

Dans une petite rue piétonne de Temple Bar, un peu écarté, à l'abri de l'effervescence du célèbre quartier, se trouve un restaurant aux saveurs méditerranéennes, La Dolce Vita. Ce bar à vin a ouvert il y a tout juste deux mois. L'un des deux patrons, Thibaud Harang, originaire de Toulouse, nous a reçus pour nous faire découvrir son univers : l'authenticité et la simplicité du terroir franco-italien.
Racontez-nous un peu votre parcours pour en être arrivé-là.
J'ai suivi un cursus plutôt classique dans une école hôtelière à Toulouse. A cette époque elle faisait partie des meilleures formations de France. J'ai fait un parcours à l'étranger, la plupart du temps dans des restaurants étoilés, c'est comme ça que j'ai atterri à Dublin. J'avais 18 ans et je ne parlais pas un mot d'anglais. Mais par la suite, j'ai réussi à être embauché dans le restaurant où je faisais mon stage. De 2000 à 2008, la capitale a connu un essor économique considérable, on pouvait être recruté facilement et gagner des salaires mirobolants. Toutes les raisons étaient bonnes pour que je reste travailler en Irlande. Et ça va faire maintenant près de 16 ans que je vis ici.
Qu'est-ce qui vous a donné le goût de travailler dans la restauration?
Au début c'était l'envie de m'évader et de partir de mon petit village natal. Car c'est un métier où on a l'opportunité de voyager facilement, au sens propre, mais aussi à travers les plats qu'on prépare. Pour moi, la cuisine est synonyme de découverte. C'est un métier noble, de goût et d'éducation. Dans l'hôtellerie traditionnelle, par exemple, on doit adopter le côté « vieille France », avec des règles qui sont souvent très strictes, où tout le monde doit se vouvoyer?
Mais j'ai toujours aimé cuisiner. Quand j'étais plus jeune je me préparais mes petits plats, car ma mère était très prise par son travail. Ma première idée était de devenir cuisinier, mais j'ai vite changé d'avis. Dire « oui chef ! » à une personne qui te hurle dessus à longueur de journée ça ne m'a pas forcément plu, c'était sûrement mon côté rebelle de l'époque. Du coup, j'ai préféré m'orienter vers le service et l'?nologie.
Parlez-nous désormais de l'histoire de La Dolce Vita, comment vous est venue l'idée d'ouvrir ce restaurant ?
Ça s'est fait vraiment par hasard. Mais au fond de moi j'ai toujours voulu avoir mon propre restaurant. On va dire que ça fait partie de l'évolution du métier : soit tu restes employé, soit tu deviens ton propre patron.
La Dolce Vita existait déjà sous forme de restaurant italien. J'y allais souvent avec des amis, c'était un peu notre endroit de prédilection. Un jour, le patron a voulu vendre le restaurant et mon ami, Enrico, m'a demandé si ça m'intéressait de reprendre l'affaire avec lui. C'était l'occasion ou jamais de se lancer. On a donc conservé le même nom et le même esprit. Ce qui a permis à quelques clients fidèles de garder plus ou moins leurs habitudes. En plus, le restaurant est vraiment bien situé. On est dans le quartier de Temple Bar mais du côté paisible et moins tumultueux. Cette rue est un vrai petit bijou.

Quelles valeurs et cuisine voulez-vous partager dans votre restaurant ?
Authenticité et simplicité. On veut transmettre des saveurs simples mais avec des produits de très bonnes qualités. On a la chance d'avoir des légumes, du fromage fraîchement importés d'Italie chaque semaine, ou encore de la rhubarbe de mon jardin en France. Il y a une histoire derrière nos aliments. On est épicurien dans l'âme donc on aime bien manger et boire, on veut que ça se ressente dans les assiettes.

Notre idée était d'allier l'influence culinaire italienne et française, le bar à vin s'y prête parfaitement. On a voulu créer une ambiance relativement détendue où on peut apprécier sa planche de charcuterie ou de tapas autour d'un bon verre de vin après le boulot entre amis, quelque chose de totalement convivial. C'est Enrico surtout qui s'occupe de renouveler les menus. Nous avons près de 75 vins à la carte et nous connaissons la plupart de nos producteurs, il y a un véritable suivi de nos produits. D'ici la rentrée nous aimerions apporter des nouveautés à la carte avec des produits plus nobles comme la truffe ou le foie gras.
Pourquoi avoir choisi l'Irlande pour ouvrir votre premier restaurant et pas la France, par exemple ?
Retourner en France n'était pas à l'ordre du jour. Et personnellement, je ne voulais pas tenter ma chance là-bas vu ce que certains de mes collègues m'ont raconté. Beaucoup sont passés du restaurant gastronomique à la simple pizzeria à cause des charges relativement élevées. Je pense également que la mentalité dans le domaine de la restauration n'est pas la même ici qu'en France. Il y a une facilité de travailler et de communiquer en Irlande qu'on ne trouve pas dans notre pays. La restauration demande énormément d'organisation et d'énergie. En France, certains serveurs sont à bout de nerfs car on les sollicite beaucoup trop à cause du manque d'effectifs et en viennent à se plaindre devant les clients.
L'Apéro !
Votre cuisine attire quel type de clientèle ? Est-ce que ça plaît ?
Pour le moment ce sont surtout des Français, des Italiens ou des Espagnols qui viennent manger chez nous. C'est un bon moyen pour eux de se remémorer les produits de leur terroir. Et les hôteliers représentent environ 40% environ de notre clientèle. Concernant les Irlandais, ils sont en train de changer leur façon de se restaurer depuis une bonne dizaine d'années, ils ont leurs habitudes alimentaires (take away, pizzas?), mais en général ils aiment essayer les nouveautés : c'est l'effet grande ville, toujours à la recherche du nouveau bar branché? Pour le moment on pense être sur une bonne voie. Cela fait environ deux mois que nous avons ouvert et nous arrivons à tenir nos objectifs. Les trois premières années pour un restaurant sont cruciales, nous verrons bien comment les choses évolueront.
Vous prévoyez d'organiser des événements dans votre restaurant pour attirer du monde, pourriez-vous nous en dire plus sur le prochain à venir, L'Apéro ?
Alors le principe est simple, il s'agit de partager dans la joie et la bonne humeur un apéritif typique à la française. L'apéro comprend une assiette de tapas, un verre de kir et un bol de cacahuètes. C'est 9,50? par personne sur réservation. Si le concept marche nous aimerions reproduire ce genre d'événement une fois par mois. Notre premier apéro se tiendra le jeudi 11 août à partir de 18h30. C'est convivial et ça rappelle la France ! (Détails de l'événement : https://www.facebook.com/events/612801395567181/)
Pour votre avenir, avez-vous des projets en perspective ?
Je pense qu'on va d'abord s'assurer que ce restau marche. D'expérience dans le métier, on a appris qu'il ne fallait jamais aller trop vite. On va essayer de maîtriser le sujet pour l'instant. Mais si un jour je devais partir m'installer quelque part, ça serait l'île Maurice. J'adore le soleil, je suis passionné de plongée sous-marine. Allier la cuisine et la plongée serait un de mes rêves.
Eloïse Robert (lepetitjournal.com/dublin)
Crédit photos : Eloïse Robert







