En affichant, le 31 octobre 1517, ses 95 thèses contre les indulgences sur la porte de l'église de Wittenberg (Saxe), Martin Luther n'a pas uniquement déclenché et accéléré le développement d'une nouvelle religion chrétienne : cet acte a en même temps profondément influencé le cours de l'Histoire allemande et européenne, sans que l'auteur des thèses ait pu se rendre compte de l'envergure de sa démarche. L'Allemagne fête le 500ième anniversaire de la Réforme de Luther. Voici le premier volet d'un dossier en quatre parties sur Luther et la Réforme.
"C'est une invention humaine, de prêcher que sitôt que l'argent résonne dans leur caisse, l'âme s'envole du Purgatoire."
Telle fût la formulation de la thèse 27. Le but du combat de Luther n'était pas du tout de créer une nouvelle religion, au contraire, il ne s'élevait que contre certaines pratiques de l'Église catholique, ne voulait que réformer l'Église chrétienne existante. Ses principales cibles étaient la doctrine prédominante ainsi que le luxe exorbitant des représentants religieux. Selon lui la doctrine officielle ne respectait pas suffisamment le texte de la Bible, notamment du Nouveau Testament. La traduction de la Bible en langue allemande le préoccupera toute sa vie. En ce qui concerne l'autre aspect, le luxe, il se révoltait contre le symbole de l'abus de la foi : le commerce des indulgences. L'argent requis ainsi servait entre autre à pouvoir payer les dettes des archevêques auprès des marchands et banquiers tels que la famille Fugger. Motif déclencheur de Luther : Le prêtre dominicain Johann Tetzel fut chargé de la prédication en faveur de la vente des indulgences organisée par le Saint-Siège pour pouvoir achever la reconstruction de la basilique Saint-Pierre de Rome. Son fameux slogan "Sobald das Geld im Kasten klingt, die Seele in den Himmel springt!" (Aussitôt que l'argent résonne dans la caisse, l'âme s'envole du Purgatoire) faisait partie de son répertoire rhétorique.Pour obtenir un maximum d'indulgences, Tetzel, orateur doué, n'hésitait pas à évoquer de toutes les couleurs les tourments du Purgatoire et les souffrances des pêcheurs. Ses mots trouvèrent un sol fertile auprès de la population soumise, pauvre et ignorante.
Des débuts en droit dictés par les ambitions du père
Qui était donc Martin Luther, cet homme admiré par les uns, critiqué et condamné par les autres, qui réveille les discussions encore de nos jours ? Ce qui ne fait pas de doute : c'était un homme tenace, courageux, entêté et même obsédé, tourmenté par des doutes durant toute sa vie. Son engagement pour la cause religieuse ne lui a pas été donné dès le berceau ? tout au contraire. Né le 10 novembre 1483 à Eisleben, aujourd'hui en Saxe- Anhalt, il est le fils aîné d'un homme d'origine paysanne qui est devenu mineur, plus tard propriétaire de mines de cuivre et d'une fonderie et qui a ainsi acquis le statut de bourgeois et de magistrat. Comme C'était un homme très ambitieux qui s'attendait à ce que ses fils suivent son exemple. Martin, l'aîné, était prédestiné à devenir juriste pour pouvoir plus tard s'occuper de la gestion de l'entreprise familiale. C'est pourquoi le jeune Martin suivra des études primaires et secondaires dans les écoles latines de Mansfeld, Magdebourg et Eisenach (aujourd'hui Saxe- Anhalt et Thuringe). A la fin de ses études il savait couramment lire, écrire et parler le latin. En 1501, à l'âge de dix-huit ans, il entre à l'université d'Erfurt, où il obtient un diplôme de bachelier en 1502 et une maîtrise en 1505, conditions préalables pour commencer les études de droit. Il poursuit les ambitions de son père, mais s'intéresse parallèlement intensément aux questions théologiques et philosophiques.
Un événement qui bouleversera complètement sa vie
Le 2 juillet 1505, après une visite de ses parents, il est sur le chemin de retour vers Erfurt lorsqu'il est surpris par un terrible orage, en pleine campagne. Pris de panique et craignant la mort, il s'adresse à Sainte Anne, la mère de la Vierge Marie, l'implore de le sauver et lui promet de se faire moine s'il s'en sort indemne. Réalité ou légende, Luther lui-même argumentera ainsi sa décision radicale, surprenante pour son entourage. Tout en tenant sa promesse il quitte l'université contre la volonté de son père qui se met dans une colère noire à l'égard de son fils dont l'avenir était pourtant si prometteur. Il entre dans une confrérie augustinienne à Erfurt le 17 juillet 1505 où il est tellement sérieux et appliqué en poursuivant les règles de l'Ordre qu'il est ordonné prêtre moins de deux ans plus tard. Sa décision et sa carrière à l'intérieur du couvent ne lui épargnaient pourtant pas de profonds doutes, de graves conflits de conscience. Toutes les pratiques que lui offre l'Église, telles que messes, confessions et jeûnes ne contribuent pas à la libération de son sentiment de culpabilité. Vu le zèle et la souffrance, la volonté d'approfondir les questions de la "vraie" croyance, il est envoyé à l'université de Wittenberg pour y poursuivre des études de théologie. Par la suite Luther fait carrière, il est chargé de tâches variées, ses trois activités principales seront l'enseignement, la prédication et la recherche personnelle.
Photo © DcoetzeeBot/wikipedia)
Ingrid Frieg (www.lepetitjournal.com/francfort), lundi 21 août 2017
Mise à jour du mardi 28 mars 2017
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