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RIKARD WOLFF – « Meilleur Ambassadeur de la culture française en Suède »

RIKARD WOLFFRIKARD WOLFF
Écrit par Lepetitjournal Stockholm
Publié le 6 mai 2016, mis à jour le 21 mai 2016

Nommé Chevalier de la Légion d'honneur par François Hollande en 2013, l'acteur et chanteur suédois Rikard Wolff n'en finit pas de promouvoir la culture française en Suède. Finesse et passion parcourent son spectacle autour de Brel, « Den sista föreställningen », actuellement présenté à Kulturhuset Stadsteatern. Lepetitjournal.com/stockholm vous propose de découvrir le grand Wolff à travers une interview exclusive?

Cramponnés à ses béquilles, le visage crispé, Wolff avance d'un pas lent mais décidé vers Piccolino, le bar de Kungsträdgården où nous avons rendez-vous. Cela fait près d'une semaine que son tendon d'Achille s'est déchiré, ce qui ne l'a pas empêché de faire un tabac lors de l'ouverture de son spectacle il y a quelques jours. Bien au contraire, s'il y a quelque chose que Wolff ne supporterait pas, ce serait de ne plus pouvoir se produire sur scène.

Une fois assis, un verre de rosé à la main, Wolff se lance rapidement dans un récit à la fois sérieux et humoristique sur sa vie profondément imprégnée par la culture française. C'est à la manière d'une encyclopédie vivante qu'il jongle entre son passé et celui de ses idoles françaises en enchaînant dates, anecdotes, chansons, histoires d'amour, spectacles? à commencer par la chanteuse qui fut une révélation pour lui dès son plus jeune âge.

« Piaf? je suis tombé dans la marmite quand j'étais petit »

Né à Stockholm en 1958, Wolff passe les dix premières années de sa vie à Gubbängen avant de déménager à Karlstad où il développe presque « une relation religieuse avec Piaf ». Son amour pour la chanson française remonte cependant bien plus loin, peut-être même avant sa naissance, lorsque ses parents se rencontrent à Paris où ils passent trois ans et découvrent Piaf. Deux ans plus tard, et âgé de seulement un mois, c'est au tour de Wolff d'être bercé par « la Môme » :

« Piaf? je suis tombé dans la marmite quand j'étais petit. J'avais seulement un mois lorsqu'elle est venue se produire à Berns. Après avoir chanté une centaine de fois à l'Olympia de Paris, Piaf était désormais à Stockholm pour la première fois pendant trois semaines ! Mes parents n'avaient jamais eu l'occasion de la voir en vrai auparavant, car à l'époque, elle était avant tout une grande chanteuse de gramophone. Alors quand ils sont allés la voir à Berns, ça a été un choc : ma mère pensait que c'était une blague ou une erreur lorsqu'elle a aperçu ce petit bout de chanteuse et entendu? cette voix ! »

À l'âge de 12 ans, Piaf vient alors consoler les douleurs et le désir d'amour de Wolff. Il découvre tout d'abord un livre sur la vie de l'artiste puis cherche rapidement à comprendre le français. Aujourd'hui, il le parle couramment. Le printemps prochain, il se produira en français à Paris avec la chanteuse Anne Sofie von Otter. Sur un ton satirique, il se met à fredonner Ne me quitte pas en suédois pour montrer que les traductions ne rendent pas toujours bien. Wolff boit une gorgée et reprend son récit avec passion :

« Piaf était pour moi comme un Michael Jackson. Aucun de mes amis n'écoutaient Piaf mais aujourd'hui, elle est de loin la plus grande artiste française sur Spotify. Non, je ne regrette rien a été écouté plus de 20 millions de fois. Génération après génération, Piaf continue à cueillir des adolescents qui, comme moi auparavant, découvrent un livre sur elle ou une chanson et ne peuvent plus s'en passer. C'est incroyable comme elle a réussi à entretenir une carrière Post mortem : tout d'abord avec un livre, puis avec une pièce de théâtre qui a été jouée à travers le monde dans les années 1980 et trente ans plus tard avec un film qui, de plus, a gagné un Oscar. Il n'y a aucun artiste qui a réussi à se réactualiser tous les dix ans de cette manière tout en étant décédé à seulement 47 ans.  

Un interprète d'une grande sincérité 

Plongé dans ses mémoires d'enfance aux diverses couleurs, Wolff revient soudainement à la réalité lorsqu'une connaissance vient le saluer à notre table. Je reprends le fil de la discussion bien que cela fasse longtemps que je l'ai perdu tellement je suis plongée dans ses souvenirs et impressions des grands de la chanson française. D'ailleurs, il va de soi que ce style de musique n'a rien d'exotique pour Wolff, contrairement à d'autres artistes suédois qui se lancent parfois dans des interprétations trop romantiques de la chanson française en frôlant le cliché. Mais cette musique a accompagné Wolff dans ses craintes et ses joies depuis sa naissance, ce qui lui permet aujourd'hui de construire quelque chose d'unique entre la France et la Suède.

Contrairement à son spectacle précédent autour de Piaf qui était plutôt dédié à la jeunesse, « Den sista föreställningen » traite de la vieillesse, de nos rêves d'enfants, de leurs réalisations et de ce qui leur succède : « Brel était un personnage fascinant, avec plusieurs projets issus de rêves d'enfants ». Souffrant d'emphysème, une maladie des poumons, Wolff en parle ouvertement et s'en inspire également dans son spectacle.

Je prends peur en regardant ma montre, deux heures sont passées et j'ai l'impression que la discussion vient tout juste de commencer. Nous sommes désormais en train de parler de ses rencontres impressionnantes avec Barbara, une artiste qu'il juge être le meilleur exemple pour les femmes auteures-compositrices de nos jours. Puis nous enchaînons avec la culture française qui est « non une mais plusieurs cultures », avec Paris comme siège principal. Son premier souvenir de la capitale remonte à ses neuf ans, dans le métro : « J'ai été étonné de voir tant de noirs autour de moi, je les trouvais tellement beaux et différents. Paris est le symbole du mélange des nationalités et l'emblème de tout ce que les extrémistes détestent : des personnes d'origines diverses qui se rencontrent et se mélangent. Cela me convient tout à fait d'être franco-suédois. Ma première réaction quand j'ai appris pour les attentats en novembre à Paris a été de vouloir aller m'installer à une terrasse de café de la capitale. Pour moi, Paris est immortelle. »

Puis, c'est avec un regard fier et pétillant que Wolff me confesse les paroles de Jacques Lapouge, Ambassadeur de France en Suède, qui lui ont été adressées à la fin de la première de son spectacle : « Vous êtes le meilleur Ambassadeur de la culture française en Suède ».

 

Informations pratiques

« Den sista föreställningen » ? Wolff sjunger Brel

Où : Kulturhuset Statsteatern, Sergels torg, Stockholm 

Quand : Jusqu'au vendredi 3 juin 2016

Tarifs : 375 kr; 320 kr (retraités); 300 kr (étudiants à partir de 26 ans); 280 kr (jeunes de moins de 25 ans); 190 kr (enfants de moins de 12 ans)

Langues : Suédois hormis quelques chansons en français

Site

 

Crédits photos : Anders Thessing / Kulturhuset Stadsteatern, Petra Hellberg / Kulturhuset Stadsteatern

 

 

Fanny MARÉCHAL lepetitjournal.com/stockholm Samedi 7 mai 2016

lepetitjournal Stockholm
Publié le 6 mai 2016, mis à jour le 21 mai 2016

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