Dimanche matin, des milliers de personnes sont venues rendre hommage à Karpal Singh qui a été enterré avec les honneurs de l'Etat. Une fin de semaine envahie par l'émotion. Celui que l'on surnommait le Tigre de Jelutong, une ville qu'il avait représentée au Parlement, était dépeint comme un homme tenace, défenseur des opprimés et des marginaux; une ténacité qui lui aura valu quelques ennuis avec la justice. Disparu à l'âge de 73 ans, le premier ministre Malaisien l'a défini après l'annonce de son décès comme "un leader implacable, en politique, en droit; un défenseur engagé".
Avocat et homme politique, fils d'un immigrant Indien qui était gardien et pasteur, Karpal Singh est né à Penang. Il était membre du parlement depuis 10 ans pour la circonscription de Bukit Gelugor (Penang) mais aussi l'ancien président du Parti d'Action Démocratique qu'il avait rejoint en 1970.
Un avocat parfois de l'autre côté de la barre
En 1987, alors qu'il était député, Karpal Singh est détenu durant 15 mois en vertu de la loi sur la sécurité intérieure de la Malaisie, pour incitation présumée à la dissension raciale. Il est libéré en 1989. Depuis, la loi sur la sécurité intérieure a été révoquée.
En 2009 il avance des propos séditieux à l'encontre du Sultan de Perak. Le tribunal avait d'abord rejeté le cas, mais le gouvernement a introduit un recours aboutissant à une amende suffisamment élevée pour forcer sa disqualification du parlement. Juste avant son décès, le procureur général a demandé à ce qu'une peine de prison soit ajoutée en plus de l'amende.
Des dossiers bien souvent très médiatisés
Sa carrière l'a amené à s'occuper de nombreux dossiers sensibles. Karpal Singh était aussi un fervent opposant à la peine de mort, même si en 2010 il s'est prononcé en faveur en ce qui concernait les violeurs d'enfants.
En 1977, il a réussi à convaincre le Roi de gracier un jeune garçon de 14 ans alors condamné à mort pour possession d'arme à feu.
Il a défendu Kevin Barlow et Brian Chambers qui en 1983 furent arrêtés alors qu'ils transportaient 180 grammes d'héroïne. Ils furent les premiers occidentaux à tomber sous le coup de la loi anti-drogue, impliquant la peine de mort pour toutes personnes détenant plus de 15 grammes d'héroïne. Peu avant son exécution Barlow avait dit à Karpal ?vous avez fait de votre mieux, c'est la fin?.
Karpal Singh a aussi représenté l'ancien vice-Premier ministre, Anwar Ibrahim lors du procès pour sodomie en 1998. Il avait alors déclaré qu'il soupçonnait des gens haut placés de vouloir se débarrasser d'Anwar ce qui lui avait valu d'être poursuivi pour sédition. Il a aussi participé au second procès qui s'est tenu en 2008 suite à de nouvelles allégations et au troisième qui s'est déroulé dernièrement alors que l'acquittement de 2012 venait d'être annulé en mars dernier. Il avait de nouveaux été condamné pour sédition le mois dernier. Ibrahim Anwar a déclaré à son sujet après avoir appris son décès "nous avons perdu un collègue; un combattant infatigable de la justice?.
Deux accidents de la route
En 2005, un premier accident le laisse paralysé avec des problèmes neuromoteurs au niveau du bras droit, ce qui ne l'empêchera pas de poursuivre sa carrière tant comme avocat que comme politicien. Le 17 avril dernier, un second accident de voiture lui sera malheureusement fatal. Alors qu'il se rendait de Kuala Lumpur à Penang dans le cadre d'un procès, son véhicule est entré en collision avec un camion.
Karpal Singh laisse cinq enfants et quatre petits-enfants, ainsi que son épouse, derrière lui. Il avait déclaré le mois dernier dans le cadre des poursuites engagées contre lui, "le combat continue. Vous éliminez un Karpal Singh, une centaine de Karpal Singh émergerons".
Alexandra Le Vaillant (www.lepetitjournal.com/kuala-lumpur.html) lundi 21 avril 2014
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