Édition internationale

COMPAGNONS DU DEVOIR – À la rencontre d’Etienne, charpentier

Écrit par Lepetitjournal Cologne
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 6 avril 2016


Lepetitjournal.com Cologne a eu l’occasion de rencontrer Etienne, charpentier-aspirant chez les Compagnons du Devoir, qui a choisi l’Allemagne pour son voyage à l’étranger. C’est donc à Cologne que nous avons pu l’interviewer, non loin de ses chantiers, où il nous a fait part de sa vision bien à lui des rapports humains, de l'Europe et de l’Allemagne. Installé dans la région depuis mai 2015, il tire le bilan d’une année enrichissante passée à l’étranger, entre construction de charpentes et de relations humaines.

 

Etienne Chorain

Lepetitjournal.com Cologne : Pourquoi avoir choisi l’Allemagne ? 

Etienne : Dans le cadre de mon cursus de charpentier, j’avais la possibilité de partir un an à l’étranger. Outre les destinations exotiques proposées, j’ai choisi l’Allemagne pour pouvoir progresser dans mon métier, mais aussi par curiosité vis-à-vis de nos voisins. Un pays que je ne connaissais pas et qui m’a toujours intrigué, en tant que père fondateur de l’Europe au côté de la France.

De plus, j’ai toujours été bercé par Arte, donc je vois un peu plus loin que le cliché de l’Allemand qu’on retrouve dans nos comédies françaises et qui ne donne pas forcement envie de découvrir ce pays.

Du point de vue de la charpente, l’Allemagne est assez riche au niveau de la construction du bois, différente de la conception latine de la charpente. Cela fait 40 ans qu’ils font de la construction bois, ils ont donc plus d’expérience et beaucoup de recul en la matière.

L’amitié franco-allemande, c’est quelque chose qui vous parle ?  

Oui. Ces deux pays ont un lourd vécu et un potentiel important pour montrer au reste du monde comment on peut vivre en harmonie et échanger. Je ne dirais pas que ce qu’on voit politiquement est toujours ce qui se fait de mieux mais nous, en tant que peuple, on doit être unis, évoluer ensemble, et tirer de la force de chacun.
Les erreurs du passé sont selon moi, l’œuvre des politiques, et non des peuples. C’est donc aujourd’hui en tant que peuple qu’il faut montrer l’exemple, et se désolidariser des politiques quand quelque chose ne nous convient pas.

Comment voyez-vous l’avenir de l’Europe ?

Actuellement je suis un peu pessimiste sur la politique européenne, mais quand je vois la facilité qu’on a à voyager, à rencontrer d’autres personnes d’Europe, l’envie qu’on a de vivre ensemble, je pense qu’il est possible de réaliser de belles choses. Il faut juste ne pas se bloquer sur la vision politique de l’Europe mais bien sur la vision d’Europe des peuples, sur le plan social et culturel, en passant au-dessus des clichés.

Pour avoir passé plus d’un an avec mes collègues ici, on arrive au final à la même humanité. On a pas forcement les mêmes codes, mais on est tous pareils. On parvient à se comprendre, s’entendre, à passer du bon temps ensemble et surtout à construire ensemble.

Comment s’est déroulée votre année allemande ? 

Je suis arrivé dans le cadre d’un "Tour de France" chez les Compagnons du Devoir, organisé de manière à ce que le premier mois soit uniquement des cours de langues. Je suis parti de zéro en allemand et puis j’ai du faire mon entretien d’embauche en allemand.

Qu’est-ce qui vous a marqué au niveau des différences culturelles ? 

Ce qui est marquant c’est le sens des responsabilités des Allemands en tant qu’homme et femme de raison dans la société. Beaucoup plus conscients de son impact, beaucoup plus respectueux. En France il y a cet esprit "si c’est pas moi, un autre le fera".

L’exemple basique est celui du feu rouge. Si on ne traverse pas au feu rouge en Allemagne, c’est pour montrer l’exemple aux plus jeunes. C’est important de se rendre compte qu’on construit notre société surtout avec nos actes. Le meilleur moyen reste donc d’être un exemple.  À ce niveau-là, je trouve donc le côté "rigueur allemande" très positif.  Je pense qu’on aurait beaucoup à apprendre.

Votre meilleur souvenir ?

On était sur un chantier avec un collègue allemand, et un soir, en refaisant le monde. Il m'a dit dit : "c’est très important pour moi le fait qu’on s’entende, et que tu fasses l’effort de t’intéresser à notre culture, d’apprendre notre langue". Il a 45 ans, c’est un type de la campagne, il n’était pas prédisposé à avoir cet amour de la rencontre avec l’étranger. Mais à ce moment-là, j’étais convaincu d’être à ma place ici. C’était vraiment un partage, un échange, et deux esprits ouverts. Ce fut une belle rencontre.

Quels sont vos projets ?

J'irai ensuite en Bretagne, faire mon chef-d’œuvre. Une étape nécessaire chez les Compagnons du Devoir (Chez l’Association ouvrière des compagnons du devoir et du tour de France exactement ndlr). Ensuite, il faut prendre un poste à responsabilité chez les Compagnons, soit en encadrant une corporation de charpentier dans une maison (rôle d’accompagnement) soit être maitre de stage, en formant les jeunes qui passent le C.A.P, ou encore être directeur d’une maison de compagnon, où l'on gère le côté administratif pour les jeunes.
Tout est lié à l’apprentissage et la retransmission vers les jeunes.

Vous vous régalez chez les Compagnons ?

C’est très intense, parfois dur, mais riche en relations humaines et synergie, qui fait qu’on ne se rend pas forcément compte que l’on travaille. Ça développe la confiance, le surpassement de soi, l’aspect familial. C’est une grande famille. Je ne connais pas d’autres structures où lorsqu'on va dans un autre pays, quelqu’un nous ouvre sa porte, nous invite à manger chez lui, nous soutient en cas de doutes ou est présent pour partager de simples moments.

Propos recueillis par Benjamin Hardy (www.lepetitjournal.com/Cologne) Jeudi 7 avril 2016

 

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Publié le 6 avril 2016, mis à jour le 6 avril 2016
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