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ARPAD SZENES ET VIEIRA DA SILVA - Une histoire d’art et d’amour

Écrit par Lepetitjournal Lisbonne
Publié le 13 avril 2014, mis à jour le 14 avril 2014

Arpad Szenes  est né à Budapest, en  Hongrie, en 1897 et Maria Helena Vieira da Silva est née à Lisbonne, en 1908. Ils se rencontrèrent à Paris en 1929, où tous deux fréquentaient les classes de l'Académie de la Grande Chaumière,  ouverte aux nouveaux langages  artistiques que recherchaient les jeunes artistes.   Arpad avouera avoir été immédiatement captivé par le regard de la jeune femme, qu'il aurait aussitôt  voulu serrer dans ses bras.

De ces premiers moments de l'histoire de toute une vie Maria Helena dira : "Je trouvais qu'il dessinait merveilleusement, et puis un jour il m'a  parlé. Il m'a fait des critiques très sévères de mes dessins et cela m'a fait faire un progrès : après j'ai dessiné beaucoup mieux. Puis il a disparu" 1. Lorsqu'il est revenu, après une absence d'un peu plus d'un an dans son pays natal, Arpad et Maria Helena se sont mariés.

Un parcours à deux
Ils cheminèrent ensemble pendant 55 ans, jusqu'au décès d'Arpad en 1985. Ils vécurent à Paris et, pendant la  guerre, de 1940 à 1947, au Brésil, fuyant la menace que constituait l'ascendance juive d'Arpad et leur statut d'apatride dû aux aberrations de la bureaucratie.  Au cours de cette longue vie commune, le couple fut rarement séparé et toujours pour de relativement courtes périodes. Bien qu'épisodique, cet éloignement physique est à l'origine d'un échange épistolier que la Fondation Arpad Szenes-Vieira da Silva révèle aujourd'hui par l'exposition Escrita íntima et le  livre qui l'accompagne. Sur les  parois des 4 salles qui composent la galerie d'expositions temporaires de la Fondation sont affichées quelques lettres de lui à elle, d'elle à lui, entourées de photos, de documents, d'?uvres réalisées à la même époque par elle et lui, par lui et elle.

Maria Helena Vieira da Silva et Arpad Szenes, Atelier Boulevard Saint Jacques, Paris,  1949 (Photo : Denise Colomb)

Vieira da Silva, Portrait d'Arpad, c. 1932-1939 - Copyright: FASVS

Un couple indissoluble et complémentaire


Car Vieira  et Arpad, même dans la distance, sont inséparables. Lui toujours soucieux d'elle, de sa santé, de son bien-être, de son travail ; elle  qui lui dit en permanence ce qu'elle voit, ce qu'elle ressent, là où l'emmènent ses pensées.  Tous deux sont constamment à la recherche de l'autre, et chacun se retrouve en l'autre, en une communion où l'un devient l'autre tout en restant soi.  
Arpad et Maria Helena formèrent un couple indissoluble, complémentaire au point de  confondre les genres : il l'appelle Bicho qui est masculin et elle Bichinha, qui est féminin ; nous nous référons à Arpad par son prénom, comme on le ferait  plutôt d'une femme,  et à Vieira par son patronyme, comme on en use généralement pour les hommes.  Mais outre l'alchimie qui leur était propre, ces deux artistes étaient  aussi unis par la peinture, en une dynamique que le journaliste et écrivain portugais António Mega Ferreira, lors du lancement du livre, n'a pas hésité  à qualifier de ménage à trois. Dans leur recherche individuelle, Arpad  poussait Maria Helena en avant qui, une fois l'étape franchie, le tirait vers elle. Entre ces deux-là jamais il n'y eut de rivalité ou de concurrence, mais un dialogue qui dura tout au long de leur vie et de leur ?uvre. Un dialogue que même la mort a été impuissante à interrompre, puisque le disparition d'Arpad vint ouvrir une nouvelle étape dans la peinture de Vieira dont les toiles s'imprégnèrent d'une lumière en quête de l'infini où elle devait retrouver son compagnon pour l'éternité.


Arpad Szenes, Marie-Hélène brodant, 1940 - Copyright: FASVS

"Escrita íntima"
Exposer une si intense intimité était un pari  très risqué : les lettres d'amour ne sont-elles pas insignifiantes, voire ridicules, pour tout autre que leur destinataire ?  Comment ne pas  faire des visiteurs une bande de voyeurs ? Comment  ouvrir les portes d'un sanctuaire en s'assurant qu'il ne sera pas profané ? L'équipe de la Fondation a su éviter ces  écueils  grâce à une extrême sensibilité, un profond respect, et une immense pudeur. Elle avait à sa disposition  une centaine de lettres, écrites  en français, la langue commune des artistes, mais où les mots tendres, drága (chéri), amorsinha, (petit amour) queridinha (petite chérie) puszi, beijinhos, (baisers), en hongrois et en portugais sont indifféremment utilisés par lui ou elle.  53 lettres ont été retenues pour le livre et, de celles-ci, quelques-unes peuvent être lues sur les lieux de l'exposition. Si cette sélection nous apprend ce que nous savions déjà -qu'Arpad et Maria Helena s'aimaient-  de cette intimité-là rien d'autre n'est dévoilé. En revanche, nous apprenons à les connaître, nous nous familiarisons avec les temps et les événements qu'ils ont traversés, nous nous interrogeons avec eux sur l'acte de créer et sur ce qu'il signifie pour qui le commet, nous percevons  la richesse et la noblesse des sentiments qui unissaient ce couple. Ainsi,  c'est en initiés et non pas en tant qu'intrus qu'on quittera Escrita íntima  et qu'on verra ensuite la collection de la Fondation où resplendissent l'art et l'amour d'Arpad Szenes et de Maria Helena Vieira da Silva. 

Arpad Szenes, Maria et Arpad, c. 1930 - Copyright: FASVS

In : Au fil du temps, percurso fotobiográfico de Maria Helena Vieira da Silva, p.30, FASVS, 2008.

Anae Legrand (www.lepetitjournal.com/lisbonne.html) Reprise du mardi 25 mars 2014
anae.legrand@gmail.com

Exposition "Escrita íntima" jusqu´au 19 avril
Du mardi au dimanche de 10h à 18h
Fundação Arpad Szenes Vieira da Silva, Praça das Amoreiras 56 - Lisbonne
www.fasvs.pt

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Publié le 13 avril 2014, mis à jour le 14 avril 2014

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