Édition internationale

MICHAEL WOLF – Hong Kong collection

Écrit par Lepetitjournal Hong Kong
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 25 mars 2014

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L'été dernier il nous régalait avec une exposition mettant en valeur sa collection d'illustrés homonymes du Petit Journal, il revient en ce début d'année 2014 avec une actualité plus personnelle, Hong Kong Trilogy, son nouveau livre lancé samedi 22 février dans son studio de Chai Wan. L'occasion pour lepetitjournal.com d'évoquer avec lui son parcours et sa vision de Hong Kong ?  

Fiche signalétique

Nom : Michael Wolf
Métier : Photographe de presse devenu artiste-photographe
Trait particulier : Collectionneur
Fil conducteur : "Life in cities" (la vie dans les villes)
Son antre : Studio de Michael Wolf, Kailey Industrial Building à Chai Wan
Repères chronologiques : 40 ans de carrière, depuis 20 ans à Hong Kong, 10 ans de créations personnelles ?
Un site : http://photomichaelwolf.com/
Son dernier livre : Hong Kong Trilogy

 

Photographe de presse

Michael Wolf commence sa carrière dans les années 1970 en Europe, comme photographe de presse pour des magazines allemands et internationaux après une formation à la Volkwang School : "C'était une profession incroyable : je pouvais faire quelque chose que j'aimais et en vivre. Le photojournalisme connaissait un âge d'or, l'Allemagne était à la pointe et quiconque sortait de la Volkwang School avec une bonne thèse était sûr d'avoir un travail. C'est comme ça que j'ai démarré, en voyageant pour couvrir des reportages? 

Collection « Architecture of density » © Michael Wolf

Dans les années 1970 en Europe, la seconde guerre mondiale était déjà loin mais il restait encore beaucoup de cicatrices, c'était une époque encore un peu chaotique et intéressante professionnellement : la bande à Baader, les terroristes, la guerre froide, l'armée rouge ... mais au début des années 1990, j'ai commencé à m'ennuyer. L'Europe avait changé, en particulier l'Allemagne, tout s'était lissé et commençait à se ressembler quel que soit l'endroit où vous alliez ; je suis devenu cynique, il n'y avait plus rien de positif pour moi et il me fallait partir ailleurs."

L'intuition de Hong Kong

"Je n'avais alors pas d'attaches et j'aurais pu aller n'importe où. Je suis venu à Hong Kong par accident, en regardant un globe. Dans ma tête j'envisageais toutes les destinations possibles, Moscou, Buenos Aires, et je m'écoutais. Mais à chaque fois, ça ne résonnait pas en moi, jusqu'à ce que j'arrive sur Hong Kong et sur une impression. Instinctivement, j'ai alors véritablement senti que c'était l'endroit où aller." Michael Wolf s'installe sur le territoire en 1994, un contrat free-lance en poche signé avec le magazine Stern intéressé par l'aventure. Le contexte est favorable car la Chine est alors un vaste "trou noir" qui intrigue le monde et la rétrocession de Hong Kong approche. Correspondant pour l'Asie, le photographe sillonne le continent et passe 6 mois par an de l'autre côté de la frontière.

Mais en 2001, la donne change : les budgets de presse subissent de plein fouet l'effondrement du marché de la publicité. Outre la limitation des dépenses, les méthodes de travail évoluent avec le raccourcissement des délais de traitement de l'information et Michael remet une nouvelle fois tout en cause : "J'ai trouvé ça de moins en moins satisfaisant parce qu'en prenant de l'âge j'avais plutôt envie d'aller plus en profondeur dans les sujets. Ce n'était plus possible avec les médias papier. On me demandait de devenir le bras d'un directeur artistique, d'être efficace et de photographier ce qu'il voulait. Ce n'était pas la façon dont je voulais vivre les 20 dernières années de ma vie professionnelle si bien que j'ai démissionné en 2003."

Collection « Hong Kong Back door » © Michael Wolf

Le SRAS, le déclencheur  

Avec cette rupture, Michael Wolf décide de réaliser ses propres projets, se donne deux ans « pour essayer » sans vraiment savoir encore comment cela se fera : il n'a alors dans son portfolio, qu'une collection de "bastard chairs" commencée dans les années 1990, des photographies de chaises rafistolées qu'il ramène de chacun de ses voyages en Chine. Mais la conjoncture va une nouvelle fois guider le photographe. "Au moment où j'ai quitté le journalisme en 2003, il régnait à Hong Kong une atmosphère de fin du monde à cause du SRAS. Comme beaucoup d'étrangers, ma femme et mon fils sont partis à Noël et je ne savais pas moi-même si je resterais. J'ai réalisé alors que je n'avais jamais fait de vrai travail sur Hong Kong où je vivais depuis 8 ans, une sorte de crime en photographie, une immense opportunité manquée. Je me suis donc mis au travail et suis sorti presque tous les jours pendant 6 semaines pour prendre des photos qui sont à la base de mon projet 'Architecture of density', "Density and the back door'."

Dehors, dedans, l'oeil sur la vie de la cité

Avec "Density", il photographie la ville comme jamais auparavant : des façades d'immeubles, géométriques, sans limite, sans ciel, ni sol, illustrant parfaitement la densité de la cité. Le concept séduit un galeriste qui emmène quelques épreuves à Chicago et à partir de là, l'artiste prend définitivement

le pas sur le reporter. "Le sujet des mégas villes était un sujet contemporain et j'avais la chance d'être au bon endroit, au bon moment ; toute l'attention était sur la Chine et dans sa périphérie, Hong Kong. A partir de là, des galeries se sont intéressées à mon travail et m'ont permis d'élargir mon sujet. A Chicago, j'ai fait un projet un peu similaire appelé « transparent city », puis je me suis lancé dans « 100 by 100 », en réponse à « density »parce que tout le monde, partout, me demandait en regardant mes images : mais comment est-ce à l?intérieur ?"

Collection « Hong Kong night » © Michael Wolf

Artiste photographe, collectionneur obsessionnel

Les projets, les expositions et bientôt les publications s'enchainent. Le photographe est représenté par plusieurs galeries à travers le monde et en quelques années, la réputation de Michael Wolf n'est plus à faire, il est un incontournable du monde visuel hongkongais mais aussi du monde visuel urbain, notamment avec son "Tokyo Compression", un peu dérangeant mais très fort, qui fixe les gens au travers des masses qui transitent par le métro à Tokyo. Son travail ressemble à son parcours : sans plans ni préconceptions, le photographe suit tout simplement ses intuitions et sa collectionnite : "Je fais des photos tous les jours. Je me promène et je prends des photos, sur toutes sortes de sujets. Je suis un collectionneur. Ca pourrait être un mauvais trait de caractère mais pas pour l'art parce que cette obsession donne la volonté d'aller au bout et c'est là que ça devient intéressant, quand une trame commence à se dessiner. Mon premier projet par exemple, les 'bastard chairs', je ne savais pas d'avance que ça deviendrait un sujet aussi important. J'étais juste fasciné par ces chaises que j'aime ; je trouve que ce sont de beaux objets mais ce n'est qu'après leur accumulation et avoir terminé que j'ai compris qu'elles étaient une métaphore de la Chine ; ces chaises ont leur propre esthétique qui relèvent du design alors qu'elles n'en ont pas."

La beauté des petites choses, la référence à Hong Kong

"Toutes les images que j'accumule sur Hong Kong, les 'corner houses' ou les 'Earth Gods', j'y travaille depuis longtemps. Tous les petits objets abandonnés, chaque fois que je les vois, je les aime ; ils ont une certaine forme de beauté, alors je les collectionne. Il y a 5 ans, il aurait été impossible d'en faire un livre mais Hong Kong a beaucoup changé ces 10 dernières années et les gens commencent à comprendre ce qui a de la valeur, ce qui est unique. Comme j'ai énormément travaillé sur Hong Kong, les éditeurs font appel à moi ; avec Hong Kong University Press par exemple, c'est merveilleux d'avoir ces photos et quelqu'un qui écrit un essai sur le sujet(?) Ce sont des petites pierres, des touches qui se combinent pour former l'image d'ensemble de Hong Kong. C'est le Hong Kong traditionnel si important alors que la ville change si vite. Avec le renouvellement urbain, la ville perd sa personnalité alors la photographie est le média idéal pour documenter. Ce n'est pas une idée nouvelle pas plus que collectionner des choses mais personne ne le faisait à Hong Kong avant moi.Ca aussi c'est en train de changer."

Collection « Hong Kong Corner houses » © Michael Wolf

Plus qu'un studio, un "Wunderkabinett", lieu de partage

Depuis l'année dernière, l'artiste-photographe s'est ancré un peu plus à Hong Kong en installant son propre studio à Chai Wan, un endroit ouvert au public sur rendez-vous, véritable lieu de rencontre et de découvertes. "J'ai été très productif ces 10 dernières années et j'en ai eu assez de ne voir le résultat de mon travail que sur mon écran d'ordinateur. J'ai pensé qu'il était temps d'avoir mon propre studio. Et comme je n'ai pas de galerie me représentant ici à Hong Kong, j'ai pensé que je pourrais en faire une salle d'exposition, une plateforme pour mon travail et mes collections ... Car en plus de mes photos, j'ai amassé au cours de ma vie une énorme collection de toutes sortes d'objets. C'est un peu l'idée du ?Wunderkabinett' (cabinet de curiosités) dont chaque chose a une histoire prête à être racontée, une autre forme de communication."

C'est dans cet antre que le photographe vient de lancer son nouveau livre et l'endroit où vous pourrez le rencontrer si l'envie vous prend et nul doute qu'avec un peu de curiosité, les sujets de dialogues ne manqueront pas.

Sophie Mabru (www.lepetitjournal.com/hong-kong) mercredi 26 mars 2014

Infos pratiques:

Hong Kong Trilogy

Michael Wolf's studio : Kailey Ind'l Building, Block A, 5/F, unit4, 12 Fung Yip Street, Chai Wan, Hong Kong

Contact: Sarah Greene, sarah@bluelotus-consultancy.com, + 852 6100 1295

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