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Paul Rodriguez : le voyageur (presque) immobile

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© Stéphane Tourné
Écrit par Irène Idrisse
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 6 janvier 2021

On dit les Bretons grands voyageurs : Paul Rodriguez confirme l’adage. Vivant son statut d’expatrié « depuis maintenant  20 ans » que ce soit en Chine, Côte d’Ivoire ou au Bénin, il est établi au Sénégal  «depuis un an et demi » ; pays  à partir duquel il officie en tant que chef d’escale pour la compagnie Air France. L’homme qui professe « un  rapport d’amour et de passion » pour le ciel, revient ici sur son métier : de  ce qu’il est à ce qui l’y a amené, et nous donne son point de vue quant au nouvel et controversé aéroport Blaise Diagne.

De quelle origine êtes-vous ?

Breton de mère, Espagnol Pied-noir de père.

D’où veniez-vous ?

De Pékin en Chine.

Le Sénégal est-il votre premier séjour à demeure en Afrique ?

Non c’est le 3ème après la Côte d’Ivoire de 1997 à 2000  et le Bénin de 2000 à 2005.

En quoi exactement consiste votre travail ?

Je suis en charge de la mise en œuvre des opérations et du suivi des activités de la compagnie Air France à l’Aéroport International Blaise Diagne.

« Chef d’escale » est-il le poste que vous avez toujours occupé ? Si non, quels furent vos précédents postes ?

Le poste de chef d’escale n’est qu’un des métiers parmi tant d’autres qu’un cadre principal est amené à exercer au sein des métiers dits « de l’exploitation » dans notre jargon du transport. J’ai ainsi démarré comme coordonnateur et technicien masse et centrage, en charge de procéder au centrage de l’avion et de la coordination des activités ; j’ai été adjoint chef d’escale, délégué fret, responsable Pôle avion, chef d’escale régional…

Dans quel autre pays avez-vous exercé en tant que chef d’escale ?

Au Bénin, en Israël et en Chine.

Selon vous, de par le climat mondial, le volet sécurité est-il devenu plus prégnant ?

Vous voulez certainement parler de sûreté, en liaison avec la problématique terroriste islamiste. La sûreté est (hélas) un sujet qui est au cœur de nos préoccupations depuis très longtemps ; j’y ai personnellement été confronté depuis 1989 et l’attentat du DC10 d’UTA ; le chef d’escale est par ailleurs responsable de la mise en œuvre et du suivi des mesures de sûreté appliquées par Air France dans le monde entier.

Votre travail représente de conséquentes responsabilités. Comment les vivez-vous ? Comment les gérez-vous ?

Elles font partie intégrante de notre métier et c’est aussi cela qui rend ce dernier passionnant. Je les vis très bien et ai fêté mes 31 ans de compagnie en octobre 2017. Il faut simplement faire la part des choses et équilibrer son activité entre le quotidien, les sujets d’envergure tels que celui que nous venons de vivre avec le déménagement dans ce nouvel aéroport et bien sûr la vie familiale.  

 

Je suis un grand fan de l’expression : le Soleil se lève tous les matins… 

 

Paul-Rodriguez-Air-France-Dakar

 

De par les enjeux, est-ce un travail qui vous occupe l’esprit 24 h sur 24 ? Est-ce stressant ?

Je dors très bien, donc pas H24 mais OK pour 18h/24h. Effectivement, il est très difficile de « décrocher » et le téléphone est quant à lui, branché H24. Encore une fois, tout est question d’équilibre et de gestion de ce stress.

Comment faites vous pour décompresser ?

Je ne fais pas de « plans sur la comète » et mon naturel optimiste m’aide à beaucoup relativiser. Je suis un grand fan de l’expression : le Soleil se lève tous les matins… 

Restons dans la décompression, trouvez-vous de quoi satisfaire vos passions - si vous en avez - au Sénégal ?

Je pratique le tennis et la natation, donc pas de soucis pour ce faire au Sénégal. Netflix est disponible pour assouvir ma passion des séries télé. Le réseau routier permet par ailleurs de découvrir le pays, donc ma passion de découverte de nouveaux paysages et modes de vie est également bien satisfaite.

Qu’est ce le fait de vivre au Sénégal a-t-il changé à vos habitudes ?

Mes habitudes sont forcément liées à mes 20 ans de vie d’expatrié et à ce titre le fait de vivre au Sénégal n’a pas changé grand-chose à ma vie de globe-trotter.

Vous êtes passionné par les avions, entre autres choses. Est-ce là le métier que vous rêviez d’exercer lorsque votre passion pour les avions s’est déclarée?

Des problèmes de vue m’ont depuis tout petit fait réaliser que je ne pourrai jamais être pilote et ce métier de chef d’escale m’est apparu comme une évidence en terminale lorsque j’ai commencé à me demander ce que j’allais bien pouvoir faire comme métier lié à l’aviation. Un certain Antoine de St Exupéry a ainsi exercé ce métier en Mauritanie et ses exploits de sauveur de pilotes, otages des tribus nomades du désert, ont certainement  éveillé une certaine fibre aventurière.

Pouvez-vous nous relater comment votre passion pour les avions est née ?

Une voisine d’enfance était la mère d’un des premiers pilotes brevetés, en 1938, de l’aéroclub de Morlaix en Bretagne, où j’ai passé toute mon enfance. Son fils est mort en héros, comme pilote de chasse sur le front russe en 1944 au sein de la célèbre escadrille Normandie-Niémen. Elle m’a donné accès à toutes les archives dont elle disposait sur son fils. Par ailleurs, les avions de la base aéronavale de Landivisiau pratiquaient leurs exercices en vol au-dessus de la maison.

Revenons à votre profession : qu’est ce que le travail de chef d’escale représente pour vous ?

La parfaite combinaison entre le côté technique d’un métier qui demande une rigueur exemplaire sur le plan de la Sécurité et de la Sûreté des vols, le côté commercial lié au traitement de nos clients et le côté humain lié à l’encadrement et la gestion d’une équipe : 30 personnes pour l’escale Air France de Dakar.

Si l’on devait faire une estimation, au cours de l’année 2017 combien de temps êtes vous resté au sol?

Par définition ce métier est un métier de « rampant » donc je suis tout le temps au sol, sauf pour les voyages professionnels, assez rares, ou mes voyages de loisirs, plus fréquents.

Comprenez-vous que les non initiés aient du mail à saisir que l’on puisse embrasser une carrière ayant trait à l’aviation pour rester à quai,  sauf évidemment lorsque l’on désire être mécanicien ?

Cela fait partie du paradoxe d’une activité de transport souvent sublimée mais que les profanes limitent aux métiers de pilotes et d’hôtesses de l’air !

Vous arrive t-il dans un élan, de vouloir partir avec un vol qui s’en va ?

Oui mais surtout s’il agit d’un avion de chasse, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’une pièce de collection.

Quel rapport entretenez-vous avec les voyages et le désir de partance ?

Les voyages et le désir de partance et de voir et découvrir autre chose ont été et resteront un des fondements de mon mode de vie et ce ne sont pas 20 ans de vie d’expatrié qui me feront dire le contraire.

Quel rapport entretenez-vous avec les airs ?

Un rapport d’amour et de passion.

Et avec la terre ou plus trivialement : le plancher des vaches ?

Je dirais plutôt la mer, origines bretonnes et pêcheurs espagnols obligent.

Depuis quand la compagnie Air France atterrit-elle effectivement sur la piste de l’aéroport Blaise Diagne ?

Depuis le jour de son ouverture, le 07 décembre 2017.

Avez vous des plaintes de passagers quant au fait qu’au lieu de descendre dans la capitale, après atterrissage, ils sont désormais obligés de faire des kms avant d’arriver dans cette même capitale ?

Oui bien sûr, mais c’est le lot de la majorité des aéroports des capitales internationales. Ces derniers ne peuvent que très rarement croître au sein de villes et de métropoles.

Que pensez-vous des différents bémols au niveau du nouvel aéroport ?

Ce sont des pêchés de jeunesse, 3 mois de plus auraient certes permis de gagner en sérénité et en robustesse d’exploitation, mais je pense que dans quelques mois, on ne pensera qu’à louer les aspects positifs de cet aéroport et oublier ses inconvénients.

Quelle est votre pire expérience en matière de travail ?

L’accueil et l’accompagnement de familles de victimes d’évènements liés à des accidents aériens ou d’actes terroristes.

Enfin, en matière d’avion, préférez-vous les voir arriver ou les voir partir ?

Les voir partir, j’adore la majesté d’un avion s’envolant.

 

Paul-Rodriguez-Air-France-Dakar

 

Bd : Buck Danny et Tanguy et Laverdure bien sûr.

Série tv : la 4ème dimension (années 60)

Musique : Rock gothique et techno transe.

Avion (modèle d’avion) : Spitfire et les  avions de chasse de la Seconde Guerre Mondiale en général.

Moment (de la journée) :  la fin de soirée, au soleil couchant.

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