Édition internationale

LA FRANCESITA – La vie nocturne dans la ville monstruo

Écrit par Lepetitjournal Mexico
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 11 mai 2015

Cela ressemble à quoi Mexico dans les yeux d'une étudiante française ? Parisienne ayant vécu en Allemagne, la francesita nous partage ses pérégrinations mexicaines. Aujourd'hui, place au grand chelem dans le centre historique.

"Alors ? C'est bien la fête mexicaine ?"
"Tu as chanté des trucs en « corazón » ?"
"Tu t'es achetée un sombrero ?"

Non. Pas encore, le sombrero des bandes-dessinées.

En revanche, des fêtes à la mexicaine, j'ai déjà pu en voir quelques-unes. Il y a les soirées d'étudiants, très similaires à celles que j'ai pu faire à Berlin ou à Paris. On commence dans un salon, on boit des cervezas, on discute de la vie du voisin, de la prochaine expédition possible, des dérives politiques du pays x, y ou z, de tout et de rien. Ça continue jusqu'à pas d'heure, sur place ou dans un bar.

Il y a les fêtes d'enfants "de la haute", aussi. Ce genre-là, je n'y ai pas encore assisté. Mais on me décrit des décors invraisemblables, des maisons immenses ("ils ont réussi à caser 200 personnes sous la véranda, aussi simple que ça"), le service fait en livrée. Débauche de luxe et de petits fours. Ça se trouve aussi, en France. Mais ça me paraît tellement plus lointain.

Et puis il y a les meilleures, les soirées qui ne commencent comme rien pour finir en épopée. C'est ce genre d'activité qui m'a permis de visiter la quasi intégralité du centro histórico en une nuit, avec ma colocataire la chiquita. Et de rencontrer à peu près tous les types d'oiseaux nocturnes du D.F.

On commence au Bosforo. Musique sympa, carte de mezcal longue comme le bras, il y a aussi de quoi se restaurer, bien que je vois mal où se placer pour déguster son plat. L'espace en haut à l'air cosy, mais la salle principale est tellement bondée qu'il faut se battre pour arriver à l'escalier. On n'est pas très loin du métro à l'heure de pointe. Métro parisien j'entends : j'arrive à respirer. Autour de nous, on croise des Mexicains qui sortent du boulot, d'autres qui doivent débarquer de l'UNAM, quelques hipsters, quelques étrangers, américains ou européens. On tombe sur un groupe, un Mexicain, un Espagnol et un Français, et sympathisons. Tournée de mezcal.

Dehors, el señor español parle politique en grillant sa clope. Il fonde beaucoup d'espoir sur la prise de pouvoir de Syriza, en Grèce, qu'il met en parallèle avec Podemos. Je ne sais pas si, à eux deux, ils pourront faire bouger grand-chose. Il se vexe devant mon hésitation. C'était avant que Syriza n'accepte les conditions de la Troïka. On reste tout de même bons copains, et emboîtons le pas au chilango et la chiquita, pas décidés à finir la nuit tout de suite.
(Illustration Oscar G. Hernández)

Nous voici au Marrakech. LE club gay du centro. Représentant de la culture gay dans la déco et la musique, très certainement. Dans sa population, c'est bien plus compliqué que cela. J'aperçois une fille qui ne trancherait pas sur les bancs de la Sorbonne, tout là-bas sur la scène. Il y a pas mal de couples homos, des lesbiennes aussi : l'une d'entre elle a jeté son dévolu sur ma coloc, au grand dam de cette dernière. Et puis il y a quelques types foncièrement louches. On les évite en s'enfonçant dans la foule. Surtout, beaucoup de bandes de copains venues commander des seaux de 10 coronas pour se les partager sur les derniers tubes latinos.

La musique n'est pas vraiment à mon goût. Pas du tout, même. Ce doit être un truc européen : je retrouve l'español sur le trottoir, face au club. On discute en grillant des cigarettes, histoire de noircir un peu plus nos poumons endoloris par les gaz d'échappement. Bientôt rejoints par le Français puis les deux derniers, on file dans une salle de l'eje central. Cette fois, c'est fiesta tradi : chips pimentées, nouvelles coronas, nous voici à danser sur la piste vide. La salle est immense, le nombre de tables tout autant, il doit être deux ou trois heures du matin. La plupart d'entre elles sont vides. Fausse impression que provoquent les lumières tamisées : lorsque surviennent les morceaux les plus connus, la piste est envahie de danseurs qui suivent tous la même chorégraphie. Je suis fascinée par le spectacle.

Au bout d'une ou deux heures de baile, il y en a assez. Sans trop savoir comment, nous revoilà dans la rue, à manger les tacos les plus épicés que j'ai pu goûter jusqu'ici. La chiquita et moi en pleurerions presque. Mais c'est bon ! Et nous voilà prêts à repartir jusqu'à la place Garibaldi. On passe devant Santo Domingo : "Francesita, francesita ! Si tu veux des faux papiers, c'est ici !" me dit- on dans un chuchotement qui part en fou rire. "Nouveaux diplômes, ta carte d'identité mexicaine? Tu peux tout faire !"

La nuit se termine place Garibaldi, au milieu des mariachis, dans le bar le plus typiquement-kitsch-mexicain que cette planète puisse porter (quoique?). Il s'agit peut-être de Tenampa, ou de Guadalajara de noce, je ne sais plus. Le guacamole y est à tomber par terre. Et puis, avouons-le, la chanteuse est plutôt douée.

Nous sommes partis peu avant le jour.

La Francesita (Lepetitjournal.com/mexico) Lundi 11 mai 2015

lepetitjournal.com Mexico
Publié le 12 mai 2015, mis à jour le 11 mai 2015
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