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SANTE - On a testé pour vous... les urgences à Kuala Lumpur !

Écrit par Lepetitjournal Kuala Lumpur
Publié le 21 juin 2012, mis à jour le 20 novembre 2012

Dans un pays où les aventures sont nombreuses, il peut arriver qu'une fâcheuse blessure vous conduise aux urgences malaisiennes. Est-ce vraiment comme en France? Combien faut-il payer? Quel est le temps d'attente pour la prise en charge?  Lepetitjournal.com rassure les plus inquiets.

 

Il est 8h quand le taxi me laisse aux urgences du Kuala Lumpur Hospital ce samedi matin. Impossible de marcher ! Mon pied a gonflé, rempli de douleur et de chaleur, après un choc dont je tairai la cause. Alors, c'est avec soulagement que je descends du véhicule en clopinant jusqu'à l'accueil. "Qu'est ce que vous avez ?" me demande t-on. "C'est mon pied. J'ai mal". "Vous avez votre passeport ? Bon, allez vous asseoir !". Lepetitjournal.com a testé pour vous (bien involontairement) le service des urgences.

 

Préambule

Il y a une cinquantaine de sièges dans la salle d'attente. Je vais rejoindre la première place disponible. Il faut dire que je commence à fatiguer, à force de sautiller sur la jambe gauche depuis un moment. Tous les sièges sont tournés vers quatre portes en bois numérotées à travers lesquelles les patients entrent puis sortent. Entre elles, un panneau estime le temps d'attente selon les cas. Etat critique : prise en charge immédiate. Etat semi-critique : 30 minutes. Et enfin 90 minutes pour les cas les moins urgents. A l'autre bout de la salle, une bonbonne d'eau et des gobelets accueillants attirent mon regard. Je suis assoiffé et pour de l'eau, fraîche ou pas, je suis prêt à sautiller encore un peu. Je m'approche, saisis un gobelet, presse le bouton? Bon, ce ne sera pas pour cette fois. La bonbonne est aussi sèche qu'une momie égyptienne. Alors, je me rassois. J'attends. Tout le monde attend.

 

Matricule

Au bout de 10 minutes, on m'appelle. "Je n'ai jamais vu une prise en charge aussi rapide !", me dis-je, en me dirigeant joyeux et boitillant vers une petite salle. On prend ma tension, on regarde rapidement mon pied. "C'est bon. Retournez vous asseoir !".

"Mr Marioxxxxx, Mr Marioxxxxx". Cela fait 45 minutes que je suis dans la pièce et  je connais désormais le rituel par coeur. Une dame derrière une vitre appelle les gens un par un. Il faut payer 50 ringgits pour la création du dossier, la consultation et les soins. Je fouille dans ma poche. Ticket de caisses, pièces, clefs. Je n'ai que? 7  ringgits. "Vous prenez la carte ?". "Non. Par contre, il y a un distributeur là-bas, plus loin, derrière la cafétéria". "Oui mais je ne peux pas marcher. Vous n'avez pas un fauteuil, une canne ?". "Non". C'est ainsi que je me retrouve à clopiner jusqu'à la cafétéria. Je réalise alors combien 50 mètres et quelques marches humides à franchir peuvent se transformer en véritable enfer, partagé entre douleur physique, chaleur ambiante et effort pénible. Au passage, je traverse la cafétéria pleine de gens indifférents qui m'observent m'agripper à tout ce qui me tombe sous la main: murs, tables, marches, rampes. "Ils ont peut être passé une mauvaise nuit au chevet d'un proche et veulent juste boire leur café en paix", me dis-je. Après tout, le spectacle d'un Européen boitillant n'est sûrement pas le plus désagréable ! Je retire mes sous, fait demi-tour et retourne dans la salle d'attente non sans avoir de nouveau offert mon spectacle d'équilibriste désarticulé dans la cafétéria. Je donne l'argent au comptoir. Je suis désormais le numéro 207.

 

Déambule

Je suis arrivé depuis déjà deux heures quand enfin, on m'appelle. Je suis heureux de quitter mon siège ? à côté de la bonbonne d'eau vide qui me nargue comme elle peut. J'ai vu défiler des patients très esquintés, observer des mains trouées, et des jambes rappées sur toute la longueur. Ces visions m'aident à patienter. Ainsi, mon pied gonflé me semble soudain un problème bénin et insignifiant. Il y a aussi une petit fille qui n'en finit pas de hurler et de vibrer. Quand un médecin s'approche, par magie, elle devient toute tranquille. Je boitille enfin jusqu'à la salle de consultation. "Votre pied est peut-être cassé... On va vous faire une radio !", m'explique la doctoresse. "Il faut que vous alliez au bout du couloir. Puis à droite. Et encore à droite". "Oui mais? mon pied?". "Ensuite, vous revenez ici". Alors, je sautille de nouveau et mes mains sont noires de crasse, à force de m'accrocher à tout ce qui veut bien me retenir. L'exercice est compliqué d'autant que je dois aussi tenir la tong de mon pied douloureux dans l'autre main? Radiographie. Tirage des images "Retournez voir le médecin". J'observe mon pied gonflé, mes mains noires, ma tong et l'immense pochette des radiographies. Ma jambe gauche n'en peut plus et me crie "Faisons une pause" quand une femme aux yeux gonflés de larmes me montre un fauteuil roulant vide. "Vous allez loin ? Je vous emmène ?". Je suis passé en perdition devant tant de gens indifférents ce matin que j'ai commencé à me faire à l'idée que le chacun pour soi était une norme et j'en suis presque venu à l'accepter. Alors, quand elle qui n'est ni médecin ni infirmière me propose son aide, je trouve cela tout simplement gentil.

 

Epilogue

Je tends les radiographies. "Attendez, je vais allez les regarder". Je me retrouve seul dans la pièce avec cette soif démesurée qui m'envahit. Devant moi, deux immenses bouteilles d'eau posées sur le bureau. Je regarde aux alentours et l'idée d'en vider une me traverse l'esprit quand le médecin revient : "Il semble que le 4e métatarse soit brisé. Vous devez aller au service POP immobilisation. C'est juste après l'endroit où vous avez fait la radio". "Juste après ?". "Ensuite, vous reviendrez chercher votre attestation d'arrêt de travail". La gentille dame au fauteuil a disparu. Je mets 10 minutes pour rejoindre la salle. On en met 5 pour me faire un plâtre. "Vous avez des béquilles ?", ose-je demander. "Non, pas ici. Il faudrait aller à la pharmacie". Retour en clopinant vers la salle du médecin. J'obtiens mon arrêt de travail et me dirige jusqu'à la pharmacie de l'hôpital avec mon ordonnance. "Vous avez des béquilles ?". "Non, on n'en a plus ! Il faut aller dans une pharmacie privée". On me tend des médicaments. Je remercie et empoche le tout avant de sortir de l'hôpital boitillant sur la jambe gauche, mon plâtre tout neuf sur le pied droit, ma tong à la main. "Il y a des taxis qui passent pas ici ?", demande-je à l'accueil. "Non, il faut remonter la côte, la bas, plus loin, en haut". "Mon pied est cassé. J'ai un plâtre. Je peux pas aller jusque là-bas". "C'est sûr", me répond-on amusé. Alors, je souris à mon tour parce que cette situation est tout de même étrange.

J'attends quand - ô miracle -  un taxi arrive dans l'enceinte de l'hôpital et m'emmène à la première pharmacie. "Qu'est ce que vous désirez ?" "Marcher", répondis-je en rigolant car je sais que la danse solitaire de ma jambe gauche touche à sa fin. Quelques instants plus tard, me voilà avec deux sacrés béquilles, très jolies, qui remontent jusque sous les bras.

Un doute demeure : est-ce que je reviens bien des urgences ou d'un parcours du combattant ?

 

 

Pour en savoir plus sur le système de santé malaisien :

La Malaisie ne possède pas un système de sécurité sociale comme en France. Les salariés malaisiens disposent généralement d'une assurance santé privée payée par l'employeur ou d'une assurance maladie personnelle. La France et la Malaisie n'ont d'ailleurs pas de convention de sécurité sociale.

La sécurité sociale malaisienne, la SOSCO (Social Security Organisation), impose que toutes les entreprises assurent leurs employés si leur salaire n'excède pas 3000 ringgits. La contribution des employeurs aux assurances des accidents du travail et à la pension d'invalidité représentent respectivement 1,25% et 0,5% du salaire. L'employé contribue aussi à sa pension d'invalidité à hauteur de 0,5% de son salaire. Seuls sont concernés par ces règles, les salariés de nationalité malaisienne ou ceux qui ont un statut de résident permanent en Malaisie.

Si vous avez besoin de consulter, un simple appel au consulat vous permettra d'obtenir les coordonnées des médecins habituellement consultés par les Français. Vous aurez ainsi les coordonnées les plus actuelles, les plus justes et les plus précises.

 

Antoine Mariaux (www.lepetitjournal.com/kuala-lumpur.html) Jeudi 21 Juin 2012

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Publié le 21 juin 2012, mis à jour le 20 novembre 2012

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