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Mexique: le président dénonce "une trahison" après le rejet de son projet phare contesté par les Etats-Unis

Manifestation contre le projet de réforme de la constitution au MexiqueManifestation contre le projet de réforme de la constitution au Mexique
Écrit par AFP
Publié le 18 avril 2022, mis à jour le 19 avril 2022

Le président Andres Manuel Lopez Obrador a dénoncé lundi une "trahison du Mexique" après le rejet la veille par les députés de son projet phare de réforme de la Constitution visant à renforcer le secteur public dans la production d'électricité, une mesure décriée par les Etats-Unis.

Le président de gauche nationaliste a fustigé les députés d'opposition qui "au lieu de défendre les intérêts du peuple, de la Nation, se sont transformés en francs défenseurs d'entreprises étrangères".

Malgré des tentatives de débauchages, son parti Morena (Mouvement pour la régénération nationale) et ses alliés n'ont pas atteint la majorité qualifiée des deux tiers à la Chambre des députés, où trois grands partis d'opposition ont fait bloc et voté contre.

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Le seuil se situait à 332 voix pour 498 présents (sur 500 au total). Après plus de douze heures de débats survoltés et d'invectives, 275 députés ont voté pour et 223 contre ce projet de réforme de trois articles de la Constitution (25, 27 et 28) sur "la propriété des terres et des eaux" et l'interdiction des monopoles.

Le président avait élevé la question de la réforme du marché de l'électricité au rang des enjeux de souveraineté nationale face aux entreprises étrangères, américaines et espagnoles.

Son projet prévoyait de revenir sur la libéralisation approuvée en 2013, en garantissant 54% du marché à l'entreprise publique Commission fédérale d'électricité (CFE) face au secteur privé, contre 38% actuellement.

Les Etats-Unis dénoncent un risque pour les milliards d'investissements privés des entreprises américaines au Mexique.

- "Litiges interminables" -

L'ambassadeur américain à Mexico, Ken Salazar, avait estimé que l'approbation de la réforme pourrait provoquer des "litiges interminables" dans le cadre du traité de libre-échange Mexique-Etats-Unis-Canada.

L'Espagne redoute également les conséquences pour ses entreprises privées, comme Iberdrola.

Le Conseil coordinateur des entrepreneurs (CCE, groupe de défense du secteur privé) a salué lundi "la responsabilité dont ont fait preuve les législateurs".

Le président avait tenté de fissurer le bloc d'opposition regroupant l'ex-parti Etat du PRI, le PAN (droite) et le PRD (gauche). "AMLO" - ses initiales, son surnom - avait par exemple dès septembre nommé un ex-gouverneur du PRI ambassadeur à Madrid. Peine perdue: il a été exclu des rangs du PRI.

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Le président de la République avait minimisé d'avance sa défaite annoncée. "Quoi qu'il arrive, nous sommes blindés contre la trahison", avait-il déclaré dimanche.

Il faisait référence à une décision de la Cour suprême il y a dix jours. La Cour a estimé que la loi donnant la priorité à l'entreprise publique CFE par rapport aux entreprises privées était constitutionnelle.

Cette loi avait été approuvée par le Congrès début 2021, à la majorité simple. Baptisé Loi de l'industrie électrique (LIE), le texte a immédiatement fait l'objet de nombreux recours du secteur privé.

"S'ils (les juges de la Cour) l'avaient déclaré inconstitutionnelle, alors nous n'aurions plus rien", a ajouté le président lors de son habituelle conférence de presse lundi.

Le président avait également annoncé la semaine dernière qu'en cas de "trahison des députés" sur sa réforme constitutionnelle, il transmettrait dès lundi une "loi minière" "pour que le lithium reste propriété de la Nation".

Cette loi contre de nouvelles concessions d'exploitations de ce minerai -stratégique pour la fabrication des batteries- ne requiert que la majorité simple.

Avant son échec prévisible à la Chambre des députés, "AMLO" avait validé son maintien au pouvoir jusqu'à la fin de son mandat en 2024 lors d'un référendum dimanche dernier.

Au total, plus de 90% des votants s'étaient prononcé pour la poursuite de son mandat - mais avec moins de 20% de participation.

Les députés ont asséné "le coup législatif le plus dur au président et à la majorité du bloc officiel", selon le quotidien d'opposition Reforma.

Le parti présidentiel Morena "est inflexible dans ses postures et n'a pas été disposé à parvenir à des accords de fond avec l'opposition", estime le journal Milenio.

"Les intérêts transnationaux ont parlé par la bouche des députés de la coalition +Va por Mexico+", écrit en revanche la Jornada (proche du pouvoir), à l'unisson du président.

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