Édition internationale

"Disparue" une chanson française sur la dictature argentine

1984, un an après la fin de la dictature militaire en Argentine (1976-1983), le titre "Disparue" est le premier gros succès musical de Jean-Pierre Mader. Vendue à plus de 250 000 exemplaires et 18ᵉ au Top 50 la chanson est un tube. Retour en interview sur une chanson que son auteur décrit comme "une pensée triste qui se danse".

JP MADER MARIE ANNE ERIZEJP MADER MARIE ANNE ERIZE
Gauche : Jean-Pierre Mader sur scène. Droite : Marie Anne Erize
Écrit par Alice Dubernet
Publié le 8 mai 2025, mis à jour le 9 mai 2025

 

Le Petit Journal : Racontez-nous comment s’est passé la création de cette chanson ?

Jean-Pierre Mader : Ce titre a été mon premier succès. J’avais envie d’avoir une chanson à double fond. C’est un titre qui parle à la fois d’un sujet grave, mais qui peut se comprendre aussi comme une histoire d’amour toute simple. Cette création elle est arrivée après mon premier album, qui n’avait pas du tout marché. Un soir je travaillais avec un copain, Richard Seff, qui avait déjà fait des tubes. On est allés voir le film de Costa Gravas "Missing" et en sortant Richard m’a chanté en français, avec l’air qui est maintenant dans la chanson : "disparue, elle a disparue". Là, c’était l’évidence. J’ai mis un son de bandonéon sur mon synthé, on a fait le brouillon de la chanson. Il n’y a pas grand chose, il y a quatre pistes dans ce morceau.

 

Comment avez-vous entendu parlé de Marie-Anne Erize ?

J’ai lu un article dans Libération à l’époque. C'était l’histoire de cette sublime mannequin, enlevée puis apparemment torturée. (Ndlr: à ce jour le corps de Marie-Anne Erize n’a jamais été retrouvé.) Et ça m’avait donné envie de faire cette musique. Ça et aussi tout ce que j’avais lu sur les mères de la Place de Mai et de tous ces enfants disparus, enlevés par les militaires. Puis ça m’avait marqué. Et « les escadrons de la mort » ce nom… (ndlr: les services armés qui organisaient en secret des enlèvements) 

 

Est-ce que cette chanson était un engagement volontaire contre la dictature argentine ?

C’est une chanson engagée malgré moi. Je n’étais pas là-dedans. Je ne me vois pas vraiment comme un chanteur engagé mais je le suis quand même. C’est comme dans Macumba, je n’ai pas fait exprès mais ça peut être pris pour une chanson qui a un certain engagement. J’aime bien quand même, ça me correspond bien ce côté passif-actif. Effectivement je suis un chanteur engagé sans le savoir. 

 

La rime sur les Ford Falcon est mythique et précise, comment l’avez-vous trouvé ?

L’idée des Ford Falcon, ces voitures utilisées par les escadrons de la mort ça a été soufflé par mon ami Maxime Ruiz. Il était photographe et argentin. Il a fait mes premières pochettes et il nous avait parlé des Ford Falcon et des enlèvements. Et quand j’ai écrit la phrase "avec deux hommes"… Il fallait une rime riche et on a galéré. Maxime s’est souvenu de ça et il m’a dit "dans une Ford Falcon". J’ai trouvé ça magique. Au début quand je chantais la chanson en France personne ne connaissait, quand je tendais le micro au public j’entendais « floflaflone ».

 

Vous êtes déjà venu en Argentine ?

C’est le travail de ma femme qui nous a fait venir. Sans ça je ne serais pas venu, parce que j’ai très peur de l’avion. Mais quand mon épouse m’a dit qu’elle allait faire des conférences à Buenos Aires… C’était le moment. C’était fou, de se sentir si près de quelque chose qu’on a imaginé. Pour moi avant c’était une Argentine seulement de fantasme et là je l’ai touché du doigt : Palermo, La Boca, on se promenait dans les rues, on a pas arrêté. J’aimerais, d’ailleurs, faire une version avec quelqu’un là-bas. Une guitare, une voix. Avec une fille ou un garçon je sais pas, qui chante en espagnol et moi un bout en français. Ce serait génial.

 

Chantez-vous encore Disparue dans vos concerts ?

Oui ! Elle a toujours autant de succès. J’ai la chance de faire partie de la tournée Stars 80. Dans cette tournée je chante entre autre Disparue et Macumba. Quand je suis sur scène je chante "DIS-" et la salle entière chante le reste.

 

NB de la rédaction : Le 6 et 7 juin, Jean-Pierre Mader sera en concert avec Stars 80 au stade de Lille, France.