Après avoir passé 4 ans et demi en Papouasie-Nouvelle-Guinée, Elodie Van Lierde, biologiste, professeur et photographe belge est arrivée à Jakarta il y a quelques mois où elle enseigne désormais au lycée français. En découvrant les extraordinaires photos de son compte instagram, nous avons souhaité la rencontrer afin qu’elle partage avec nous ses années d’aventures dans la vallée de Goroka située à 1h d’avion de la capitale Port Moresby. Rencontre peu commune.
Elodie, comment êtes-vous arrivée à vivre en Papouasie-Nouvelle-Guinée ? Quel est votre parcours ?
En 2007, j’étais sur l’île de Moorea en Polynésie française pour mon mémoire sur le blanchiment des coraux et c’est là que j’ai rencontré mon futur mari qui lui terminait son doctorat. Et depuis, nous avons enchainé les voyages et les postes à travers le monde. Tout d’abord la Mauritanie, puis après 3 années dans le désert, nous sommes partis 5 années vivre à Madagascar où nos deux filles sont nées. Mon mari travaillait pour des ONG de conservation de l’environnement et de mon côté, j’ai enseigné l’anglais aux lycées français de Nouakchott et de Tananarive. Nous avons fait de très belles rencontres et avons beaucoup voyagé en Afrique : Mali, Congo, île de la Réunion, Afrique du Sud… Après l’Afrique, nous avons pris 6 mois de congé sabbatique et avons découvert l’Équateur, les Galápagos et l’Australie. Un petit passage à Paris de 9 mois où nous avons eu un peu de mal à trouver nos marques, et puis une opportunité s’est présentée pour mon mari dans une ONG internationale de conservation et nous sommes partis en Papouasie-Nouvelle-Guinée. C’était un rêve qui devenait réalité, pour deux biologistes et des passionnés d’aventures !
Où habitiez-vous en Papouasie-Nouvelle-Guinée ?
Nous avons vécu 4 ans et demi à Goroka, c’est une vallée des Hautes-Terres de Papouasie-Nouvelle-Guinée située à 1600 m d’altitude. Les journées y sont chaudes et sèches et le soir il fait frais. C’est un climat agréable, un peu comme un printemps perpétuel. On y trouve d’ailleurs de très bons légumes et fruits car la terre y est très fertile.
La vallée de Goroka fut découverte dans les années 1930 par des chercheurs d’or australiens, elle fait partie des sept provinces des Hautes-Terres de PNG. L’économie est plutôt une économie de subsistance basée sur l’agriculture et l’élevage des porcs. Tout tourne autour du clan, les hommes pêchent ou chassent et les femmes s’occupent des cultures, de la cuisine et des enfants.
La photo, c’est votre passion, comment cela vous est-il venu ?
C’est avant de partir en Mauritanie que mon mari m’a offert mon premier reflex numérique, j’ai appris seule, les rencontres, les lieux m’ont inspirée. La photographie c’est aussi exercer son œil, j’ai appris que j’aimais photographier et j’ai travaillé ma technique à travers mes voyages.
En Papouasie, je souhaitais montrer une autre image de ce pays qui a souvent mauvaise presse. Durant ces 4 années, nous n’avons vécu que des choses positives. Selon moi rien ne semble entamer la gentillesse et la curiosité des habitants. Il faut savoir sortir des sentiers battus, faire preuve de respect et garder le sourire et le cœur ouvert.
Comment se sont passées vos rencontres avec les populations locales ? Comment organisiez-vous vos sorties dans les villages ?
J’ai appris les bases de la langue locale, le Tok Pisin, qui se traduit d’ailleurs par « la langue des oiseaux », cela aide beaucoup dans les contacts avec les habitants. Les papous adorent être pris en photo au contraire de mes voyages en Afrique où les réticences face à la photo étaient nombreuses. Grâce à l’ONG pour laquelle travaillait mon mari, j’ai pu aller à la rencontre de villages reculés. Des rencontres extraordinaires, j’en ai vécu comme à Kwiop, un village qui n’avait pas vu d’homme blanc depuis 1980… J’y ai passé une semaine, cette expérience m’a marquée à vie. J’ai partagé avec eux les repas, les soirées, le quotidien au marché et dans les champs, tout le monde pleurait à mon départ.
J’ai pu assister à de nombreuses célébrations et festivals à travers le pays, même si tous ne parlent pas le Tok Pisin, nous arrivions toujours à communiquer. Pour faire ces photos, il faut que chacun se sente libre, il faut prendre le temps de comprendre et de parler aux communautés. J’ai fait un grand travail de recherches pour comprendre l’histoire et la culture de ce pays.
Voyager en Papouasie, c’est un choc des cultures et un voyage dans le temps.
Nous avons aussi beaucoup voyagé dans le pays, à l’intérieur des terres mais aussi dans les nombreuses îles. Il y a d’ailleurs de nombreuses épaves en mer datant de la seconde guerre mondiale.
Je travaille avec de nombreux objectifs, j’aime prendre tout type de photo, mais j’avoue avoir un petit faible pour le portrait et l’animalier. Je possède un drone pour les photos aériennes et une caméra GoPro pour les photos sous-marines.
Quels sont vos trois plus grands moments vécus en Papousiee-Nouvelle-Guinée ?
Définitivement mes rencontres au village de Kwiop pour le côté humain.
Le festival du feu de la tribu Baining sur la péninsule de la Gazelle. Les hommes portent des masques énormes avec des gros yeux et frappent des pieds des rondins en feu sur le rythme des tambours envoutants.
Et l’île Manus au nord du pays pour le côté inaccessible, l’authenticité et l’accueil des habitants, ainsi que pour la beauté époustouflante de l’endroit.
Vous avez rencontré le grand photographe Jimmy Nelson qui a publié « Before they passed away » et « Homage to Humanity », deux ouvrages magnifiques de photos sur les dernières tribus à travers le monde. Racontez-nous.
Je revenais d’un footing matinal en ville à Goroka et je l’ai reconnu immédiatement car il a un physique que l’on remarque. Il attendait une voiture devant son auberge qui devait l’emmener en expédition dans un village voisin. Il était entouré de ses grosses valises noires de matériel photo. Je suis allée lui parler et l’ai invité à la maison. Ce fut le début d’une belle amitié !
Alors Elodie, à quand une exposition de vos photos à Jakarta ?
Nous invitons à vous rendre sur le compte instagram d'Elodie pour découvrir ses photos : elodietravelphotography