Avec une superficie limitée et une population qui ne cesse d'augmenter, la cité-Etat a pris conscience qu'un système efficace en matière de collecte, d'élimination et de tri sélectif des déchets était un enjeu crucial pour l'avenir
Toutes les activités humaines produisent des déchets, même celles liées à la nature avec les déchets verts. Pour la cité-Etat comme pour de nombreux pays dans le monde, la gestion des déchets représente un véritable enjeu financier de part l'augmentation croissante des coûts de gestion des déchets mais aussi environnemental.
Neuf secteurs de collecte et quatre entreprises collectrices
A Singapour, c'est la National Environment Agency (NEA) qui est responsable de la planification, du développement et de la gestion des installations d'élimination des déchets solides (ordures ménagères, encombrants, déchets recyclables, déchets organiques et cendres des usines d'incinérations. Ainsi, c'est elle qui accorde les licences aux collecteurs de déchets publics, qui réglemente la collecte des déchets et qui fait appliquer les sanctions en cas de décharges illégales. Depuis 1999, les marchés publics de collecte sont octroyés par appels d'offre pour une durée de sept ans.
Les déchets municipaux concernent tous les déchets des bâtiments utilisés exclusivement à des fins résidentielles (appartements en HDB, maisons individuelles, et les appartements privés ayant optés pour le régime public de collecte des déchets), les commerces, les stations-service, les établissements publics, les écoles, les centres communautaires? Les condominiums ainsi que les centres commerciaux relèvent de contrats spécifiques privés souscrits auprès des entreprises collectrices agrées par la NEA. A ce jour, quatre entreprises collectrices se partagent les neuf secteurs géographiques pour la collecte des déchets publics ainsi que la collecte des matières recyclables provenant des ménages dans le cadre du Programme de Recyclage National. Parmi elles, l'entreprise française Veolia Environnemental Services qui collecte les déchets auprès d' 1,5 millions de personnes.
L'élimination des déchets solides
Dans les années 60 et 70, la cité-Etat s'est appuyée sur un certain nombre de décharges autour de l'île pour gérer ses déchets solides. Cependant, les contraintes d'espace l'ont orientée vers l'option la plus rentable lui permettant de réduire le volume de déchets de plus de 90% à savoir l'incinération. Ces usines d'incinération récupèrent l'énergie produite par la combustion des déchets pour contribuer à hauteur de 3 à 4% de l'électricité nationale consommée. On parle donc de valorisation énergétique. Deux usines sont gérées par le secteur privé (KSTP - la plus récente avec une capacité de 800 tonnes/jours et Senoko ? 2100 tonnes/j) deux autres sont nationalisées (Tuas dont la fermeture est prévue en 2015, une des plus anciennes - 2500 tonnes/j et Tuas South ? 3000 tonnes/j, une des plus importante au monde). Depuis le 1er avril 1999, la cité-Etat s'est dotée d'une décharge offshore sur l'ile de Semakau. D'une superficie de 350 hectares, elle permet l'enfouissement de déchets non destinés au recyclage. En 2008, 2.000 tonnes/j auraient été enfouis.
Au fil des ans, la production de déchets solides de Singapour a augmenté considérablement, passant de 1.260 tonnes par jour en 1970 pour atteindre 7.787 tonnes par jour en 1998. En 2009, Singapour a produit 6,61 millions de tonnes de déchets solides dont 42% ont été incinérés et 58% recyclés. Sur ce pourcentage, on note que les débris liés à la construction sont recyclés à hauteur de 98%, le métal 82%, le papier 48%, le verre 21% et le plastique 9%. Ainsi les déchets ménagers ne représentent qu'environ 10% des produits recyclés.
Education et promotion du recyclage
Le Programme national de recyclage (PNR) a été lancé en avril 2001 pour promouvoir la réduction des déchets et le recyclage dans les maisons, les condominiums, les HDB, les écoles, les zones industrielles?
En vertu de ce programme, la collecte des déchets publics doit s'effectuer tous les 15 jours soit dans les bacs prévus à cet effet soit dans les sacs en fonctionnant au porte à porte. Pour les logements privés type condominiums, depuis novembre 2008 les conseils de gestion de copropriétés sont tenus de fournir des récipients pour le recyclage et d'envoyer ces matières recyclables collectées (verre, cartons, papier?) à des centres de tri secondaire.
Au sein des écoles le recyclage a été lancé en septembre 2002. L'objectif du programme est d'éduquer et d'inculquer l'habitude de recyclage auprès de la jeune génération en mettant à disposition des élèves des bacs de recyclage pour le papier, les canettes et bouteilles. L'objectif pour Singapour étant d'atteindre les 70% de taux de recyclage à l'horizon 2020 en augmentant la part recyclée des déchets ménagers.
Le pilote GRIN, Green Reward Initiative mis en place ce mois-ci par Veolia ES auprès de 6.000 ménages de secteur Tanglin-Bukit Merah va dans ce sens. Chaque foyer sera équipé d'un bac recyclable muni d'une puce électronique avec ses coordonnées. A chaque pesée, le poids des déchets recyclables est enregistré avec une collecte de points sous forme de bons de réductions ou d'achats.
Réduire, Réutiliser, Recycler
Le principe des ?3 R' permet de réduire la production d'ordures ménagères nécessitant un traitement collectif. Or la réduction du volume de déchets signifie automatiquement la réduction du nombre de camions poubelle sur les routes, la réduction de déchets incinérés ou mis en décharge.
Suivant les matériaux collectés, ils seront soient orientés directement vers la filière de recyclage, soient ils subiront un deuxième tri plus affiné et rejoindront ensuite les filières de recyclage. C'est le cas avec Veolia ES, une ligne de tri a été introduite en 2005, pour fournir une capacité de tri supplémentaires afin de répondre à la demande croissante en matières recyclables triées, telles que le plastique, le verre et les matériaux métalliques ainsi que le papier (boîtes en carton ondulé, vieux journaux, papiers de bureau). Ces matières recyclables sont ensuite acheminées et vendues auprès d'industriels en Asie qui réutiliseront ou recycleront ces produits.
Diaporama photo Carole Chomat et Veolia ES
Pour conclure, il existe donc une véritable filière de recyclage sur Singapour, mais qui demande à être renforcée grâce à une meilleure information et éducation de la population. Nul doute que la cité-Etat saura relever ce défi pour les générations futures?
Carole Chomat (www.lepetitjournal.com-Singapour) mardi 12 avril 2011