Édition internationale

Adeline Flaun, Française de Barcelone, au festival d'Avignon

L'autrice et actrice Adeline Flaun présente "Moi dispositif Vénus" à la Chapelle du Verbe Incarné d'Avignon, jusqu'au 26 juillet. Un spectacle qu'elle met aussi en scène, et qu'elle a créé dans le cadre du "Oui !", festival de théâtre en français de Barcelone. Interview.

Adeline FlaunAdeline Flaun
@ Alessia Bombarcci
Écrit par Francis Mateo
Publié le 11 juillet 2023

Comment est né ce spectacle, "Moi dispositif Vénus"?

Adeline Flaun: J'ai écrit cette pièce juste avant la pandémie, en Martinique, où j'étais en résidence culturelle; puis je suis rentrée à Barcelone au moment de la crise sanitaire. Toute la création du spectacle, pendant le premier semestre 2020, s'est donc faite en ligne, en visio avec les vidéastes et les créateurs des avatars, qui étaient en Martinique. Au niveau de la dramaturgie, la pièce s'est construite sur deux piliers: d'une part sur mon éducation catalane, qui explique une certaine dramaturgie contemporaine, mais aussi bien sûr, d'autre part, sur une sensibilité et une manière de percevoir le vivant qui sont martiniquaises. Tout ce mélange est dans le spectacle Moi Dispositif Venus, même si le fond et la forme vont au-delà de l'univers et sont beaucoup plus internationaux, à l'image d'une équipe de créateurs de tous horizons.

Les thèmes que vous abordez sont également universels: l'exploitation des corps, la sexualité, la manipulation... Comment se sont imposées ces thématiques?

Moi Dispositif Vénus naît d'un besoin très personnel d'aborder les sujets liés à l'objectivation du corps des femmes, au mercantilisme de la sexualité et à la progressive désincarnation des relations humaines. Suite à la prise de conscience de mon propre conditionnement et de la dérive que génèrent les nouvelles technologies à nos dépens, j'ai façonné Moi Dispositif Vénus dans l'espoir de susciter une réflexion, un débat au sein du public, tant en raison du contenu que de la forme. La pièce n'est pas forcément une critique, parce que je ne propose ni solution définitive, ni un point de vue linéaire ; ce qui m'intéresse, c'est de réfléchir, de faire d'abord un état des lieux sur l'hypersexualisation des corps dans toutes les sphères de la société. Avec, comme postulat de départ, l'existence d'une manipulation de masse. C'est aussi une réflexion globale sur le consentement, au-delà du mouvement MeToo et des lois qui ont été votées récemment en Espagne sur le sujet: quelle est notre capacité à orienter nos choix? Comment se laisse-t-on transformer en objet sexuel, en devenant soi-même objet de consommation? C'est ce processus d'objectivation qui m'intéresse, car c'est une forme de déshumanisation.
 

affiche du spectacle avec Adeline flaun

 

Quelle est la part des influences artistiques, de vos recherches et de votre vie personnelle dans le spectacle ?

Au niveau dramaturgique, la pièce se nourrit des travaux de plusieurs auteurs. Il y a d'abord eu cette rencontre déterminante avec "King Kong Théorie" de Virginie Despentes, qui m'a poussée, telle une injonction, à m'exprimer en tant qu'autrice. Les analyses dramaturgiques de l'italien Davide Carnevali concernant le post-dramatisme ou les recherches de l'uruguayen Sergio Blanco autour de l'autofiction m'ont également inspirées. Par ailleurs, il me semblait important de situer les faits dans un contexte dystopique afin de générer une distanciation entre le vécu du public et l'histoire dans laquelle il allait s'immerger. Même si mon écriture s'alimente de ces influences et de mes recherches, il est aussi évident que je ne pouvais pas aborder tous ces sujets sans parler de moi-même. D'où l'importance, au-delà de l'écriture du texte et de la mise en scène, d'être physiquement présente devant le public.

 

"Moi Dispositif Vénus" – Jusqu'au 26/07/2023 à la Chapelle du Verbe Incarné d'Avignon –

francis mateo
Publié le 11 juillet 2023, mis à jour le 11 juillet 2023
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