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PATRIMOINE : Le Maroc des années 1950, chantier d’expérimentation pour le logement collectif

Écrit par Parler Darija
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 25 novembre 2009
Encore quelques jours pour découvrir la très belle exposition "Dans le désert de la modernité. Contributions de Casablanca à la modernité européenne", organisée par l'association Casamémoire, en collaboration avec la Haus der Kulturen der Welt (la maison des cultures du monde) de Berlin

Cette exposition nous offre une mise en perspective intéressante, mêlant études et stratégies des architectes d'après-guerre avec des photos et témoignages de cette époque coloniale et post-coloniale . On y comprend la relation intime qui existe finalement entre l'habitat privé, et l'espace public et politique.   

Carte postale. Centre ville de Rabat, années 50 (Merci à Elie)


L'habitat pour le plus grand nombre

A la fin des années 1940, la multiplication des bidons-villes autour de Casablanca, conséquence de l'exode rural important que connaît le Maroc à cette période, pousse les autorités du Protectorat à adopter un nouveau concept urbanistique, celui de "l'habitat pour le plus grand nombre".

Inventé et développé par Michel Ecochard (1905-1985), architecte et urbaniste, ce principe est immédiatement mis en ?uvre, tant l'urgence de la situation le nécessite. C'est ainsi que des nouveaux projets de constructions de grands ensembles voient le jour, notamment quartier des Carrières centrales.

Comme l'écrit la chercheuse Letizia Capannini, du Laboratoire ACS de l'Université de Paris VIII, "le projet a comme objectif principal la création de différents types d'habitation pour musulmans, afin de leur offrir des maisons à patio qui respectent les habitudes traditionnelles. C'est ainsi que le programme architectural prévoit :
- La résorption provisoire des bidonvilles.
- La construction traditionnelle au rez-de-chaussée
- Des bâtiments en hauteur de conception européenne, avec ouvertures à l'extérieur, ou de conception traditionnelle, avec ouvertures et patios superposés".


De la kasbah aux HLM?

Très vite, les populations vont s'approprier ces espaces, les transformant, rajoutant des étages et des terrasses qui créent rapidement des conditions de vies difficiles, liées à l'humidité et au manque d'ensoleillement.
C'est alors que des architectes de la société ATBAT-Afrique, ont l'idée de s'inspirer des Kasbah, habitats traditionnels des Berbères, et dans lesquels vivaient auparavant plus de 80 % des populations nouvellement arrivées à Casablanca.


Kasbah Ait Ben Adou (photographie libre de droits, Guillaume Daveluy, pixibank)


L'observation des villages ruraux berbères, permet aux architectes de mettre en place un contrôle climatique des bâtiments, grâce à l'emploi d'espaces de transition entre intérieur et extérieur : "Ceux-là sont définis par des circulations, comme les coursives et les escaliers, ou par des espaces intermédiaires qui « prolongent le logis », comme les balcons, les loggias, les patios couverts? "(Letizia Capannini).

L'attention que l'équipe ATBAT-Afrique porte aux espaces intermédiaires est d'autant plus remarquable qu'elle contraste la production générale française de l'après-guerre, surtout dans le logement à haute densité où les éléments architecturaux intermédiaires (galeries, terrasses) ont tendance à disparaître dans la conception des grands ensembles, sous prétexte d'une meilleure rationalisation de l'espace.

Autre aspect novateur du projet : la prise en compte des classes d'âges, des différents statuts matrimoniaux, ainsi que de la situation économique des habitants.
Ce modèle d'habitat va ensuite s'exporter en Europe où, pour faire face à la croissance démographique, à l'expansion urbaine et aux besoins importants de logements, les pouvoirs publics ont encouragé à partir de la fin des années cinquante la construction de "grands ensembles,"notamment les HLM (habitation à loyer modéré).

L'exposition montre comment ces HLM ont été les lieux propices à la contestation et la révolte des populations : au Maroc, c'est du quartier des Carrières Centrales que seront organisées les premières manifestions anti-protectorat, tandis qu'en France, les habitants des HLM seront un soutien de taille pour le mouvement de l'indépendance Algérienne.

Et Le Corbusier de conclure : "Le travail de l'architecte, c'est de formuler les problèmes avec clarté".

Grégoire BROU. (www.lepetitjournal.com ? Casablanca), mardi 24 novembre 2009


Pour en savoir plus
: http://www.casamemoire.org/site/
L'exposition a lieu jusqu'au 30 novembre 2009, à la Fabrique culturelle des Abattoirs, angle rue Jaafar El Barmaki et rue des Oudayas, quartier Hay Mohamadi, Casablanca.
Renseignements au : 05 22 70 60 69







 
parler darija
Publié le 24 novembre 2009, mis à jour le 25 novembre 2009

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