Édition internationale

RAOUF RIFAI - Le célèbre peintre Libanais expose pour la première fois en Malaisie

Écrit par Lepetitjournal Kuala Lumpur
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 26 novembre 2013

 

Raouf Rifai est un peintre Libanais, né à Beyrouth en 1954. Il étudie les Arts décoratifs au Liban, puis se spécialise en scénographie pour ensuite s'orienter vers un doctorat d'urbanisme à Paris I. En parallèle de son travail de création, jusqu'à il y a peu, il enseigne l'Art à l'Université du Liban.

Tout le monde n'est pas sensible à l'art mais l'art est sensible au monde. Face à une toile on reste parfois interrogatif sensible ou insensible. Les Raboteurs de parquet, de Caillebotte, fut une des ?uvres phares d'une rétrospective au Grand Palais, pourtant en 1875, elle s'était vue refusée au Salon, trop quotidien, l'?uvre choque. Le monde désigne parfois un chef d'?uvre et on le regarde alors autrement, rien n'a pourtant changé, juste la perception que l'on en a. Mais il y a souvent une chose à laquelle on ne prête pas assez attention, c'est ce qu'il y a derrière la toile. La main qui lui a donné vie, pour le figer à la seconde même dans un instant infini. La vraie richesse de l'art c'est ce qui ne se voit pas : l'artiste. Et chaque rencontre avec un artiste est un moment unique, celui où le monde tel qu'on le connait mue vers l'imaginaire artistique. Regardez une ?uvre sans comprendre l'artiste c'est comme lire un livre et s'arrêter au prologue, c'est passer à côté d'une histoire.

Pour Raouf Rifai, Paris sera une ouverture inouïe sur l'art. Au fil des découvertes et des différents artistes qu'il rencontre, il dit qu'il a été touché par ?leur intérêt dans la nature et l'Homme?, l'amenant à comparer ?leur art parfois matérialiste, avec le notre, généralement spirituel?, ce qui l'influencera indéniablement dans son parcours de peintre. Plus de 20 expositions lui seront consacrées en presque 20 ans, et il participera à plus de 30 expositions collectives en Europe, aux Etats-Unis, au Moyen-Orient, à Singapour et au Japon. Certaines de ses ?uvres ont été vendues aux enchères chez Christie's et à Versailles, et on les retrouve aujourd'hui dans plusieurs musées ou collections privées. En 2010, le musée Sursock lui décerne le premier prix lors du Salon d'automne de Beyrouth. A partir du 26 octobre, ses toiles seront pour la première fois exposées en Malaisie, à la TJ Fine Art Gallery de Kuala Lumpur.

Lepetitjournal.com : De quel artiste, de quelle chose ou quelle personne tenez-vous votre inspiration?

Raouf Rifai : Elle vient de la nature et de notre civilisation, les traditions et les icônes des comédiens folkloriques (Jeha, Abu Abed,...).  Elle est aussi philosophique et littéraire au travers de personnes comme Gandhi, Jean-Jacques Rousseau et Gibran Khalil Gibran. Artistiquement j'ai été affecté par les orientalistes, par les figures religieuses que l'on trouve dans les églises, ainsi que l'école expressionniste allemande, le mouvement pop art américain et les écoles d'art d'action.

Quelle est l'objet de votre quête, sur quelles valeurs repose votre travail?

Mon art est basé sur la préservation de l'harmonie entre la nature et l'Homme, les significations matérielles et spirituelles, l'égalité entre les êtres humains. Tout ceci est une image pour montrer la réalité qui se déroule dans mon entourage. Il s'agit d'un dialogue entre l'Est et l'Ouest. Il s'agit d'un message transmis par une icône populaire,  Le Darwiche, qui a vécu pendant une longue période dans le Moyen-Orient et maintenant renaît, recouvrant un nouveau rôle, celui de représenter notre société dans le monde entier.

Voilà cinq ans que vous avez débuté ce travail sur Le Darwiche, est-il devenu une sorte d'obsession ou de fascination pour vous?

J'ai peint des peintures écologiques avant de peindre Le Darwiche. Vous pourriez dire que je tentais de protéger l'environnement de l'Homme, et que maintenant mon but est de protéger l'Homme de lui-même. J'ai réalisé seulement dans un second temps que l'Homme était la vraie raison. Pour mettre en lumière cette problématique, il faut du temps, beaucoup de temps. Ce n'est ni une obsession, ni une fascination. Cette approfondissement du sujet est poursuivi dans le seul but de montrer toutes les facettes d'un problème.

Pour vous, quelle est la symbolique du Darwiche, est-ce seulement une représentation de notre propre monde ? Quel perception du monde dans lequel vous vivez avez-vous?

Le Darwiche représente l'être humain sous ses deux aspects : l'international et le local. Localement, Le Darwiche illustre la situation au Moyen-Orient, la vie socio-politique et les problèmes généraux et générationnels. Dans sa dimension internationale, il est une mutation. Il peut être n'importe qui, Américain, Indien, Américano-Indien, Malais, Chinois, Africain, Européen ou Arabe, et chaque fois où il est présent, il défend une question humaine. Par exemple, Le Darwiche nommé Le Dernier est un commentaire sur les Américano-Indiens tués à cause du racisme.

Darwiche en arabe signifie commun des mortels, pourquoi avoir choisi ce sujet ?

Historiquement il représente une valeur spirituelle et matérialiste en même temps. Il est un personnage folklorique qui a dominé notre région pendant l'ère ottomane. Il est l'ambassadeur de notre société sur le monde, et un héros qui se dresse contre Mickey Mouse, Superman et Batman. Le Darwiche est un portrait humoristique, plein d'esprit et grand des symboles du Moyen-Orient.

Pourquoi avoir intitulé cette collection Le Carnaval des Darwiches? Pensez-vous que la plupart des gens se déguisent en ce qu'ils ne sont pas ?

Le carnaval est une cérémonie au cours de laquelle les symboles de la société, les traditions, les robes et les accessoires sont représentés. La collection Le Darwiche parcourt le monde en ressemblant à un carnaval, montrant les différentes scènes de notre société. Dans un carnaval, les personnes recouvrent leur visage avec des masques. De même, les Darwiches portent des masques pour exposer deux points de vue : tout d'abord que l'Occident a une mauvaise idée de nous, et la seconde que nous nous cachons de la vérité pour des raisons historiques et socio-politiques. Alors oui, les gens ne sont jamais ce qu'ils sont véritablement. 

Les symboles sont importants dans vos peintures?

Bien sûr, j'essaie d'en glisser dans tous mes tableaux. Pourquoi? Parce que c'est la clé pour comprendre la vraie signification de l'?uvre, et pour pouvoir partager mes idées avec les spectateurs.

Vous peignez les humains d'une façon très contemporaine, de façon abstraite. Quelle est votre perception? Y a t-il une raison à cela ? Est-ce que seulement l'idée est importante?

Il est vrai que mon travail est figuratif - abstrait. C'est ma façon de créer un nouveau langage artistique. Pour que mon travail soit contemporain, il doit être expérimental, expressif et user d'une nouvelle technique. Il doit représenter la situation réelle qui m'entoure. Dans le même temps, l'idée et la matière sont importantes pour moi. Ils sont tous deux liés à l'humanité.

Le rouge et l'ocre reviennent souvent dans certaines de vos peintures ? Ces deux couleurs ont-elles une connotation particulière pour vous?

Pour moi, le rouge est un symbole de l'Homme, et l'ocre représente la terre. L'ocre tire parfois vers l'or dans une représentation du monde spirituel. Ce sont deux couleurs présentes dans notre tradition orientale, et utilisées dans la hiérarchie des positions dans la société.

Vous exposez beaucoup à l'étranger, dans les pays occidentaux, les pays de l'Est et ceux d'Asie. Votre inspiration puise t-elle aussi sa source dans le monde? Est-ce que vos voyages ont nourrit votre approche de l'art ?

Je pense qu'il y a des dialogues entre les civilisations. Le voyage est très important dans la vie d'un artiste, il l'aide et enrichit son art. Comme les médias, l'art doit désormais atteindre tout le monde, partout, parce que c'est une communication et un symbole de paix.

Aujourd'hui votre travail se porte t-il sur autre chose ou continuez-vous toujours à peindre Le Darwiche?

Pour le moment, Le Carnaval des Darwiches est toujours en cours . Mais même si j'ai en parallèle débuté quelque chose de nouveau, le sens et le symbole de Le Darwiche continuent de perdurer dans mon travail.

Après avoir peint depuis de nombreuses années, vous sentez-vous vide d'idées parfois ?

Oui. Tout le monde perd parfois l'inspiration, artistes, poètes, écrivains... Dans de telles situations, je fais une pause, je vais visiter des expositions et je voyage. Les idées sont comme le vin, plus le temps passe, meilleur est son goût. 

On retrouve beaucoup de plats dans vos ?uvres, pourquoi ne pas utiliser une approche bidimensionnelle ?

Dans notre civilisation, historiquement, nous avons eu un monde unidimensionnel dans nos tableaux. Cette dimension est liée à la religion. Il montre le monde spirituel par l'abstraction du portrait.

Quelques mots au sujet de votre prochaine exposition à la TJ Fine Art Gallery ?

Cette exposition Le Carnaval des Darwiches est un prolongement de l'exposition faite à la Galerie Sana à Singapour, qui a été une vraie réussite. Mon art semble être pertinent en Asie et pour cette raison, ces deux galeries pensaient qu'il serait intéressant de me présenter pour la première fois à Kuala Lumpur. Dans la même logique, la galerie Sana à l'intention de produire ma prochaine exposition qui aura lieu à Hong Kong en 2014, avant de revenir à Singapour en 2015. 

  

Article Alexandra Le Vaillant (www.lepetitjournal.com/kuala-lumpur.html) jeudi 24 octobre 2013

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Photos TJ Fine Art Gallery (de haut en bas) : Darwiche in Celebration, Raouf Rifai,  Abu Zeid El Hilaly Darwiche, Egyptian Darwiche

 

Le Carnaval des Darwiches, une exposition de Raouf Rifai

TJ Fine Art Gallery

A-3-10, Centrio Pantai Hillpark,

Jalan Pantai Murni 1, 59200 Kuala Lumpur

Du 26 octobre, 20h (vernissage) au 17 novembre 2013

Pour participer au vernissage, adressez votre mail à : tjfineart@yahoo.com

logofbkl
Publié le 23 octobre 2013, mis à jour le 26 novembre 2013
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