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CES SUÉDOIS PASSIONNÉS PAR LA FRANCE – Anna

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Publié le 23 novembre 2015, mis à jour le 19 mai 2016

 

En cette fin d'année, lepetitjournal.com/stockholm s'est mis en tête d'aller rencontrer des Suédois entretenant un lien particulier avec la France. Rencontre avec Anna, une jeune Suédoise francophile qui a passé un an en Erasmus à Sciences Po Lyon.

À seulement 24 ans, Anna parle déjà quatre langues : outre le suédois évidemment, elle maîtrise l'anglais et l'allemand, et m'accueille avec un français parfait dans ce qu'elle considère comme le « meilleur café de Göteborg ». Un bonnet de laine vissé sur ses cheveux blonds et son sandwich végétarien prêt à être englouti, elle raconte comment elle est peu à peu tombée amoureuse de la France.

Après son bac, Anna a un peu vadrouillé, « comme tous les Suédois ». Elle a pris une année sabbatique à Berlin, où elle a enchaîné stages et petits boulots. Fascinée par ce pays, elle est retournée à Göteborg pour suivre des cours d'allemand pendant un an. Elle a ensuite « commencé ses études » en entamant un Bachelor's de sciences politiques. Mais être trilingue ne suffisait apparemment pas à cette baroudeuse intrépide et polyglotte qui adore déménager, voyager et découvrir d'autres cultures.

Pourquoi as-tu décidé d'apprendre le français ?

J'aimais beaucoup le son de la langue et la culture française m'intéressait. Mais c'était aussi un choix stratégique (rires) : connaître le français, c'est très utile quand on veut comme moi travailler dans le milieu diplomatique ! J'étudiais déjà la langue au lycée, mais à mon retour d'Allemagne, j'ai pris des cours du soir intensifs, et j'ai fait ma demande d'Erasmus. Voilà comment j'ai atterri à Lyon, en septembre 2014.

Que penses-tu du système universitaire français ?

Il est? très différent ! Je pense qu'il faudrait trouver un intermédiaire entre les deux systèmes. En France on étudie dix matières en même temps, alors qu'en Suède on se focalise sur un sujet pendant un mois. En France, je dirais qu'il y a plus de quantité mais moins de qualité, mais l'avantage de la pluridisciplinarité, c'est qu'on peut faire des liens entre les cours d'économie et d'histoire par exemple, c'est très enrichissant. Les professeurs attachent aussi beaucoup d'importance au contexte historique. Je trouve parfois le système français contre-productif, notamment quand les étudiants doivent suivre des amphis de 2h sans pause, parfois sans PowerPoint ni plan de cours. La façon de travailler est complètement autre : en Suède, c'est impossible de se présenter à un examen sans avoir lu des pages et des pages de textes, alors qu'en France le travail personnel est beaucoup plus réduit, les étudiants se contentent d'apprendre leur cours. La hiérarchie professeur-élève est également beaucoup plus marquée en France, ça ne facilite pas les questions. Je trouve aussi que les professeurs donnent beaucoup plus leur avis, leur analyse personnelle, en France alors qu'ici, il faut toujours s'appuyer sur des auteurs. Et puis bien sûr, il y a les partiels? Quand j'ai raconté à ma famille et mes amis suédois qu'en France on avait tous les examens regroupés sur une semaine, avec parfois deux épreuves par jour, ils ne m'ont pas crue ! C'est impensable en Suède.

Les Français sont-ils vraiment différents des Suédois ?

Contrairement à ce qu'on dit, je pense que les Suédois aussi sont chaleureux, mais les Français sont plus à l'aise, moins timides. C'était très facile de m'intégrer et me faire des amis. J'ai aussi adoré le fait que la société française soit très vaste et très riche. J'avais des amis dans trois groupes différents à Lyon, avec chacun leur style et leur façon de parler : les étudiants de Sciences Po, une bande de skateurs, et un groupe de féministes un peu « Queer ». Je voudrais aussi ajouter qu'il y a un stéréotype très vrai sur les Français : la plupart d'entre eux adore parler et débattre longuement de « grands sujets » comme la philosophie, la culture ou la politique. C'est une réalité que j'aime et que je déteste, parce que c'est passionnant, mais parfois prétentieux !

T'es-tu sentie chez toi en France ?

Complètement : la France est ma troisième maison, après la Suède bien sûr et l'Allemagne. J'ai adoré Lyon, cette ville très lumineuse, les soirées passées sur les quais à boire des bières, la foultitude d'événements culturels proposés.

Qu'est-ce que tu as moins aimé pendant ton séjour ?

Ce qui m'a frappée, c'est que les normes sociales sont très strictes en France, et très différenciées selon le genre : comment parler, comment s'habiller? Quand tu t'habilles différemment de la « norme » (ce qui m'arrive souvent), tu as l'impression d'être scannée de la tête au pied, c'est très insultant. Je trouve aussi qu'en France, le féminisme n'est pas communément accepté, contrairement à la Suède. Enfin, je trouve que Lyon est une ville magnifique, mais très bruyante, avec beaucoup de circulation.

Qu'est-ce qui te manque le plus, maintenant que tu es retournée en Suède ?

Les marchés ! C'est très développé en France, beaucoup moins en Suède, et quasiment pas à Göteborg. Et puis le fait d'avoir le même emploi du temps universitaire chaque semaine !

Et dans ta vie de tous les jours, as-tu gardé un petit bout de France ?

J'écoute beaucoup la radio française en bruit de fond (France Inter et France culture), pour ne pas perdre la langue. J'aime écouter Flavien Berger (La fête noire), et en ce moment je lis Le rocher de Tanios de l'écrivain franco-libanais Amin Maalouf, mais ça me prend du temps, c'est difficile. Cet automne, je suis retournée dix jours à Lyon pour revoir mes amis français : la France ne me quitte jamais !

Retrouvez l'interview de deux autres Suédoises passionnées par la France, Ellie et Billie, ici.

Crédits photo : Anna

Marie-Jeanne DELEPAUL lepetitjournal.com/stockholm Mercredi 25 novembre 2015

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