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MONARCHIE – Bientôt un virage vers la République de Suède ?

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Publié le 25 octobre 2015, mis à jour le 3 août 2016

 

La popularité de la monarchie suédoise chuterait sans discontinuer dans l'opinion publique depuis quinze ans. Il existe plusieurs raisons à cela, si l'on passe outre l'existence historique d'un front républicain et antimonarchiste dans le pays... Et si l'on assistait aux préludes d'un grand bouleversement ?

Avec 66 % de soutien en 2003 contre 54 % en 2013, la monarchie est toujours majoritairement appréciée des Suédois. L'on entend souvent des commentaires comme : « Ça a toujours été ainsi » ou encore : « C'est sympa, la monarchie » ou enfin  « Ils représentent bien la Suède ». Mais dans le calme royaume nordique, 20 % des habitants se déclarent farouchement républicains ; un chiffre stable.

La monarchie bat de l'aile

La popularité de la monarchie périclite en fait depuis 15 ans et sans doute la presse a-t-elle sa part de responsabilité dans ce désamour. Un éditorial d'Aftonbladet, un tabloïd suédois, titrait récemment : « Madeleine veut manger le gâteau mais refuse de faire le boulot »et l'appelait à abdiquer. On évoque en effet un « Effet Madeleine », lequel se réfère à un manque d'engagement de la princesse, 3e dans l'ordre de succession après Victoria et Carl Philip. Installée en Angleterre, elle ne viendrait en Suède que pour passer ses vacances et refuserait même de participer aux banquets des Nobels.

Mais même le roi et la reine sont critiqués. À S.M.R. Carl Gustav XVI, on reproche plusieurs déclarations maladroites, par exemple son soutien à la monarchie absolue du Barhein. À la reine Silvia, d'origine allemande, on opposerait les liens supposés de son père avec le parti nazi durant la guerre. Même la très forte popularité de la fille ainée Victoria que d'aucuns appellent d'ores et déjà à prendre le trône n'aiderait pas à contrer l'érosion.

Une royale richesse

Le roi essuie également les critiques des journalistes qui l'accusent d'opacité quant à l'utilisation des fonds qui lui sont alloués. La loi ne l'y oblige pas. Sa richesse personnelle est estimée à 30 millions d'euros, une fortune que les contribuables ont contribué à former ? une goutte d'eau par rapport au prince de Monaco et ses 900 millions d'euros... Avec 230 employés à temps plein, l'apanage royal d'environ 14 millions d'euros annuels atteindra 14,8 millions d'euros en 2016 du fait de l'augmentation des coûts de sécurité. Avec plus de dix châteaux et une propriété de vacances sur l'île d'Öland, le roi a de quoi faire. Il possède également une villa à Sainte-Maxime en France et un chalet dans les Alpes. Actif dans la finance, il est d'autre part l'agriculteur le plus connu de Suède, percevant près de 200 000 euros d'aides européennes en 2013. 

La monarchie la moins chère d'Europe

En termes de budget public, on est cependant loin du coût de Buckingham Palace avec ses 46 millions annuels ou du budget élyséen de 100 millions d'euros du président français en 2014. En fait, la Suède dispose de la monarchie la moins chère d'Europe. Ramenée à la population suédoise, on estime qu'elle couterait un euro cinquante par sujet du roi et par an. Il serait injuste de tenir seulement compte de son coût : la famille royale est un outil marketing pour la Suède qu'il est difficile de chiffrer en termes de retombées économiques. Rien que pour le mariage de la princesse Victoria en 2010 ? qui coûta 2 millions d'euros ?, près de 2300 journalistes du monde entier étaient présents. Quant au roi, il a 70 visites d'État au compteur.Las ! Cette famille ne cesse d'arpenter les tapis rouges du monde entier : 875 représentations en 2014 !

Une monarchie habile et approuvée

Si elle se sait critiquée, la couronne est habile ; en Suède, presque pas de scandale people. Elle s'impose par une attitude exemplaire, incarnant la nation. Ainsi, en 2004, lors du Tsunami qui faucha tant de vies suédoises en Asie, tous les Suédois furent profondément touchés de voir la famille royale se rendre immédiatement auprès des rescapés et des familles des victimes. Le gouvernement de Göran Persson alors au pouvoir mit lui de longs jours à réagir.

Même chose lors de la réforme constitutionnelle de 1975 qui fit trembler la monarchie. Bien que prescrit dans les statuts de son parti social-démocrate, Olof Palme ne put mener la monarchie à l'échafaud : la popularité du roi l'empêcha. Celui-ci accepta de transformer son reste de pouvoir exécutif (nomination du gouvernement et participation au gouvernement) en simple tâches représentatives et cérémonielles. Il abandonna jusqu'au droit d'anoblir !

Le mouvement républicain suédois persiste et signe

Sans doute donc, là où à la Révolution sa cousine française fut décapitée, la monarchie suédoise réussit par son attitude humble à survivre. Sans doute cela suffira-t-il pour qu'elle perdure. Mais à l'heure de la crise en Europe, le mouvement républicain suédois ne chôme pas. L'Association Républicaine suédoise (Republikanska Föreningen) revendique un nombre d'adhérents qui ne cesse de croître: avec plus de 40 000 abonnés sur Facebook, elle est passée de 2 500 à 11 000 adhérents en dix ans.

Certes modeste, ce qui rend le mouvement intéressant est le nombre de responsables politiques dans ses rangs : des députés de toutes sensibilités politiques. On y retrouve par exemple Yasmin Larsson (Sociale-Démocrate), Peter Althin (ex-Chrétien-Démocrate), Birgitta Olhsson (Libérale du Folkpartiet) ou encore Mia Sydow Mölleby (Parti de Gauche). Rien qu'en 2013, ces députés et d'autres déposèrent pas moins de 7 motions au Parlement, demandant la suppression de la monarchie.       

Crédits photo Kungahuset 

Yann LONG ( lepetitjournal.com/stockholm ) Lundi 26 octobre 2015

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