

Installé depuis douze ans au Brésil, Stéphane Haddad se consacre depuis six ans à sa deuxième passion : la gastronomie. Il est à l'origine des restaurants Galerie 1618 et de La Fabrique, tous les deux situés à Leme. C'est avec un sourire chaleureux et un regard curieux que Stéphane accueille Lepetitjournal.com
Lepetitjournal.com - Pourquoi avoir choisi le Brésil pour vous installer ?
Stéphane Haddad - Le Brésil est une histoire d'amour qui s'est concrétisée par la naissance de ma fille qui est d'origine franco-brésilienne. Je me suis par la suite séparé de la maman et j'ai dû tous les mois faire les trajets Paris-São Paulo pour voir ma fille. J'ai réalisé au fur et à mesure de mes voyages que je pouvais adapter mon travail ici et ainsi pouvoir rester près de ma fille. En 2000, j'ai réalisé mon projet : créer ma production exécutive de films à São Paulo.
Qu'est-ce qui vous a finalement amené à quitter votre vocation première, c'est-à-dire la production de cinéma, pour vous tourner vers une toute autre activité, celle de la gastronomie ?
En me spécialisant dans la restauration, j'ai le sentiment d'être en phase avec ma profession précédente. Créer mon restaurant et élaborer mes menus est une création artistique, tout comme trouver un décor approprié pour un tournage cinématographique. C'est un métier de détail, tout comme le cinéma. Pour moi, la gastronomie est une révélation artistique, un accomplissement de soi. De plus, en 2005, le marché du cinéma n'étant plus aussi porteur, j'ai décidé de rebondir vers autre chose et j'ai naturellement choisi ma deuxième passion : la cuisine.
A-t-il été facile pour vous de s'installer en tant qu'entrepreneur à Rio ?
Le chemin n'a pas été facile et j'ai rencontré principalement deux difficultés. Tout d'abord, sur le plan pratique, j'ai du faire face à la complexité de l'administration brésilienne et au fonctionnement des banques qui pratiquent des crédits à taux très élevés. De plus, il n'existe ni organisme professionnel, ni mode d'emploi qui aide l'entrepreneur qui souhaite s?installer. J'ai dû moi-même trouver par exemple les fournisseurs fiables et m'imposer tout seul dans le métier dont le droit d'entrée est difficile, ainsi que la méthode de travail.
Ensuite, la seconde difficulté et selon moi la plus ardue à surmonter est l'aspect humain. Pour un Français qui s'installe au Brésil, la plus grande problématique est de comprendre la culture du pays. Pour moi c'est ce qui m'a pris le plus de temps. Les Brésiliens sont exigeants, ont des habitudes alimentaires différentes des nôtres, ont peu de culture gastronomique et gustative. Il faut une grande humilité pour se soumettre au départ à ce mélange de cultures. J'ai continué cependant à me fier à mon instinct et j'ai réussi à fidéliser ma clientèle. Je me suis débarrassé de mes préjugés pour m'imprégner du savoir-vivre brésilien. Les Cariocas sont humbles, possèdent de grandes richesses culturelles sans pour autant les exposer au premier abord. J'ai essayé de mieux les comprendre, j'ai changé ma manière de communiquer avec eux et du coup je ressens beaucoup plus d'aisance dans ma vie quotidienne. Respecter la différence culturelle est primordial pour réussir son intégration.
Aujourd'hui quelle est votre plus grande satisfaction ?
J'ai toujours suivi l'instinct du c?ur, c'est comme ça que je fonctionne. Je ne suis pas dans le calcul. J'aime les autres et faire sans cesse de nouvelles rencontres. Galerie 1618, dès sa création, est devenu le repère des Français de Rio. C'est un lieu de rencontre et de services rendus. Les nouveaux arrivants viennent chercher des conseils. C'est un restaurant dynamique qui organise des concerts de musique française, des expositions, etc. tout en conservant sa touche internationale. La Fabrique est aussi un beau lieu de rencontre qui se situe sur le front de mer.
J'aime réaliser des plats qui se partagent (moqueca, poissons, tapas) afin d'instaurer un climat de convivialité. Tout individu qui vient découvrir mon restaurant a son histoire et chaque nouvelle rencontre est pour moi d'une grande richesse.
Mon plus grand bonheur est de communiquer avec des gens de tous bords. Ils me font découvrir toujours plus de choses. J'associe avec beaucoup d'amour mon plaisir de cuisiner avec celui de connaître de nouvelles personnes.
Et si vous deviez qualifier Rio de Janeiro, que diriez-vous ?
C'est mon endroit, celui où tous mes rêves se sont réalisés.
Marion DE LAVENNE (www.lepetitjournal.com/rio) jeudi 10 mai 2012









