Classique parmi les classiques, La Leçon de Piano de Jane Campion est l'unique film réalisé par une femme à avoir reçu autant de prix. Retour sur ce monstre du cinéma néo-zélandais et sa réalisatrice.
Le speech
Au XIX siècle, Ada MacGrath, jeune écossaise, doit quitter sa terre natale pour la lointaine Nouvelle-Zélande. Donnée par son père, elle doit y épouser un homme qu'elle ne connaît pas. Ada est muette depuis ses 6 ans pour une raison inconnue de tous. Elle ne s'exprime qu'à travers son piano et le langage des signes, traduit par sa fille Flora, âgée de 9 ans.
Déposés sur les côtes néo-zélandaises, Ada, son piano et sa fille se trouvent aux prises avec des hommes dont la rudesse n'a d'égal que celle de ce territoire inhospitalier.
Jane Campion, le William Turner du cinéma néo-zélandais
Tout en reprenant les éléments très classiques du trio-amoureux, Jane Campion parvient à surpasser cette apparente simplicité. La Leçon de Piano est un univers complexe où s'assemblent esthétique, érotisme et aridité des rapports humains. A la façon de William Turner dont les peintures traduisent des impressions et sentiments, Jane Campion parvient à faire éprouver aux spectateurs la rudesse de la Nouvelle-Zélande alors même que sa caméra demeure focalisée sur les personnages.
Le sable noir, le déchaînement de la mer, la boue, tout rappelle la fragilité de l'être humain face à cette nature inébranlable. L'usage des contrastes et des couleurs, des décalages dans les attitudes et les tenues des personnages, permettent de ressentir la complexité de la période de la colonisation sur cette terre. Pour en savoir plus sur le pouvoir du paysage dans le cinéma de Jane Campion, retrouvez le documentaire réalisé par Richard Tindillier.
Les dessous de La Leçon de Piano
Ce chef-d'oeuvre est le seul et unique film réalisé par une femme à avoir reçu la Palme d'or au Festival de Cannes. Petit aperçu des secrets qui font de ce long métrage une pierre angulaire du cinéma contemporain.
Des françaises auraient pu être à l'affiche
Isabelle Hupper et Juliette Binoche avaient été pressenties pour le rôle principal. C'est finalement Holly Hunter qui l'a emporté.
Le tournage de La Leçon de Piano a été entièrement réalisé dans la région d'Auckland
Les lieux clés du film sont la plage de Karekare, au Sud de Piha, à seulement une petite heure de route de la cité de la Sky Tower, et le quartier de Henderson.
Prouesse technique
Par souci de réalisme, les scènes du voyage de la plage vers la demeure du mari d'Ada ont été entièrement tournées dans un milieu naturel. Il a été très compliqué pour l'équipe de mettre en place un travelling de qualité. La difficulté des acteurs à se mouvoir avec leurs costumes victoriens dans la boue n'est pas feinte mais bien réelle.
Prouesse d'acteur
Afin d'interpréter jusqu'au bout son personnage, et toujours par souci de réalisme, Holly Hunter a beaucoup travaillé pour les besoins du rôle. C'est elle qui joue du piano dans la majorité des scènes du film. Elle a également appris le langage des signes.
Un tatoueur attitré
L'ensemble des tatouages arborés par le personnage d'Harvey Keitel ont demandé un travail colossal. Ils ont été réalisés par un tatoueur maori, qui a dû les refaire à l'identique pendant toute la durée du tournage.
La dédicace du film
La première image du film est une dédicace à Edith, mère de Jane Campion.
Anne Paquin n'a pas pu voir le film
La Leçon de Piano a été interdit aux mineurs non accompagnés. Anne Paquin, incarnant Flora, fille d'Ada, n'a pas été autorisée à visionner le film.
L'année tremplin de Sam Neill
1993 marque un tournant dans la carrière de l'acteur incarnant le mari d'Ada. La Leçon de Piano lui a donné la reconnaissance de ses pairs. Il est devenu une figure incontournable des années 1990 : c'est en effet la tête d'affiche de Jurassic Park de Steven Spielberg.
Malgré la dimension dramatique de La Leçon de Piano, Jane Campion a avant tout réalisé une ode à l'amour et a l'espoir. Sans détour, ce film fait parti du registre incontournable de tout amoureux du cinéma mais aussi de ceux qui veulent comprendre (un peu) ce qu'est la Nouvelle-Zélande.
La semaine prochaine le Petit Journal d'Auckland vous offrira une interview exclusive de Richard Tindillier, auteur du reportage sur Jane Campion.
"Stay tuned"