Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--
  • 1
  • 0

DENGUE - Origines, symptômes, traitements et prévention, pour tout savoir sur la dengue

Écrit par Lepetitjournal Kuala Lumpur
Publié le 19 décembre 2013, mis à jour le 19 septembre 2023

 

Il y a peu nous publions un article sur la recrudescence des cas de dengue en Malaisie et plus généralement en Asie du Sud-Est où des pays comme le Laos ont vu leurs chiffres multipliés par dix en un an. A la fin du troisième trimestre, une hausse de plus de 35% des cas était constatée en Malaisie par rapport à la même période l'année précédente, portant le nombre de personnes contaminées à 21.453. Afin de mieux comprendre ce qu'est la dengue, d'en connaître les symptômes, les traitements, les différents types de virus et les mesures de prévention à appliquer, le Docteur Olivier Barles d'International SOS a consacré, pour Lepetitjournal.com, un article spécial sur la dengue. 

 

Qu'est-ce que la dengue?

La dengue est une infection virale transmise par certains moustiques et s'exprimant par un ensemble de symptômes (syndrome) qui évoquent la grippe. 

Les moustiques du genre ?Aedes? diffusent la dengue et sont ainsi les vecteurs de la maladie. Ils occupent les zones urbaines ou semi-urbaines et piquent durant la journée avec une prédilection pour le matin aux aurores, ou les fins d'après-midi (contrairement aux Anophèles responsables du paludisme qui eux, piquent la nuit).

Les symptômes surviennent généralement entre 4 à 10 jours après la piqûre contaminante (période d'incubation).

L'être humain infecté est le principal réservoir du virus, il permet sa prolifération et sert de source de contamination pour les moustiques qui n'en sont pas encore porteurs.

Les sujets infectés par le virus de la dengue peuvent transmettre l'infection (en général pendant 4 à 5 jours ?  quelquefois jusqu`à un maximum d'une douzaine de 12 jours) par l'intermédiaire des moustiques, après l'apparition des premiers symptômes.

En Asie du Sud-est, la dengue est transmise toute l'année avec un pic durant la mousson. 

Il y a quatre types de virus différents (appelés DEN-1, DEN-2? -3 et -4) qui sont proches d'un point de vue génétique, mais pas suffisamment pour qu'il existe ce que l'on appelle une immunisation croisée efficace : un patient ayant contracté la maladie pour un type de virus devient ?vacciné? pour les prochaines contaminations par ce même virus, mais pas s'il est contaminé par l'un des trois autres types de virus. Il souffrira à nouveau d'une dengue et le nombre de contaminations successives à des types de virus différents chez une même personne, se solderont finalement par l'apparition de  formes de la maladie de plus en plus graves.

En effet, la dengue peut évoluer vers des complications hémorragiques pouvant être mortelles et désignées ?dengue sévère?, une des grandes causes de maladie grave et de mortalité chez les enfants dans certains pays d'Asie et d'Amérique latine.

Depuis une cinquantaine d'années, l'incidence de la Dengue (l'évaluation statistique du risque pour une population donnée de développer cette maladie) a progressé de façon spectaculaire.

On estime ainsi que la moitié de la population mondiale est maintenant exposée à ce risque dans les régions tropicales et subtropicales, avec une prédilection pour les zones urbaines et semi-urbaines, se soldant par un demi-million de cas sévères et 10.000 décès chaque année. Il est prouvé que le nombre de cas augmente à mesure que la maladie se propage à de nouvelles zones mais qu'elle évolue également par des ?flambées explosives?. Un tel type de menace existe désormais en Europe et une transmission locale a été rapportée pour la première fois en France et en Croatie en 2010. Par ailleurs, des cas importés ont été détectés dans trois autres pays européens la même année et en 2012, une flambée sur l'archipel de Madère (Portugal) a été à l'origine de plus de 2000 cas de dengue. Enfin, des cas importés ont aussi été détectés dans 10 autres pays européens, en dehors du Portugal continental.

En Asie, Singapour a notifié une augmentation du nombre des cas depuis 2012  après ?une longue période de calme? et des flambées ont été signalées au Laos et en Inde cet été.

Ce dont il faut se rappeler, c'est qu'il n'y a pas de traitement spécifique pour l'instant mais que la détection précoce et l'accès à des soins médicaux adaptés permettent de ramener le taux de mortalité en dessous de 1%.

Donc, jusqu'à ce jour, La prévention et la maîtrise de la dengue sont uniquement basées sur des mesures efficaces de lutte antivectorielle, incluant la protection personnelle.

La recherche est cependant axée sur la synthèse d'un vaccin dont l'un des modèles est expérimenté en ce moment même en Malaisie. La difficulté est d'obtenir un vaccin efficace sur les quatre types de virus différents.

 

Un peu d'histoire?

L'origine du mot ?dengue? est controversée,  il pourrait venir du swahili ?denga?, mot décrivant l'existence de crampes douloureuses (Zanzibar, 19ème siècle), ce terme ayant pu ?passer? de l'Afrique de l'Est vers les Indes puis les Amériques.

Une origine espagnole est aussi évoquée via le mot ?denguero? (attitude affectée, ?raide?), qui aurait été utilisé par les colons espagnols pour désigner certains syndromes de type grippal, ces patients montrant une attitude ?de raideur affectée? du fait des multiples douleurs musculaires et articulaires réduisant leurs mouvements.

Le mot ?dengue? a finalement été officialisé à la fin du 19ème siècle une fois la maladie décrite et individualisée.

Il est intéressant de constater que les premières traces d'une affection similaire apparaissent en Chine dans un recueil de ?symptômes et remèdes? rédigé sous la dynastie des Jin entre le 3ème et le 5ème siècle.

Il faut toutefois attendre le 18ème siècle pour que les premières épidémies de ?dengue-probable? (dengue-like en anglais) soient documentées en Asie, principalement en Inde et en Indonésie, puis en Afrique et au Moyen-Orient (Egypte, Iran, péninsule arabe).

En Amérique, des syndromes semblables sont aussi décrits dans la région de Philadelphie (que l'on comprendra plus tard en mettant en évidence la probable introduction du moustique vecteur par la traite des esclaves), mais il faut attendre la première décennie du 20ème siècle pour confirmer l'identification et le rôle des moustiques du genre ?Aedes? dans la transmission de la maladie

Entre 1943 et 1956, on identifie les quatre virus responsables de la dengue et en 1954 à Manille et en 1956 à Bangkok, on décrit les premières épidémies de dengue hémorragique (ancienne dénomination de la dengue sévère)? Depuis lors, on ne cesse de surveiller les cas de dengue et d'en chercher les remèdes.

 

Quels sont les symptômes de la dengue? 

Les symptômes surviennent généralement entre 4 à 7 jours après la piqûre (quelquefois jusqu'à 10 jours) et durent entre 5 et 7 jours après leur apparition. Ces symptômes sont sensiblement différents pour chacun d'entre nous. Ils comprennent :

  • Fièvre
  • Maux de tête
  • Douleur derrière les yeux (?rétro-orbitaire?)
  • Douleurs musculaires et articulaires
  • Sensation de fatigue ou de fatigue extrême, plusieurs jours durant voire quelquefois pendant plusieurs semaines
  • Rougeurs sur la peau, aplaties ou en léger relief, pouvant démanger? Ce type de signe est souvent plus commun chez les personnes n'ayant jamais été infectées par un virus de la dengue au préalable
  • Problèmes d'estomac tels nausées, vomissements ou diarrhées. 
  • Les enfants et les sujets jeunes ont souvent des symptômes initiaux moins marqués.
  • Les sujets qui ont déjà souffert d'une dengue dans le passé et qui sont de nouveau infectés avec un type de virus différent ont des risques plus grands de développer une dengue sévère.

Une personne dont la dengue est en train d'évoluer vers une dengue sévère peut : 

  • Souffrir d'important maux de ventre
  • Voir survenir l'apparition d'hématomes spontanés sans notion de choc préalable ou de petites taches cutanées de couleur violette
  • Vomir du sang
  • Saigner du nez
  • Avoir des selles noirâtres (signalant la présence de sang dans les selles)
  • Souffrir de convulsions

  

Faut-il voir un médecin devant ce type de syndrome?

Absolument. Vivant dans un pays où la dengue est une affection commune, l'apparition des symptômes précités doivent faire consulter, plus particulièrement après 3 jours de fièvre dans les endroits subissant la mousson.

 

Y-a-t-il un test pour diagnostiquer la dengue? 

La réponse est oui. Un médecin saura déjà suspecter la dengue selon les symptômes présentés et verra le diagnostic confirmé par la prescription d'examens sanguins spécifiques.

 

Comment se traite la dengue? 

Il n'existe pas de traitement curatif. Il s'agit simplement de contrôler les symptômes avec du paracétamol et maintenir un niveau d'hydratation de l'organisme suffisant, tout en attendant que l'infection ?meure d'elle-même? après 5-7 jours.

Cependant, la dengue sévère nécessite une hospitalisation pour une surveillance rapprochée et l'instauration de perfusions pour parer à une déshydratation grave, voire de perfusions pour contrer la survenue de saignements importants.

Certaines personnes sont plus à risque que d'autres de développer une dengue sévère:

    • Femmes enceintes
    • Bébés
    • Personnes âgés
    • Personnes en surpoids
    • Personnes souffrant de diabète, de maladies rénales ou de certaines maladies sanguines

Ceux dont les symptômes demeurent modérés peuvent rester se reposer à la maison. Ils doivent toutefois bénéficier chaque jour de la visite d'un professionnel médical afin de dépister au plus tôt la survenue de tout signe éventuel de complications, jusqu'à ce que la situation soit confirmée comme étant ?un quasi-retour à la normale?.

Ces signes de complications décrits plus haut, sont ceux évoquant l'apparition d'un saignement. En effet, ce qui fait le pronostic de la dengue, c'est la baisse du taux de plaquettes, cellules sanguine participant du système de coagulation et par là-même du contrôle de tout saignement. Si le taux de plaquettes (qui sont en quelque sorte consommées par le virus de la dengue) devient trop bas, des saignements spontanés apparaissent. Si ces saignements deviennent trop importants et si l'on ne transfuse pas les produits sanguins nécessaires pour compenser à la fois la consommation des plaquettes par le virus et la pertes de globules rouges par les saignements qui en découlent, le patient peut décéder d'une hémorragie massive (choc hémorragique).

 

Quoi faire pour commencer à se traiter face à ces symptômes?

    • Repos, hydratation, paracétamol, repas légers
    • Si le médecin estime ensuite que l'on peut rester à la maison, continuer sur le même régime
    • Il ne faut PAS prendre de l'aspirine ou des anti-inflammatoires comme l'ibuprofène, car ces médicaments peuvent majorer le risque de saignements
    • Par ailleurs et en règle générale, ne PAS donner de l'aspirine aux enfants et ce jusqu'à l'âge de 18 ans (afin d'éviter aussi des complications que l'on peut voir relativement souvent, comme le syndrome de Reye ? atteinte toxique de la peau donnant des décollements cutanés à type de bulles)

 

Est-ce qu'il existe des moyens de prévention face à la dengue?

    • Le meilleur moyen de prévenir la dengue est d'éviter la piqûre des moustiques vecteurs
    • Donc, ne pas sortir durant la journée lors de la phase d'activité de ces moustiques - ou le moins possible ? est l'un des meilleurs moyens de prévention. Les espaces de travail climatisés ou avec moustiquaires aux fenêtres sont généralement sûrs
    • Sinon, porter des chaussures fermées, des hauts à manches longues et des pantalons longs
    • Appliquer des crèmes ou sprays répulsifs sur les parties de peau découvertes (contenant du DEET ? à vérifier sur l'emballage)
    • Assécher tout point d'eau non chlorée existant près des lieux de vie, les moustiques pondant leurs ?ufs dans des flaques d'eau dormante.

 

Conclusion

La dengue est donc une maladie de plus en plus présente dans le monde et notamment en Asie du Sud-est.

Elle peut quelquefois se solder par une évolution vers des formes gravissimes et le décès du patient, mais la protection personnelle contre les moustiques, le diagnostic précoce, la surveillance précise des symptômes et l'hospitalisation précoce en cas de suspicion d'aggravation sont les meilleurs moyens pour en contrôler le pronostic et assurer une guérison dans l'immense majorité des cas.

Même si des vaccins sont à l'étude, une fois l'efficacité des premiers tests cliniques prouvée, il faudra encore attendre plusieurs années pour que leur application pratique soit utilisable dans la mise en place de campagnes de vaccination à grande échelle.

 

 

Après un parcours international, depuis 2012, Le Docteur Olivier Barles exerce ses fonctions à Kuala Lumpur où il est à la tête de la Direction Médicale Régionale des Services Médicaux pour l'Asie du Sud et l'Asie du Sud-Est pour International SOS. 

Notre article sur le Dr Olivier Barles et International SOS

 

Article rédigé  par le Dr Olivier Barles (www.lepetitjournal.com/kuala-lumpur.html) vendredi 20 décembre 2013

Photo Fotolia

Abonnez-vous gratuitement à notre newsletter

logofbkl
Publié le 19 décembre 2013, mis à jour le 19 septembre 2023

Sujets du moment

Flash infos