

Ex-directeur du journal El Sol de Acapulco, le journaliste Juan Rodríguez Rodríguez apporte son regard sur le symbole que représente l'attaque contre le journal satirique Charlie Hebdo et nous parle de la situation des journalistes au Mexique. Un véritable hommage à la liberté de la presse en France, au Mexique et dans le monde.
Rassemblement JeSuisCharlie devant l'ambassade de France à Mexico jeudi 8 janvier 2015 (photo Jean-Marie Legaud)
![]() Ex-directeur du journal El Sol de Acapulco, Juan Rodríguez Rodríguez (photo DR) a exercé plus de 35 ans le journalisme, et a, entre autres, été reporter pour de nombreux médias comme chef d'information du quotidien El Universal, et aussi du journal El Sol de Mexico ainsi que El Sol de Toluca. Il a consacré la majeure partie de sa carrière à la presse écrite, et a collaboré aussi à la radio. Il intervient actuellement pour diverses émissions de radio au Mexique et aux États-Unis. Juan Rodríguez Rodríguez tiene más de 35 años ejerciendo el periodismo y, entre otras funciones, ha sido reportero de numerosas fuentes así como jefe de información de "El Universal", jefe de información de "El Sol de México" y Director-Gerente de "El Sol de Acapulco" y "El Sol de Toluca". Su labor se ha desarrollado notablemente en la prensa escrita, sin embargo ha colaborado y colabora actualmente en diversas emisiones de radio en México y EEUU. |
Acapulco n'est plus la même. Elle garde toujours sa beauté de port du Pacifique, son climat agréable, ses plages de rêve et son ciel d'un bleu limpide, mais désormais tout est entaché par la violence.
¡Ratatatata!, pétaradait la kalachnikov AK-47, "cuerno de chivo" ("Corne de chevreau") ; mitraillant par rafales les employés du quotidien « El Sur », à seulement une rue de l'avenue principale d'Acapulco. C'était le 11 novembre 2010.
A l'intérieur du journal, il y avait plus de 20 personnes, la plupart des femmes, chargées des derniers détails des brèves qui devaient se publier le jour suivant. Entre les hurlements, les suppliques et les prières, trois individus, habillés de noir et avec passe-montagne, exécutaient les ordres; faire peur au maximum à tous les gens travaillant pour ce support d'information et brûler les installations.
Dans l'Etat du Guerrero, les statistiques -officielles et secrètes- sur les homicides semblaient terrifiantes. On comptait en 2010 chaque jour au moins 20 exécutions, qui vont des décapités aux écartelés en passant par les écorchés et les pendus sous les ponts de la ville.
Personne ne succomba cette nuit de novembre dans la rédaction car les tirs se sont logés dans le plafond et les murs, en épargnant les trois réservoirs d'essences. Et les forces de sécurité ? Après une demi-heure, les policiers locaux sont arrivés, ensuite les fédéraux et en dernier l'armée, uniquement pour prendre les déclarations, faire leur rapport et s'en aller. Jamais les coupables de cet attentat ne furent arrêtés.
Un mois plus tard, j'ai dû laisser le journal El Sol de Acapulco, et partir rapidement du port d'Acapulco, pressé par les menaces reçues par téléphone, par emails et par des inconnus qui prenaient l'habitude de me suivre les soirs et les nuits, ce genre de comportements qui présageaient un dénouement fatal. Oui, je me sens survivant de l'horreur et de la folie.
Aujourd'hui, quand je vois la tragédie de l'hebdomadaire "Charlie Hebdo" à même la capitale de la France, je m'identifie à toutes et chacune des victimes.
Je vois ces journalistes courageux écrivant les textes de magistrales caricatures satiriques qui rappellent l'époque du Mexicain José Guadalupe Posadas, qui a été un critique pointu du dictateur Porfirio Díaz. Naturellement, je peux aussi citer les frères Jesús et Ricardo Flores Magón, qui avec "Regeneración", tout d'abord, et ensuite avec le "El hijo de l'Ahuizote", ont réussi à contribuer d'une manière décisive, depuis le journalisme indépendant, au mouvement de la Révolution Mexicaine de 1910.
"Deuil pour le journalisme mondial"
Charb, Cabu, Tignous, Wolinski, Maris et beaucoup d'autres, ne sont pas pour moi des inconnus. Au contraire, nous avons été très proches. Le dit hebdomadaire, icône du journalisme libertaire, avait reçu des menaces multiples, surtout de la part de ceux qui se sentaient plus qu'offensés par la forme dans laquelle on représentait les leaders religieux. Déjà un cocktail molotov avait éclaté au siège du journal en 2011, avec la vaine tentative d'étouffer ce journal d'information.
Si deux pays si éloignés semblent néanmoins si proches après avoir subi des scènes de tragédies qui ont endeuillées non seulement 12 familles en France, mais aussi le journalisme mondial.
Combien de meurtres de journalistes ont été commis au Mexique ? Beaucoup, beaucoup trop, malheureusement; de l'année 2000 jusqu'à avril 2014, on en compte 102 et ceux qui sont venus ensuite. Combien de ces crimes sont restés impunis ? Autour de 99,9 pour cent. Ainsi que le personnage illustre du Mexique Belisario Domínguez, il y a eu beaucoup de Mexicains, Français, Italiens, Allemands et d'autres nationalités, qui n'ont pas accepté d'être bâillonnées et qui continuent de raconter leur vérité en le faisant d'une manière professionnelle.
Au Guerrero, Tamaulipas, Chihuahua, Veracruz et d'autres régions mexicaines, les journalistes ont reconnu qu'ils ne publient déjà plus de nouvelles sur la violence; car on sait dans tout le pays qu'il existe des attaques contre les médias et des assassinats des journalistes. Ces derniers cessent d'informer dans la presse écrite, la radio, la télévision ou même sur Internet et les réseaux sociaux, par peur de kidnapping, du "levantón" (l'enlèvement), de la torture et de la mort. Les hommes et les femmes qui ont choisi le journalisme n'ont jamais eu la protection nécessaire pour accomplir une profession si noble. La Procuraduría General de la República a certes créé une commission spéciale pour l'attention des délits contre la liberté d'expression mais son action est nulle.
Aujourd'hui, la France pleure ses morts et sa population sort dans les rues pour demander justice et, bien sûr, pour exiger que jamais plus un attentat de ce type ne recommence. Après des décennies de léthargie, les Français recommencent à se reprendre en main et à se solidariser contre la terreur. Il semblait que les temps du terrorisme et de la cruelle psychose collective que subit le pays, faisaient partie du passé.
Ces armes actionnées par les trois agresseurs de "Charlie Hebdo" sont les mêmes que l'on utilise pour faire taire les journalistes au Mexique. Cela ressemble à un rapprochement dans la douleur, un jumelage (« hermanamiento ») entre les deux pays. Aucune nation ne peut aller de l'avant sans un journalisme autonome, indépendant, visionnaire et critique, et pour cela, en France et au Mexique, on paye le prix fort.
Aussi, la meilleure manière d'honorer les collègues tombés au combat est de continuer depuis les tranchées du journalisme, en offrant au peuple l'information dont il a besoin, en utilisant notamment les formes les plus simples et compréhensibles pour que notre message passe bien. Il faut faire plus d'articles, de nouveaux reportages, de plus grandes recherches, des caricatures par milliers, et dire à ces journalistes français que leur sang ne s'est pas répandu en vain.
Juan Rodríguez Rodríguez
![]() ¡Ratatatata!, gritaba el AK-47, ?Cuerno de Chivo?; disparaba ráfagas contra los empleados del diario ?El Sur?, a sólo una calle de la avenida principal de Acapulco. Era el 11 de noviembre de 2010. Dentro del periódico había más de 20 personas, especialmente mujeres, encargadas de ultimar detalles de las notas que se publicarían al día siguiente. Alaridos, súplicas, oraciones y tres individuos que, vestidos de negro y con pasamontañas, cumplían órdenes; asustar al máximo a todos en ese medio de información y quemar las instalaciones. Ahí, en el Estado mexicano de Guerrero, las estadísticas -oficiales y secretas- resultaban aterradoras; cada día se registraban por lo menos 20 ejecuciones, que iban desde los decapitados, descuartizados, desollados y colgados en puentes urbanos. Nadie murió en esa noche de noviembre porque los tiros fueron al techo y paredes, dejaron ahí los tres depósitos de gasolina. ¿Y los cuerpos de seguridad? después de media hora, llegaron primero los policías locales, luego los federales y al último los soldados, sólo para tomar declaraciones, hacer sus reportes e irse. Jamás se detuvo a los culpables de ese atentado. Un mes después, yo tuve que dejar ?El Sol de Acapulco?, y salir rápidamente del puerto de Acapulco, agobiado por las amenazas recibidas por teléfono, correos electrónicos y de desconocidos que acostumbraban seguirme por las noches y madrugadas, en acciones que presagiaban un fatal desenlace. Sí, soy sobreviviente del horror y de la sinrazón. Ahora, cuando veo la tragedia del Semanario "Charlie Hebdo" en la misma capital de Francia, me identifico con todas y cada una de las víctimas. Veo a sus valientes periodistas escribiendo los textos de las magistrales caricaturas satíricas y recuerdo aquellos tiempos del mexicano José Guadalupe Posadas, quien fue agudo crítico del dictador Porfirio Díaz. Por supuesto, tengo presentes a los hermanos Jesús y Ricardo Flores Magón, quienes con ?Regeneración?, primero, y luego con ?El Hijo del Ahuizote?, lograron contribuir de manera decisiva desde el periodismo independiente, en favor del movimiento de la Revolución Mexicana de 1910. Charb, Cabu, Tignous, Wolinski, Maris y muchos otros, no me son desconocidos; al contrario, fuimos muy cercanos. Dicho Semanario, ícono del periodismo libertario, había recibido múltiples amenazas, sobre todo por parte de aquellos que se sentían más que ofendidos por la forma en que se representaba a los líderes religiosos. Ya habían estallado en la sede del periódico las bombas molotov en el 2011, en el vano intento por silenciar a este medio de información. Sí, dos países tan distintos y, sin embargo, tan parecidos al ser escenarios de tragedias como las que ahora enluta no sólo a 12 familias de Francia, sino al periodismo mundial. ¿Cuántos asesinatos de periodistas se han cometido en México? Muchos, por desgracia; 102 del año 2000 a abril del 2014, y los que se han acumulado después. ¿Cuántos han quedado impunes? Alrededor del 99.9 por ciento. Así como el prócer de México Belisario Domínguez, han existido muchos- mexicanos, franceses, italianos, alemanes y de otras nacionalidades- que no han aceptado ser amordazados y que insisten en contar su verdad y hacerlo de manera profesional. En Guerrero, Tamaulipas, Chihuahua, Veracruz y otras entidades mexicanas, los periodistas han dado a conocer que ya no publican noticias sobre la violencia; y en todo el país, se sabe de los ataques a medios de comunicación y asesinatos a periodistas. Dejan de informar en la prensa escrita, radio, televisión, internet y las redes sociales, por miedo al secuestro, al "levantón", a la tortura y a la muerte. Hombres y mujeres, que optaron por el periodismo, pero que jamás tuvieron la protección necesaria para desempeñar tan noble profesión. Ahí en la Procuraduría General de la República de México, prevalece la Fiscalía Especial para la Atención de Delitos contra la Libertad de Expresión y su actuar es nulo. Hoy, Francia llora a sus muertos y su población sale a las calles a demandar justicia y, claro, a exigir que nunca más suceda un atentado de este tipo. Nuevamente, tras décadas de letargo, los franceses vuelven a tomarse de la mano y a solidarizarse contra el terror. Parecía que los tiempos del terrorismo y la cruel psicosis colectiva que conlleva, habían quedado atrás. Esas armas que accionaron los tres agresores de ?Charlie Hebdo?, son las mismas que se utilizan para acallar a los periodistas en México. Hay, por tanto, un hermanamiento de lo que sucede en uno y otro país. Ninguna nación puede salir adelante sin un periodismo autónomo, independiente, visionario y crítico, y por ello, tanto en Francia como en México, se ha pagado un precio muy alto. Por esto, la mejor manera de honrar a los colegas caídos, es continuar desde las trincheras del periodismo, brindando al pueblo la información que requiere, y especialmente, usar las formas más sencillas y entendibles para que nuestro mensaje llegue. Hay que hacer más notas, nuevos reportajes, mayores investigaciones, caricaturas por miles, y decir a estos periodistas franceses, que su sangre no se ha derramado en vano. Juan Rodríguez Rodríguez |
Juan Rodríguez Rodríguez pour (Lepetitjournal.com/mexico) Samedi 10 janvier 2015









