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LES RENDEZ-VOUS DE L’ÉCO - Dominique Cherpin, cofondateur de la Villafrance à Cologne

Écrit par Lepetitjournal Cologne
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 13 janvier 2014

 

L'aurait-on presque oublié, la France et l'Allemagne restent l'une pour l'autre les partenaires commerciaux numéro un. La Rhénanie-du-Nord-Westphalie compte en 2012 environ 515 entreprises françaises inscrites au registre du commerce, dont plus de 75 % situées dans les secteurs de Cologne et Düsseldorf1. Pour inaugurer sa nouvelle rubrique « Les rendez-vous de l'éco », à paraître tous les deuxièmes lundis du mois dans Lepetitjournal/Cologne, la rédaction a choisi de s'entretenir avec Dominique Cherpin, cofondateur de la Villafrance à Cologne. Le directeur de ce premier centre d'affaires privé franco-allemand nous a confié sa clé du succès : aimer l'Allemagne.

Lepetitjournal.com Cologne : Monsieur Cherpin, imaginiez-vous, en arrivant à Stuttgart en 1994 au service de ERAI Deutschland (Entreprise Rhône-Alpes International) puis à Cologne en 1995 pour un Volontariat International en Entreprise (V.I.E. chez Ubifrance) que vous y resteriez faire votre vie?
Dominique Cherpin : Non, c'est un hasard de la vie et des affaires? Chacun cherche au début de sa vie professionnelle un angle d'attaque. Le mien a été dès le départ de travailler pour des intérêts français à l'étranger. Puis, à Cologne, j'ai rencontré mon épouse, une Allemande, nos enfants sont nés, cela a contribué à me faire investir dans une vie ici.

Qu'est-ce qui vous a inspiré lorsqu'en 2005 vous créez avec l'avocat Dr. Christoph Kühl la Villafrance à Cologne, le premier centre d'affaires privé franco-allemand ?
Dès le début, l'idée était de constituer un regroupement de prestataires individuels, de leur faire partager un lieu commun et de mutualiser des compétences. J'ai rencontré Christophe Kühl en 2002, en 2003 nous avons décidé de nous associer et d'acheter la première Villafrance. C'était un parti pris pour l'engagement mutuel à long terme et un pari sur l'avenir. En 2012, nous nous sommes agrandis avec la Villafrance II. En 2014, l'effectif de la Villafrance dépassera les 100 personnes et nous réfléchissons à l'ouverture de la Villafrance III

Environ 400 entreprises françaises font appel chaque année aux prestataires de la Villafrance. Combien d'entre elles créent véritablement une filiale ou une entreprise en Allemagne ?
La majorité des 400 entreprises qui nous contactent chaque année a une demande très spécifique : de réorganisation, d'embauche, d'étude de marché, etc. Cela dit, le point d'ancrage que nous essayons de vendre est Cologne, avec des activités nationales. Aujourd'hui, nous avons 80 sociétés domiciliées à la Villafrance, dont une vingtaine avec des employés sur place.

Quels rapports entretenez vous avec Ubifrance, l'Agence française pour le développement international des entreprises ?
Nous sommes un centre d'affaires 100 % privé, mais coopérons souvent avec Ubifrance, dont le bureau allemand est à Düsseldorf. Le mariage entre privé et public est tellement problématique en France que quand ça marche, cela mérite d'être souligné. Ubifrance a pour mission de répondre à beaucoup de dossiers de façon ponctuelle, alors que nous sommes formatés sur des prestations inscrites dans la durée.

Que faut-il selon vous pour qu'une implantation à long terme en Allemagne se passe bien ?
En principe, il faut trois choses : Premièrement, un produit français capable d'être vendu sur le marché et un marché qui absorbe ce produit-là, ce qui déjà ne va pas de soi. Ensuite, il faut qu'il y ait une organisation dans l'entreprise qui croit en l'Allemagne et qui aime l'Allemagne. Aimer, c'est le bon mot : si l'on ne va pas à la rencontre du pays et des gens, ça ne marchera jamais. C'est une erreur de croire qu'au fil du temps, nous, les Français et les Allemands, soyons devenus de plus en plus pareils. Traverser la frontière peut être aussi déboussolant que de faire le tour du monde en sac à dos, et le marché allemand nécessite un peu de patience, de volonté pour y arriver. Troisièmement, il faut avoir des personnes sur place qui soient capables de représenter tous ces intérêts. L'addition de ces trois facteurs n'est pas toujours aisée.

Et induit probablement un certain taux d'échec?
Environ un tiers des entreprises arrête au bout d'un an ou deux, car encore une fois, investir de l'argent ne suffit pas. Un autre tiers trouve une solution intermédiaire via un réseau de commerciaux allemands et enfin il y a le tiers de ceux, où toute la chronologie du dossier s'est bien passée, avec un marché bien compris, l'installation d'une structure légère, un V.I.E. bien soutenu et content de son expérience, qui trouve des multiplicateurs et qui est embauché. Le marché allemand est lui-même un facteur d'ouverture : la carte allemande est aussi une porte vers d'autres marchés, tels que les Pays-Bas ou vers l'Europe de l'Est.

Votre secret pour réussir ?
J'aime bien nous définir comme des bricoleurs professionnels. C'est aussi une différence franco-allemande. A mon sens, il faut savoir répondre à l'imprévu de tous les jours sans non plus être dans l'improvisation permanente. Ceux qui ne font que prêcher la professionnalisation peuvent faire peur à des bricoleurs français, mais sans un minimum de format face aux Allemands, ce n'est pas possible non plus.

Nous sommes ici dans un hôtel particulier classé monument historique, avec une tourelle et des parquets qui grincent. Quel rôle joue-t-il dans ce secret?
Un bâtiment qui date de 1894 est chose rare à Cologne, mais curieusement, personne n'en voulait. Les purs professionnels préfèrent souvent des choses bien propres, carrées, modernes. Ici, rien n'est carré ni droit. C'était important pour notre concept. Nous voulions un lieu qui symbolise un espace individuel, privé, avec une histoire, donc ancré dans la durée. L'on dit que le maire de Cologne s'est caché dans la tour pendant la Guerre, il y a encore bien d'autres d'histoires. C'est un lieu dans lequel nous voulions faire le lien entre le professionnel et le personnel, le travail et la convivialité. Le fait de se voir tous les jours, de travailler et d'exposer sur des salons ensemble, mais également d'organiser des fêtes de Noël, de Carnaval et maintenant aussi la Fête de la musique, contribue à forger un esprit d'équipe. La Villafrance c'est une WG* professionnelle, où chacun se sent responsable du bien commun, où chacun doit vivre et travailler avec les autres.

Propos recueillis par Astrid Nierhoff (www.lepetitjournal.com/cologne) Lundi 13 janvier 2014

1 Source: IHK Rheinland, Zuhause am Rhein: Ausländische Unternehmen im Rheinland, avril 2011. URL (consulté le 5.06.2013):
http://www.rheinland.ihk.de/upload/Auslaendische_Unternehmen_im_Rheinland_13692.pdf
* Wohngemeinschaft: la colocation.



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Publié le 13 janvier 2014, mis à jour le 13 janvier 2014

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