







