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MUSIQUE - A la découverte de la Pop chinoise

Écrit par Le Petit Journal Shanghai
Publié le 20 février 2012, mis à jour le 15 novembre 2012

La mort de Whitney Houston, ce samedi 11 février 2012, a ému de nombreux fans chinois fascinés par la culture Pop américaine. Les Hongkongais se sont immédiatement précipités dans les magasins de disques pour acheter des albums en hommage à la chanteuse. Constatant l'intérêt marqué des Chinois pour la musique occidentale, nous en avons profité pour, réciproquement, nous aventurer sur le terrain mal connu de la C-pop ou « pop chinoise »

La culture Pop: paillettes, musique entrainante et couleurs éclatantes


Les centres de production de la Pop music sont essentiellement Hong Kong et Taiwan et non la Chine Continentale. Historiquement, la Pop music considérée comme un « poison capitaliste » a été bannie par le parti communiste pendant la révolution culturelle de Mao. Encore aujourd'hui, même si les salles de concert sont pleines et que les jeunes chinois sont souvent inscrits au conservatoire, le climat politique n'est pas propice à la créativité. L'esprit de révolte et le désir de se différencier de la génération de ses parents sont perçus comme un malaise occidental plus que comme le bouillon créatif de la jeunesse. Le gouvernement garde un ?il attentif sur les paroles et sur la symbolique des derniers hits du moment, prêt à censurer toute incartade.


Mandopop vs Cantopop

 

La C-pop se divise en deux courants principaux. La Cantopop (Musique populaire cantonaise) est produite essentiellement à Hong Kong et est chantée en cantonais. Sa rivale, la Mandopop (Musique populaire en mandarin), est née à Taiwan, Pékin mais également à Hong Kong. Elle est chantée en Mandarin standard. Même si la scène musicale est dominée par la Cantopop, nous observons depuis ces dernières années un gain de popularité de la Mandopop. D'après le journaliste musical Mark Levin, à Hong Kong, en 2008, celle-ci représente la moitié des ventes, contre 1/10e cinq ans auparavant.


Maintenant, partons à la découverte des morceaux et des chanteurs emblématiques de la C-Pop. Il s'agit d'une musique qui s'apparente à la « Pop chewing gum », à l'opposée de l'esprit « sex, drugs and rock'n roll ». Le morceau caricatural est la ballade romantique aux paroles excessivement naïves. Les concerts sont toujours très aseptisés et accueillent un public policé. Quand Britney Spears chante à moitié nue, le corps ruisselant de sueur « I am a Slave 4 u », les jeunes chinoises timorées rêvent d'un amour pur et platonique.

 

Les Twins, des adolescentes virginales... en apparence


L'innocence feinte des Twins

 

Entre 2001 et 2003, le groupe Twins composé de Gillian Chung et de Charlene Choi gagne au total 72 prix. Le groupe fait partie des plus grands succès de la Cantopop. Dans la chanson « You aren't a good lover », récompensée en 2006, les deux jeunes filles à peine maquillées, habillées de longues robes blanches et errant dans une grande maison vide racontent un chagrin d'amour : celui d'une jeune fille qui fuit son prétendant quand elle apprend qu'il en aime une autre. Pendant ce temps, des photos compromettantes de l'innocente Gillian circulent sur internet. L'affaire fait le tour des médias internationaux et vient casser l'image que les petites filles sages s'efforçaient de véhiculer au peuple.

 

 

 

Les trois membres du groupe S.H.E : elles ont tout des américaines, sauf l'audace!


S.H.E, quand les chinoises singent les Lolita américaines

 

Plus récemment, dans la catégorie Mandopop, comment ne pas évoquer l'émergence récente du groupe taiwanais S.H.E (les initiales des chanteuses) créé par Selina Jen, Hebe Tien, et Ella Chen. Les jeunes stars ont déjà vendu 15 millions d'albums mais ont également participé à des séries et des shows télévisés populaires en Chine. Dans la chanson « Superstar », les filles sont légèrement plus dévergondées et énergiques que les Twins. Donnant un concert dans une foule en délire, les nymphettes à l'allure glam rock s'exaltent sur un homme inconnu : « You are electricity! You are light! You are my only myth! , I just love you. You are my super star. ». Malgré leur aplomb, le clip reste bien prude : aucunes lèvres ne se touchent, les chanteuses enamourées se languissent sous la pluie dans l'attente de l'être désiré.


 


Top Combine n'a rien à envier aux groupes féminins


Et passons aux Boys Bands?

 

Ce sont des garçons et ils viennent de Chine Continentale. Bird Zhang, Caesar Li, Mars Ma, Kenny Liu, et Tanas Kim du groupe « Top Combine » ont émergé en 2008 et ont été nommés « China's Number One Motivational Boy Band ». Très vite, ils sont accusés de copier les groupes coréens qui sont un modèle pour toute l'Asie en matière de Pop music. Le clip du morceau « Cotton Candy » met en scène les jeunes hommes à l'allure efféminée et au style sophistiqué dans un cadre similaire à « Disneyland » : ballons roses, château magique et manèges aux couleurs pastelles. De quoi faire fondre les adolescentes baignées dans la sauce sirupeuse de la C-pop !

 

 

 

La culture Pop à la chinoise, encore bien trop sage pour marquer les esprits


La C-pop, condamnée par des normes autoritaires

 

La pop chinoise semble s'inspirer de plus en plus de la culture américaine. Les clips, particulièrement travaillés sont de véritables explosions de couleurs et d'extravagance ; les chorégraphies sont dynamiques et entrainantes ; la musique facile d'accès séduit aisément les jeunes publics. Cependant, la critique principale adressée à ce mouvement musical est son manque d'originalité. Quand la pop occidentale a vu émerger des personnalités aussi légendaires que Whitney Houston, Michael Jackson ou Madonna, beaucoup de groupes chinois semblent reproduire éternellement la même parodie de Taylor Swift. Les thèmes abordés tournent presque toujours autour des fantasmes amoureux d'une jeune fille pure. Les chanteuses portent les mêmes tenues courtes et près du corps que leurs homologues américaines mais arborent un sourire naïf bien loin des regards provocateurs de nos idoles occidentales.

 

Malgré les évolutions récentes, pourquoi la musique chinoise n'arrive-t-elle toujours pas à s'exporter ? Ne devrait-elle pas contenir une once de révolte et de provocation pour nous faire vibrer ? Thomas Mann affirme que « La musique est le domaine des démons », probablement parce qu'elle nous touche quand elle exprime les émotions les plus brutes, qui ne sont pas apprivoisées par un système politique étouffant. Tant que le pouvoir regardera d'un ?il sévère la moindre ligne anti conventionnelle,  la C-pop ne décollera pas. Mais, cet état d'esprit est profondément enraciné dans les m?urs chinoises : la société prime sur l'expression de l'individualité. Or la musique qui nous emporte est par essence l'affirmation profonde d'une personnalité unique et exceptionnelle.


Clara Leonard (www.lepetitjournal.com/hongkong.html) lundi 20 février 2012

Le Petit Journal Shanghai
Publié le 20 février 2012, mis à jour le 15 novembre 2012

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