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Guerre à Gaza : pourquoi l’Afrique du Sud accuse Israël de génocide ?

Le début de la fin à Gaza ? Les 11 et 12 janvier, la Cour internationale de justice a jugé une plainte déposée par l’Afrique du Sud, qui accuse Israël de “comportements génocidaires” dans sa guerre menée face au Hamas. La Haye rendra son verdict d’ici deux à trois semaines mais son influence sur la suite du conflit reste à prouver.

Afrique du Sud accuse Israël de génocideAfrique du Sud accuse Israël de génocide
Écrit par Teddy Perez
Publié le 15 janvier 2024, mis à jour le 16 janvier 2024

Accueillis en héros après leur voyage à La Haye, les dirigeants sud-africains reviennent de la Cour internationale de justice avec le sentiment du devoir accompli. Durant deux jours, les 11 et 12 janvier, ils sont allés plaider face aux 17 juges de la Cour internationale de justice. Accusant Israël de violer la convention des Nations unies sur le génocide, les juristes sud-africains souhaitent également des mesures de protections du peuple palestinien. Ils ont également demandé un nouveau cessez-le-feu entre l’Etat hébreux et le Hamas. La décision de La Haye est attendue dans les prochaines semaines.

Génocide : Le terme « génocide » a été forgé en 1944 par le juriste Raphaël Lemkin. Il se compose du préfixe grec genos, qui signifie “race”, et du suffixe latin -cide, qui renvoie à la notion de “tuer”. La Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948 installe le crime de génocide dans le droit international. Le crime de génocide est commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national ethnique racial ou religieux. Pour que le crime de génocide soit donc constitué, il faut démontrer qu’il y a intention, c’est-à-dire la volonté objective, de détruire le groupe humain ciblé comme tel. C’est-à-dire ciblé parce qu’appartenant à un groupe national, ethnique, racial ou religieux.

 

Requête pour “génocide” : des motivations historiques et stratégiques

Dans une requête de 84 pages adressée à la Cour internationale de Justice (CIJ), l’Afrique du Sud a exhorté, le 29 décembre 2023, les juges à ordonner d’urgence à Israël de “suspendre immédiatement ses opérations militaires” dans la bande de Gaza, estimant qu’Israël “s’est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes de génocide contre le peuple palestinien à Gaza”.

Une prise de position qui n’est pas anodine. En 2022, un rapport d’Amnesty International qualifie Israël de régime d’apertheid contre les indigènes palestiniens, système de discrimination raciale institutionnalisé en Afrique du Sud de 1948 à 1994. De par son histoire, l’Afrique du Sud représentée par son parti ANC (Congrès national africain) a souhaité faire reconnaître ce crime contre l’humanité. En pleine année d’élections législatives, c’est aussi le moyen pour le parti socialiste de gagner en popularité à l’international.

 

Plainte de l’Afrique du Sud : un tournant majeur dans la guerre à Gaza ?

L’Afrique du Sud fait partie des pays qui se sont clairement opposés au Hamas, après l’attaque terroriste sur la population israélienne du 7 octobre 2023. Pour autant, plus de trois mois après la reprise du conflit, Pretoria se distingue des pensées politiques dominantes en Occident en accusant Israël d’être à son tour coupable de génocide.

Au terme de deux jours d’audience publique, cette mise au pilori pourrait voir naître d’autres requêtes de pays extérieurs au conflit. C’est en tout cas ce qu’espère - en France - la secrétaire nationale du parti Les Écologistes, Marine Tondelier. “Je soutiens cette initiative pour que la vérité soit faitea-t-elle déclaré sur le plateau de France 3 le dimanche 14 janvier. Le chef de file de la France Insoumise Jean-Luc Mélenchon déclareun million de fois merci à l’Afrique du Sud”. Présent à La Haye, il a souligné “un retour à l’humanité” ainsi que le respect du “droit international” lors de cette plaidoirie qui “pourrait modifier la situation politique et juridique pour tous ceux qui aideraient le Gouvernement d’Israël.

 

Benjamin Netanyahu se défend du génocide israélien
© Gouvernement Israël

 

La réponse de Benjamin Netanyahu : “personne ne nous arrêtera”

Lors d’une conférence de presse menée le 13 janvier - au cap des 100 jours de guerre - le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a anticipé la décision de la CIJ. En cas de génocide reconnu, il assure continuer la guerre “jusqu’à ce que le Hamas soit éliminé” et qu’Israël “ait récupéré tous ses otages”, ajoutant que n’arrêtera Israël, “ni La Haye, ni l’axe du mal, ni qui que ce soit.” Au contraire, Benjamin Netanyahu dénonce “un monde à l’envers” puisque l’origine de la création d’une convention des Nations unies sur le génocide a été adoptée en 1948 à la suite de la Shoah.

Si la Cour internationale de justice considère qu’Israël commet un génocide, elle n’a pour autant aucun moyen de le stopper car selon la Charte des Nations Unies : “il appartient aux Etats concernés d’appliquer les décisions de la Cour dans leur juridiction nationale.” Symbolique, la procédure lancée par l’Afrique du Sud revêt toutefois une importance capitale dans la reconnaissance officielle des crimes perpétrés par Israël. Selon le bilan du ministère de Santé du Hamas, 24.000 Palestiniens, en majorité des femmes, des adolescents et des enfants, ont perdu la vie depuis la reprise du conflit en octobre dernier.

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