Près de deux semaines après les élections régionales catalanes, le directeur de la CCI française de Barcelone revient sur l'impact du scrutin du 25N et ses éventuelles retombées pour la région. Un regard à forte composante entrepreneuriale, porté sur les perspectives à moyen terme.
Lepetitjournal.com : Comment avez-vous vécu la campagne électorale pour les élections régionales au Parlement de Catalogne, qui a surtout été centrée sur la question d'une indépendance ? Quelles ont été les conséquences sur l'image de la Catalogne ?
Philippe Saman : Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette campagne a très fortement mobilisé les médias français et internationaux. Depuis plus de 30 ans que je dirige la CCI française de Barcelone, jamais je n'ai connu un tel engouement pour l'actualité espagnole matérialisé par un déferlement de journalistes, tous médias confondus. Il faut dire que l'enjeu était de taille. Il concernait bien sûr la Catalogne, mais au-delà, la question posée était celle du modèle économique et politique de l'Espagne. Et, vu de l'étranger, c'est celui de l'Europe toute entière qui semble être en jeu. Une chose est certaine : aujourd'hui tout le monde connaît le problème. C'est ce qui me fait dire que la campagne n'a pas abîmé l'image de la Catalogne, au contraire, elle l'a renforcée. Pour beaucoup, au-delà des visions indépendantistes, l'image de la Catalogne est avant tout celle d'une région qui défend son identité, cultive sa différence et revendique le droit de décider par elle-même ce qui est bon pour elle.
Malgré le score de CiU, un référendum pourrait quand même avoir lieu : ce climat d'incertitudes peut-il peser sur l'activité économique locale selon vous dans les prochains mois ?
A Paris comme à Madrid, la presse a relevé qu'Artur Mas, Président du gouvernement sortant, n'avait pas gagné son pari. Mais la presse française a aussi donné tout son crédit au changement réel intervenu, à savoir que la Catalogne disposait d'un Parlement majoritairement indépendantiste. Le signal donné par les électeurs a été fort, mais faute de majorité claire, les partis sont divisés, et la mise en ?uvre d'un référendum ne sera sans doute pas simple. En tout état de cause, c'est une aspiration populaire que l´on ne peut ignorer, car le droit de décider reste un droit fondamental.
Pour le reste, à la CCI française de Barcelone, nous travaillons comme à l'accoutumée. La récession donne suffisamment de fil à retordre à nos entreprises pour éviter qu'elles ne se perdent en conjectures sur l'indépendance. J'ai envie de dire qu'en temps voulu, chacun prendra les décisions qui s'imposeront à sa structure, son positionnement sur le marché, sa sensibilité.
Quel est, à ce jour, l'état des relations entrepreneuriales avec Madrid ? S'est-il détérioré ou non au cours des derniers mois ?
Les relations entre la Catalogne et Madrid se sont dégradées au cours des dernières années et non au cours des derniers mois. La crise a accéléré la radicalisation de la relation. Aujourd'hui, le modèle de répartition et de solidarité avec le reste de l'Espagne doit évoluer. Ce qui est en jeu, c'est le modèle même du "café para todos" et je n'envisage l'avenir que dans une refonte de l'organisation territoriale de l'Espagne.
Vous préparez-vous à une éventuelle indépendance ou cette hypothèse est de l'ordre de l'impossible, selon vous ?
Je ne me prépare pas, j'attends que le processus arrive à son terme. C'est une décision souveraine et personne ne peut prédire ce qui va se passer. Il faut rester serein et attendre de voir comment les choses vont se mettre en place. Souvenez-vous comment les sondages se sont trompés concernant le résultat des élections du 25 N et vous comprendrez ma prudence. Ce n'est ni impossible, ni fait. Si on arrive au référendum, c'est le peuple qui tranchera, et personne d'autre. Ce qui est certain, c'est que ce serait inédit.
Les entreprises françaises ont-elles été refroidies dans leurs investissements sur le territoire, par la récente actualité politique ? Quel est dans ce contexte le rôle de la CCI française de Barcelone ?
Nous n'avons pas remarqué de mouvements particuliers ou enregistré l'arrêt de projets existants. La situation générale, économique j'entends, n'est de toute façon pas très favorable aux grands projets. C'est pour cela que de plus en plus, nous travaillons les niches qui -dans tous les secteurs- permettent de positionner l'offre française. Et par ailleurs, nous développons de plus en plus l'accompagnement des entreprises espagnoles et en particulier catalanes vers le marché français. Dans les deux cas, il y a beaucoup à faire !
Propos recueillis par DL et VG (www.lepetitjournal.com - Espagne) Mardi 11 décembre 2012
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Écrit par Lepetitjournal Barcelone
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 23 décembre 2012
Publié le 11 décembre 2012, mis à jour le 23 décembre 2012
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