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Regard d'une maman australienne francophile sur l'école

maman francophile Tamaramaman francophile Tamara
Écrit par Rim Bohle
Publié le 27 janvier 2020, mis à jour le 2 décembre 2020

L'histoire d'amour entre Tamara et la France date de son adolescence. Elle a choisi de parler en français à ses enfants dès les premières minutes de leur vie, afin de leur offrir l'ouverture d'esprit des personnes bi-culturelles. Après les avoir scolarisé neuf ans dans une école francaise, Tamara a une analyse fine des avantages et inconvenients des systèmes éducatifs australiens et francais. Un respect du bien-être de l'enfant d'un côté, une ouverture sur la culture sans égale de l'autre, elle partage avec nous ses réflexions de maman francophile.

Une histoire d'amour avec la France depuis l'adolescence

"Je suis francophile de longue date. J’ai découvert la France à l’âge de 16 ans en séjournant dans une famille d’accueil. C’est à cette époque qu’une grande histoire d’amour avec la France a démarré pour moi, avec son Histoire, sa littérature. J’ai fait neuf ans d’études post-bac en langue française. J’ai une fille de 13 ans et un fils de 11 ans. Elle est née en Australie mais à l’époque je vivais en Afrique de l’Ouest. J’ai décidé de lui parler en français dès la naissance bien que cela ne soit pas ma langue maternelle. J’estimais que j’avais une maitrise suffisante. Je voulais surtout qu’ils soient confrontés à l’ouverture d’esprit des personnes bilingues et donc biculturelles. Je trouve très dommage que les Anglo-saxons s’enferment dans leur monde et s’en contentent."

'Culturellement, mes enfants se sentent plus francais'

"La vie a fait que nous nous sommes pas mal baladés et nous avons passé plus de huit ans en Nouvelle-Calédonie. Finalement, mes enfants ont fait leur scolarité dans le système français jusqu’à notre retour à Melbourne fin 2017. Le choc culturel par rapport au système éducatif a été le plus grand choc culturel que j’ai vécu dans mon histoire avec la langue et la culture française. J’ai toujours fait partie des APE (Associations de Parents d’Elèves) pour tenter de comprendre. J’ai donc participé à des discussions qui m’ont fait halluciner. Nous avons eu plus de débats autour de la cantine qu’autre chose. Nous avons demandé la nationalité française. J’ai entrepris cette démarche car je souhaitais donner aux enfants la possibilité de revenir en France lorsqu’ils le souhaiteraient. En arrivant en Australie, ils ont compris qu’ils étaient Français. Culturellement, ils se sentent plus Français qu’Australiens, surtout la plus grande."

'Apprendre par coeur' : une obsession à la française

"J’ai choisi de faire mes études de littérature française en Australie. Mon année  de Master en France m’a traumatisé. L’idée qu’à 21 ans on me dise qu’il fallait que j’apprenne sans condition tout ce que me disaient les professeurs tout en étant capable de le ressortir mots à mots lors d’examens, cela me choquait. Quelque chose que je n’ai jamais compris c’est la mémorisation de la poésie.

Si votre fille n’est pas capable de mémoriser une poésie en CM1, elle ne sera pas capable de mémoriser ses cours après. Clash culturel

J’ai un enfant qui le fait sans difficulté. Il regarde un poème et le connaît en quelques secondes. Mon ainée, qui est extrêmement studieuse, performante à l’école, n’arrive pas à apprendre par coeur. J’ai demandé à sa maitresse de CM1 l’objectif pédagogique de cet exercice. Ma fille est capable de comprendre une poésie et d’expliquer son contenu. Quelle est la valeur ajoutée de l’apprendre par coeur? La maitresse a répondu que c’était la fondation de système éducatif français. Si votre fille n’est pas capable de mémoriser une poésie en CM1, elle ne sera pas capable de mémoriser ses cours après. Clash culturel."

De grosses lacunes dans le système scolaire australien

"A l’inverse, le système australien a de grosses lacunes. Nous n’insistons plus du tout sur l’acquisition des bases et des fondamentaux. Je suis très contente que mes enfants aient pu expérimenter le système français en primaire pour acquérir une connaissance de base de la grammaire, quelque chose de complètement absent du système australien. Les maths en France sont abordés de façon beaucoup plus structurée. Il y a aussi une certaine discipline au niveau de la tenue des classes. Ma fille ne supporte pas ici que les professeurs ne maitrisent pas du tout leur classe. Il n'y a aucune discipline et aucune conséquence pour le non-respect des règles."

'Jamais trop jeunes pour aborder la culture en France'

"J’apprécie dans le système français le fait que l’on ne pense pas que les enfants soient trop jeunes pour aborder la culture. J’ai trouvé génial que mes enfants soient allés dans des musés lors de sorties scolaires. Ils ont étudié les grands peintres et les écrivains classiques dès la primaire.

 

L’éducation civique en France est aussi formidable : comprendre les principes fondamentaux gouvernant notre société, l’égalité des chances, la liberté de penser, la liberté d’association, de croyance, la participation démocratique.

 

L’éducation civique en France est aussi formidable : comprendre les principes fondamentaux gouvernant notre société, l’égalité des chances, la liberté de penser, la liberté d’association, de croyance, la participation démocratique. Encore aujourd’hui, mes enfants ne sont pas capables d’identifier les structures politiques en  Australie. Par contre ils peuvent tous les deux vous expliquer la séparation de l’Eglise et de l’Etat, les valeurs de la république, le devoir de citoyen. Ils chantent très fièrement la Marseillaise."

L'autorité parentale  :  au coeur des  différences franco-australiennes

"Mes amis français pensent que je suis extrêmement laxiste. Je n’impose aucun cadre à mes enfants. Mes amis Australiens pensent que je suis trop sévère et stricte avec mes enfants. Les australiens n’ont aucun concept de l’autorité parentale. Nous ne sommes pas dans la répression ou l’interdiction. On est dans l’éducation. L’idée de dire non à enfant sans explication cela nous semble désuète, quelque chose que nos grands-parents auraient fait.

 

Mes amis français pensent que je suis extrêmement laxiste. Je n’impose aucun cadre à mes enfants. Mes amis australiens pensent que je suis trop sévère et stricte avec mes enfants.

 

Nous avons par contre perdu un sens du devoir et un sens de la vie en communauté. L’enfant a une relation avec son entourage. Si son comportement est perturbateur, il empêche les autres de profiter de leur journée au parc ou au restaurant. Parfois il faut mettre des limites."

 

Culture australienne ou la poursuite du bonheur absolu

"Dans la culture australienne, nous sommes un peu obsédés avec l’idée que nos enfants doivent être heureux, tout le temps. Mon petit cheri n’est pas heureux à l’école. Il y a cette idée que l’école doit s’adapter à mon enfant. La réalité est que cela est impossible, ne pouvant créer que des déceptions à l’âge adulte.

 

Dans la culture australienne, nous sommes un peu obsédés avec l’idée que nos enfants doivent être heureux, tout le temps.

Je trouve maintenant que le cadre français est trop normatif. Pas beaucoup de place pour ceux qui ne rentrent pas dans le cadre. J’ai un enfant qui ne rentre pas facilement dans le cadre. Il est hyper actif. En Nouvelle Calédonie, on m’a dit que j’étais une mauvaise mère et que je ne savais pas poser les conditions nécessaires à sa réussite. Ici j’ai trouvé beaucoup plus d’empathie."

Australie : les bons élèves peu mis en valeur socialement

"Ma fille au contraire a des difficultés à s’adapter à l’école. Contrairement à ce qui se passait dans le système français, ce ne sont pas élèves brillants qui sont populaires. Ils sont exclus socialement et sont victimes de harcèlement. Les sportifs sont plus mis en avant. Il ne faut pas faire attention à ses études, à son avenir. Elle a trouvé ce changement à l’âge de 12 ans vraiment très difficile."

 

Le système australien prend en compte la maturité de l'enfant

"Par contre, le système australien prend en compte la maturité de l’enfant et son bien-être. Sauter une classe ici est une hérésie. Les enseignants vont proposer des extensions au programme pour les enfants qui avancent plus vite plutôt que de le faire monter d’une classe où ils se retrouveraient avec des enfants plus âgés à un autre stade de développement émotionnel.

 

Le système australien prend en compte la maturité de l’enfant et son bien-être. Sauter une classe ici est une hérésie.

 

Le système australien offre la possibilité d’adapter le cursus à l’enfant. L’envers du decor est que ce manque de programme crée de grandes disparités entre établissements et la culture générale passe à la trappe."

Rim Bohle
Publié le 27 janvier 2020, mis à jour le 2 décembre 2020

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