

Le 18 septembre 1961, dans un contexte politique tendu lié à la sécession katangaise, l’un des plus grands Secrétaires généraux des Nations Unies, le suédois Dag Hammarskjöld, périt dans un crash aérien. Accident ou attentat ? Plus d’un demi-siècle plus tard, Stockholm a relancé l’enquête.

D’après un rapport confidentiel des Nations Unies divulgué en septembre dernier, le crash en Rhodésie du Nord (actuelle Zambie) du DC-6 "Albertina" qui emmenait le Secrétaire général, Dag Hammarskjöld, au Congo ne serait pas accidentel. Selon un extrait du document, il s’agirait "très probablement" d’une attaque aérienne de la part d’un agresseur non-identifié. Après trois enquêtes antérieures retenant la thèse d’un accident et notamment d’une erreur de pilotage, les autorités de Stockholm ont exigé l’élucidation de ce mystère vieux de près de 57 ans. Soutenue par plus de 80 pays, la Suède a ainsi soumis un vote le 23 décembre dernier à l’assemblée générale de l’ONU. Une nouvelle enquête est en cours.
La "crise congolaise" comme épilogue

Au cours d’une année marquée par l’élection du président américain J.F Kennedy et le début de la construction du mur de Berlin (1961), Dag Hammarskjöld focalise son attention sur la crise congolaise. Fraîchement indépendante, l’ancienne colonie belge reste instable. C’est ainsi qu’en quête d’indépendance, la province du Katanga, à travers son leader Moïse Tshombe et soutenue par la Belgique, fait sécession le 11 juillet 1960. En pleine "crise congolaise", ce dossier devient alors la priorité du Secrétaire général de l’ONU. Pour la première fois il fait usage de l’article 99 de la Charte des Nations Unies prévoyant la convocation du Conseil de Sécurité.
Hammarskjöld souhaite restaurer la paix et parvient à faire retirer les troupes belges du Congo. Néanmoins, entre tensions grandissantes et guerres civiles, il se résout à déployer 15 000 casques bleus dans le but de mettre fin à cette sécession. L’offensive vire au désastre et ternit l’image pacifiste du suédois. Résolu à négocier un cessez-le-feu avec le Katangais Tshombe, il embarque, pour un aller sans retour, le 18 septembre 1961 à bord du tristement célèbre DC-6 "Albertina".

Un homme de paix
"Quelle meilleure règle de conduite pourrait se donner un Secrétaire général que d’aborder chaque nouvelle difficulté, chaque nouvelle crise en se demandant : qu’aurait fait Dag Hammarskjöld à ma place" ? L’un des successeurs du suédois, Kofi Annan, s’est grandement inspiré de son illustre prédécesseur lors de son mandat (1997-2006). Malgré ce sombre épilogue de la crise congolaise, Dag Hammarskjöld jouit d’une aura l’instaurant au rang de référence dans un monde en constante recherche de pacifisme.
Véritable homme de paix, il a réussi à incarner les valeurs de la Charte des Nations Unies dans un contexte particulièrement tendu de Guerre Froide et de décolonisation. Elu en 1953, puis réélu à l’unanimité en 1957, il s’est refusé, au cours de son mandat, de choisir entre le camp "Occidental" et "Soviétique", préservant la neutralité et l’indépendance de l’ONU.

A la genèse de l’interventionnisme Onusien
Célèbre pour sa lutte contre l’Apartheid et ses multiples médiations, notamment en 1955 où il obtient la libération de 15 soldats américains capturés par la République Populaire de Chine, il est aussi à l’initiative de la première force d’urgence des Nations Unies, les actuels "casques bleus", déployée de manière inédite lors de la crise du Canal de Suez en 1956.
Qualifié de "plus grand homme d’Etat du XXème siècle" par le président américain John Fitzgerald Kennedy, lui aussi tristement disparu, le vertueux et pacifiste Dag Hammarskjöld reçu à titre posthume en 1961, une récompense dont il pourrait être le symbole : le prix Nobel de la Paix.
Kristen Collie, 20 février 2018















