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FRANCAIS DE SHANGHAI – Alexandre Daune veut changer d'air

Écrit par Le Petit Journal Shanghai
Publié le 13 janvier 2016, mis à jour le 14 janvier 2016

Par Pascale Brites 

Après vingt ans passés dans la plus grande ville de Chine, Alexandre Daune a des envies d'ailleurs. À la tête de trois établissements, il a réalisé son rêve : devenir restaurateur. Mais la vie en Chine est devenue trop compliquée et il souhaite se tourner vers d'autres horizons.

Alexandre Daune devant la terrasse du Saleya, 570 Changle Lu

Il est 12h30. Alexandre nous a donné rendez-vous au Saleya, un bistro français qu'il a ouvert il y a plus de douze ans et qui reste aujourd'hui sa fierté. Dès les premières minutes, on comprend que le quadragénaire est un hyperactif qui jongle entre ses collaborateurs du restaurant et son wechat pour arranger un rendez-vous ou pour relancer un fournisseur. Curieux et travailleur, il l'a toujours été. Et c'est d'ailleurs ce qui l'a conduit, le 17 janvier 1996 a poser sa "petite valise orange" à Shanghai. "Je me faisais chier en France !" déclare-t-il, un brin provocateur. En seulement trois ans à Paris et malgré son absence de diplômes, il avait grimpé les échelons très vite, passant de commis à premier maître d'hôtel. Alors quand une amie lui propose de venir découvrir Shanghai, il saute dans l'avion. "Je suis arrivé avec 1300$ en poche. Ça paraît beaucoup, mais en fait ce n'est rien !" nous raconte-t-il.

Intérieur du bistro le Saleya

Des rêves et des ambitions
Il découvre alors une Chine bien différente de celle d'aujourd'hui. "La location d'appartement locaux était interdite aux étrangers, les loyers hors de prix et il était défendu pour les Chinoises de nous fréquenter" explique-t-il. Mais en seulement quinze jours, le jeune français décroche un job dans la restauration, fait des rencontres et trouve un appartement pour les Taïwanais où les étrangers étaient tolérés. Il a alors toujours un même but : ouvrir son propre restaurant. Et pour cela, il va multiplier les emplois parallèles pour se créer un fonds d'économies. Pendant plusieurs années, il sera "fret forwarder" mais possèdera aussi une boutique de décoration, vendra des meubles,... En août 2003, il ouvre le Saleya. "Ça a commencé par un petit bistro pour devenir un restaurant dix ans plus tard" nous explique-t-il. Le bistro, "le côté le plus sympathique de la restauration", selon lui. Mais ne vous attendez pas à manger un hamburger ou une saucisse-frites au Saleya : l'établissement tend aujourd'hui plutôt vers la bistronomie que vers la cantine. Malgré le plaisir et la fierté qu'a Alexandre à nous présenter son établissement et à nous faire découvrir des plats aussi bons que beaux, il affiche cependant un certain ras-le-bol de la vie à Shanghai. Bien qu'il nous confie que "98 % des clients sont des gens très sympas", les conditions de vie et le business y sont de plus en plus durs. En Chine, "tu crées mais tu ne construis pas", résume-t-il.

La tarte au citron meringuée

Une vision à court terme
S'il a rapidement accepté qu'il serait difficile de s'intégrer et reconnaît qu'on reste toujours un étranger en Chine, Alexandre y a tout de même réalisé un beau parcours : il a ouvert quinze restaurants, en possède aujourd'hui trois (NDLR : Le Saleya, La Pétanque et Revolucion Cocktail) et est marié depuis seize ans à une Shanghaienne avec qui il élève leurs deux enfants. Il a aujourd'hui le sentiment du devoir accompli mais aussi une grande lassitude pour un pays auquel il faut constamment s'adapter. "Les Chinois ne vivent que par l'argent et par le shopping" déclare-t-il d'un ton blasé avant de renchérir "Ils ne savent pas profiter des petits plaisirs de la vie". Et puis il y a le coût de la vie et la pollution, toujours grandissante, qui lui fait dire qu'il ne veut pas "crever ici avec un cancer des poumons". Pour tout cela, Alexandre a décidé de partir, d'ici un à deux ans, au Canada. "Je peux y faire le même métier, mais en possédant les murs de mon restaurant" nous explique-t-il. "Les taxes y sont bien moins élevées qu'en France et les gens sont prêts à travailler". Mais pour autant, Alexandre ne claque pas la porte à Shanghai : il reviendra régulièrement s'occuper du Saleya. Et il suffit de le voir plaisanter avec son couturier passé présenter les nouveaux tabliers, ou avec sa chef pâtissière, qui finit son service, pour constater combien il affectionne les gens qui l'entourent.
Alexandre s'apprête donc à tourner la page sur une expérience de vingt ans, pour accomplir de nouveaux rêves, et pourquoi pas celui qu'il fait depuis longtemps d'ouvrir un jour un autre bistro, mais chinois celui là !

Pascale Brites pour lepetitjournal.com/shanghai Jeudi 14 janvier 2016

Le Petit Journal Shanghai
Publié le 13 janvier 2016, mis à jour le 14 janvier 2016

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