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RAÚL PAZ – Rencontre avec le plus français des artistes cubains

Écrit par Lepetitjournal Mexico
Publié le 1 avril 2011, mis à jour le 14 novembre 2012

Le Mexique est le premier pays d'une tournée latino américaine (Venezuela, Colombie, Brésil, Argentine et Uruguay) qu'entreprend le plus français des artistes cubains, le chanteur Raúl Paz, pour présenter son nouvel album "Havanization", un disque qui témoigne de la volonté de la société cubaine de se connecter au reste du monde. Entretien avec lepetitjournal.com et Top France

Nous avons rencontré en provenance de Cuba où il réside depuis quelques années après la décision des autorités de permettre le retour des exilés, un Raul Paz à la bonne humeur contagieuse et qui se produit ce soir à Mexico dans la salle VOILA et demain 2 avril au Festival culturel de Tequila.

Raúl Paz au micro de Top France la Web Radio

Lepetitjournal.com: Comment est né l'album Havanization?
L'album Havanization est un album très important pour moi car je l'ai commencé à Cuba alors que j'y suis retourné pour la première fois après 17 ans d'absence. C'est un album qui s'est pensé, créé, à La Havane, avec une sonorité beaucoup plus actuelle qu'on pourrait légitimement attendre des sonorités cubaines classiques. Et surtout parce que j'ai rencontré un groupe de gens à Cuba qui était un peu dans le même cas que moi, des gens de la Cuba contemporaine, de l'après Fidel Castro pour être plus clair, des gens qui étaient partis et avaient obtenu l'autorisation de revenir et qui revenaient vraiment. C'est mon cas et celui de pas mal d'artistes. On a donc appelé cela la havanization. On revient tous à la Havane. Cela correspond à un mouvement culturel et musical très intéressant et j'ai été un peu inspiré par ce mouvement, naturel on peut dire, et qui est devenu  très populaire à Cuba en ce moment. L'album est ainsi né de la volonté de parler de cette nouvelle Cuba. C'est compliqué toujours, mais passionnant car je mêle mes influences, ma musique et la musique cubaine actuelle.

Cela fait justement quelques années que vous êtes  installé à Cuba. Comment avez-vous retrouvé l'île et la scène musicale?
L'île était toujours au même endroit. Ça rassure ! (rires). J'ai retrouvé une Cuba pas tellement différente de l'île que j'avais quittée 17 ans auparavant. C'est une des particularités de l'île, elle ne bouge pas beaucoup. Mais je continue encore depuis 2 ans de me retrouver dans ce Cuba qui était à moi et après, qui ne l'était plus et que maintenant je récupère d'une certaine façon et qui me récupère. On cherche mutuellement à se rencontrer. J'y ai trouvé une scène artistique qui n'est pas la scène officielle, qui est la scène qu'il faut aller chercher et qui m'intéresse énormément parce que je trouve que pour la première fois depuis très longtemps, il y a une nouvelle façon de dire, il y a une envie en tout cas de dire les choses autrement pour parler de la réalité en oubliant les clichés de la Cuba éternelle, celle qui est restée dans la mémoire collective, la Cuba des années 50. Les musiciens et les artistes cubains, malgré leurs talent, toutes générations confondues, étaient centrés sur la même idée de base: on fait ce qu'on a fait avant. Politiquement, économiquement, musicalement, artistiquement, c'est toujours comme ça depuis 50 ans. Il y a un modèle et on le suit.
Pour la première fois à Cuba ce modèle commence à s'effacer et naît l'idée de vouloir raconter quelque chose. Je crois que cela va beaucoup influencer l'avenir de la musique et de l'art en général à Cuba. 

Vous avez fait plusieurs concerts à Cuba. Comment s'est déroulé le retour de l'exilé face au public cubain?
C'était quelque chose qui me préoccupait beaucoup en raison de ma longue absence. Paradoxalement, j'étais devenu le Cubain en France mais en même temps je n'avais pas accès à Cuba. Malgré toutes ces contradictions j'ai construit une carrière, je l'ai faite à ma façon avec ce que je pouvais prendre de Cuba et avec ce que je prenais des pays où j'ai habité.
J'avais donc très peur de la réaction du public cubain. Est ce que j'étais encore cubain? Cela a été important de retrouver un public qui était là comme si je n'étais jamais parti. On se comprenait. Malgré tout, les gens restent dans l'actualité, ils vivent dans le même monde que nous et ils ont les mêmes goûts. Ils ont envie d'aller de l'avant. Mon "évolution" musicale a été bien perçue, parfois mieux que dans certains pays où Cuba continue d'être le cliché des années 50. Un cliché que je ne trouve pas à Cuba. Les Cubains veulent une île contemporaine, être des citoyens du monde. Les nouvelles générations ont envie d'exister dans le monde.
D'où ce nom de Havanization, qui pour nous veut dire ouvrir des portes, construire des ponts entre nous et les autres, accepter le reste du monde. Cela signifie aussi que le reste du monde nous accepte comme on est aujourd'hui. Le mot est une création. On joue avec pour montrer qu'on est prêts au dialogue, à partager des  idées, des émotions mais dans le respect de chacun, dans le respect de l'art et la musique d'aujourd'hui. Tout cela participe d'un mouvement dont l'idée de base est de rompre avec le passé, pas d'une façon absolue avec notre héritage mais d'une façon concrète.

Nouvel album de Raúl Paz, Havanization

Parlez-nous de la rencontre avec la chanteuse Camille qui interprète avec vous la chanson Carnaval?
Camille m'avait demandé de lui écrire une chanson qui lui ressemble. Elle est un peu?différente (rires) et nous étions tous dans une espèce de gros carnaval de la vie au moment ou je l'ai écrite.
C'est une chanson qui a beaucoup de mots. Camille n'avait jamais chanté en espagnol et elle appréhendait un peu. Mais cette fille a tellement de talent que 2 prises ont suffi.
Pareil pour le clip (voir ici), qui est un plan séquence et en trois prises et sans coupure. C'était une vraie chorégraphie. Je suis très satisfait.

Vous avez chanté en français le titre "Le temps passe". Est ce que vous pensez de nouveau chanter en français?
J'ai trop peur de chanter en français parce que c'est une langue compliquée à chanter, plus compliquée que l'espagnol. Les sonorités sont différentes. Le français est aussi une langue très précise dans l'écriture. Mon prochain disque aura peut-être davantage de titres en français. Je le souhaite. Mais il faut que je me retrouve dedans. Je ne veux pas fausser l'histoire et chanter en français parce que je dois chanter en français. Je dois me sentir bien. Petit à petit, je dois trouver mes repères mes couleurs. Avec Le temps passe ça s'est très bien déroulé, donc je pense aller plus loin.

C'est votre première présentation au Mexique. Comment vous sentez vous?
D'abord je vais tout chanter en français (rires). En fait, je suis très content d'être au Mexique. J'ai développé ma carrière en Europe, en France notamment. J'ai un peu négligé le public latino et ca me fait énormément plaisir de commencer cette tournée latino américaine par le Mexique. C'est un pays phare de la musique latine et des arts en général. Cela faisait longtemps que je voulais aller au Mexique. En plus, il s'agit d'une collaboration entre Français et Latinos, mes deux moitiés. Ça ne peut que se passer très bien.

Entretien réalisé par Antoine Saint-Michel (www.lepetitjournal.com/mexico) vendredi 1 avril 2011

Pour écouter l'interview d Raúl Paz en espagnol, c'est sur Top France

lepetitjournal.com Mexico
Publié le 1 avril 2011, mis à jour le 14 novembre 2012

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