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“Mon féminisme est un féminisme de cheval de Troie”

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Aurélie Salvaire sera à l'Alliance française vendredi pour parler de féminisme.
Écrit par Matthieu Verrier
Publié le 27 juin 2018, mis à jour le 27 juin 2018

Entrepreneuse sociale, Aurélie Salvaire s’est engagée dans l’accompagnement des femmes pour la construction de leur propre storytelling. Cette Française fondatrice de la plateforme Shiftbalance a publié le livre Balance the world! donnant quelques outils à ceux qui veulent conduire une révolution féministe. Elle sera à l’Alliance française ce vendredi pour en débattre.


Comment avez-vous conçu votre livre? Comme un manuel pour révolutionnaire féministe?
C’est surtout un manuel pour la jeune génération, qui est plus active sur les réseaux sociaux et les mouvements sociaux. Ce livre est un peu un mix entre “le féminisme pour les nuls” et un guide pour les personnes qui ont envie d’être actives. C’est pour ça que la version digitale est disponible gratuitement sur le site web. Le but est que son contenu se diffuse au maximum. 


S’adresse-t-il aussi aux hommes?
Absolument. Le dernier chapitre traite de la masculinité. Comment l’envisager plus ouverte, plus diverse qu’aujourd’hui? Les autres chapitres peuvent être pour les pères qui ont envie de motiver leurs filles, ou pour les garçons. Quand on parle de la violence ou de sexe, il y a un gros travail à entreprendre pour se comprendre mutuellement. Quand je discute avec mon père ou avec mon frère, il y a beaucoup d’incompréhensions de ce que peut être notre expérience comme femme dans notre société. La lecture de ce livre permet aussi d’éviter le déni. J’entends beaucoup de gens dire “Maintenant ça va…”


Si je vous dis: “après le mouvement MeToo, ça va…”?
Harvey Weinstein n’est pas en prison. La parole a été libérée, mais concrètement, ça n’a pas vraiment changé quoi que ce soit pour les oppresseurs. J’entends même parfois un backlash de certains et certaines qui disent: “on n’arrête pas de parler de ça, on passe à autre chose”. Ça a été un super moment où beaucoup de personnes ont réalisé une partie du problème, mais le problème de fond n’est pas réglé. Il y a encore beaucoup à faire.

On n’est pas obligé de tous montrer ses seins dans la rue pour changer le système

Ce n’était pas le début d’une gender revolution?
On l’a cru. Peut-être que ça le sera. Il va falloir beaucoup plus de mouvements comme Metoo. Je suis encore sceptique. Quand je vais à des événements et que je demande à la salle qui se reconnaît comme féministe, la moitié ne lève pas la main. On est encore loin. Certains trouvent que les pratiques féministes sont trop agressives ou ne se reconnaissent pas dans leurs revendications. C’est ce que j’essaie d’expliquer: on peut avoir des tactiques différentes. On n’est pas obligé de tous montrer ses seins dans la rue pour changer le système. Mais au moins, la première phase est que tous et toutes, on se reconnaisse comme féministes.


Quelles sont les grandes différences entre l’Europe et l’Asie sur la question du féminisme?
La maladie est la même, elle a simplement différents symptômes. En Occident, on a l’impression que nous sommes bien meilleurs sur ce thème. C’est lié à notre vision colonialiste ou raciste ou du moins de suprématie. Je travaille beaucoup au Pakistan. Tout le monde me dit: “quand même, les femmes sont beaucoup mieux en France qu’au Pakistan.” Oui, évidemment. Mais je rencontre beaucoup de femmes en France qui n’ont pas l’envie de lutter comme les femmes pakistanaises. Au moins, au Pakistan, la prise de conscience du problème est plus forte. 

Les jeunes filles ne se reconnaissent plus dans le management à la papa

Après l’ancienne génération qui réclamait la pilule, les plus jeunes cherchent à se libérer de la pilule. Y a-t-il un féminisme par génération? 
On dit souvent qu’il n’y a pas qu’un seul féminisme. Il y a aujourd’hui le féminisme cool, qui utilise beaucoup les réseaux sociaux. La jeune génération est plus sensible à ce thème là. Les jeunes filles ne se reconnaissent plus dans le management à la papa avec les hommes bedonnants de 50 ans qui leur donnent des ordres. Les jeunes de 20-25 ans ont envie d’agir, mais comment vont-elles le faire? Beaucoup le font en sortant du système.


C’est-à-dire?
Elles disent: “moi j’en ai marre, je vais devenir prof de yoga” ou “freelance”. C’est super, mais il faudrait un effet de masse important. Et c’est un système un peu précaire économiquement. On laisse alors les grosses structures toujours aux mains du même type de management. C’est un souci. 


Quel est votre féminisme?
Ça dépend des jours! (rire) Je suis offensive dans le langage. Mon féminisme est un féminisme de cheval de Troie. Je suis diplômée d’une grande école française donc je ne fais pas peur. Je sais parler le langage des dominants. J’utilise ça pour rentrer dans des entreprises, des ambassades ou autres. Et quand je suis à l’intérieur je tiens un discours plus offensif que ce qu’on imaginait de moi dans l’aspect extérieur. Si je propose de faire un atelier sur les stéréotypes de genre, les gens se méfient. Si je propose un atelier de storytelling et de prise de parole en public, c’est inoffensif et ensuite on peut aborder les stéréotypes et les différences de prises de parole entre hommes et femmes.


Informations pratiques

Aurélie Salvaire sera à l'Alliance française ce vendredi 29 juin 2018 à 19 heures.
Entrée libre après réservation sur le site Eventbrite
Adresse: Médiathèque del'Alliance française, 59 Jordan Road, Kowloon


Son livre Balance the world! est disponible gratuitement sous format numérique sur le site shiftbalance.org

Aurelie Salvaire Balance the wolrd

 

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