

Les artistes congolais n'ont plus le droit de se produire en Europe et en Amérique. Mais l'Afrique reste encore un espoir pour ceux-ci. L'Afrique du Sud est la dernière carte à jouer lorsque l'on se fait censurer ailleurs. Pourtant, là encore, la menace plane. Nous avons rencontré Joe Kyzi, la nouvelle star montante de la musique congolaise. De passage à Johannesburg, il a accepté de répondre à nos questions au sujet d'une censure qui ne semble pas être temporaire
(Crédit photo: Christian Eger Taty)
Le Petit Journal : qui est Joe Kizy ?
JK : Joe est un artiste pratiquant la "musique de recherche", qui est un mélange de plusieurs styles incluant la rumba congolaise.
Vous êtes à Johannesburg depuis un peu plus d'une semaine ; est-ce à cause de votre contrat de production ?
Exactement, je suis d'ailleurs arrivé incognito comme vous le savez, et ce à cause de la menace qui pèse sur les artistes congolais.
Quelle est la suite de l'histoire ? Allez-vous pouvoir produire votre musique ou cela semble désormais impossible ?
Vous savez... l'interdiction de production à l'étranger ne concerne pas que les pays africains. Cette mesure est également appliquée en Europe et en Amérique. L'Afrique du Sud est quant à elle un pays dans lequel les artistes sont bien protégés, qu'ils soient étrangers ou pas. Ma production de juin est confirmée et je peux rassurer le public : il n'y aura pas d'incident. La preuve : les 23, 24 et 26 avril la star congolaise Jossart N'Yoka Longo est attendue à Jo'burg pour une série de spectacles. Cette rumeur, même s'il y a eu des menaces, n'a donc pas raison d'être en Afrique du Sud.
Quelle est la date prévue pour votre concert à Johannesburg ?
La date du concert est fixée au 30 juin ? date de l'indépendance de la RDC ? suivi d'une série de performances dans la ville de Johannesburg. La maison de production de la ville envisage même actuellement un featuring avec un groupe sud-africain très célèbre, dont je préfère taire le nom pour le moment.
La musique congolaise est aujourd'hui reprochée d'être "perverse" à cause de thèmes abordés allant à l'encontre des carcans sociaux ; quel type de musique offrez-vous aux publics congolais et étranger ?
Ma musique est éducative. D'ailleurs on m'appelle "Joe Kyzi Fondamental" car il y a le fond et le mental dans ma musique. Dans mon premier album par exemple, en featuring avec Mbilia Bel, j'ai eu à chanter "La valeur d'une femme" ; et dans le deuxième album, j'ai produit un autre titre appelé "AFRICA", dans lequel je condamne le monde qui expose beaucoup plus le côté négatif de l'Afrique au lieu de ses qualités en termes de valeurs morales et culturelles.
Quels sont vos points forts pour convaincre un public étranger pour lequel le lingala est une langue peu familière ?
Le spectacle, mes chorégraphies et le fait que ma musique soit diversifiée. Je pense aussi pouvoir m'adapter à un public différent : en plus de la musique congolaise, je fais également du zouk, du R&B, du Coupé décalé, de la salsa et de l'acoustique?
L'Afrique du Sud est un pays anglophone qui offre une culture musicale variée. Malgré tout, la musique congolaise est moins acceptée : à quoi pourrait ressembler votre spectacle devant un public exclusivement sud-africain ?
Le peuple Sud Africain est un public chaud. Je vais donc les "chauffer" avec un spectacle ardent !
Pour quelle raison les artistes congolais font l'objet d'une interdiction de production à l'étranger?
Pour des raisons d'ordre politique qui n'ont rien avoir avec notre métier. En ce qui me concerne, je me limite à la musique et seulement la musique.
Pourtant, on vous reproche de soutenir les politiciens ; on vous reproche également une insensibilité devant la souffrance du peuple.
Concernant la politique, je ne suis qu'un musicien ; concernant la souffrance du peuple, il y'a beaucoup d'artistes au Congo qui sont ambassadeurs au sein d'organisations humanitaires : ce sont des philanthropes. Pour ma part, j'ai produit bénévolement des concerts pour célébrer le mois de la femme : toutes les recettes vont contribuer à la construction d'une école pour l'évolution de la femme.
Pourquoi ne dénoncez-vous pas les abus de pouvoir dans vos chansons comme le font d'autres artistes africains ?
Il existe dans mon pays des artistes qui s'inspirent de la politique, mais mes thèmes sont très loin de la politique. J'essaye d'aider la société d'une autre manière.
Christian Eger Taty - http://www.lepetitjournal.com/johannesbourg.html - Jeudi 28 avril 2011



