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Déclin démographique en Grèce: plus de 700 écoles fermées

721 écoles grecques ont fermé à la rentrée scolaire 2025, faute d’avoir suffisamment d’élèves inscrits. Cette nouvelle s’inscrit dans la profonde crise démographique qui touche le pays depuis quelques années.

Fermeture ecoles GreceFermeture ecoles Grece
Écrit par Isaure de Belleville
Publié le 9 octobre 2025, mis à jour le 10 octobre 2025

« La mort de la Grèce ». C’est ainsi qu’a réagi Elon Musk dans un post sur X (ex-Twitter) à l’annonce de la fermeture de plus de 721 écoles en Grèce pour la rentrée 2025-2026, 5% du total des écoles. Comme d’usage chez le milliardaire américain, le commentaire ne s’embarrasse pas de pincettes. Mais le ton dramatique reste de mise : à travers ce chiffre s’illustre la grave crise démographique qui traverse la Grèce depuis plusieurs années.

 

Des fermetures à l'échelle nationale

Aucune région n’est épargnée par ces fermetures. Si le phénomène touche particulièrement certaines zones retirées, il s’étend jusque dans les provinces les plus densément peuplées. 77 écoles devraient ainsi fermer dans la région de l’Attique, où se trouve Athènes.

Nombre d’entre elles ne respectent plus le minimum de 15 élèves fixé par le ministère de l’Éducation, en deçà duquel une école ne peut rester ouverte. Alors elles se retrouvent suspendues pour trois ans dans un premier temps, avant que leur cloche n’arrête définitivement de sonner. Les élèves qui restent sont transférés dans les écoles des villages ou villes voisines, avec des ajustements plus ou moins lourds pour les familles.

 

La fin d’une époque pour les villages?

Après 146 ans, l’école maternelle du village de Drakotrypa, en Grèce centrale, a fermé ses portes cette année. Pour les deux élèves qui restent, il faudra « simplement » voyager jusqu’au village de Mouzaki, à une dizaine de kilomètres. Pour d’autres, nul choix que de déménager – comme pour cette famille partie de l’île d’Arki pour celle de Lipsi, afin que leur enfant ait une scolarité normale.

D’après le dernier recensement de 2021, la moitié de la population grecque, soit près de 5 millions de personnes, vit désormais dans 4,3% du territoire. Frappées par la crise financière et économique, l’émigration massive qui s’en est suivie – près d’un demi-million de Grecs, dont de nombreux jeunes, sont partis - et le vieillissement de la population, les régions montagneuses et insulaires isolées se vident pour les promesses des centres urbains ou de l’étranger. Dès lors, comment espérer maintenir ces quotas d’élèves dans les écoles de ces villages ?

 

Une crise démographique profonde

Chaque nouveau rapport est catégorique. Le dernier en date, publié au mois d’août par le laboratoire de démographie de l’Université de Thessalie (LDSA), indique ainsi que la population a décliné de 500 000 personnes au cours de ces 13 dernières années. Cela s’explique par un solde migratoire négatif et un taux de naissances par femme (1,3) qui ne permet pas au pays de renouveler sa population. Sans intervention, il estime que cette tendance devrait se poursuivre jusqu’à 2050. La population vieillit, au point d’être l’une des plus âgées de l’Union européenne : 23% de la population grecque a plus de 65 ans, et l’âge médian ne cesse d’augmenter. Les enfants, eux, se font rares. En 2023, le nombre de naissances était deux fois moins élevé que la moyenne enregistrée entre 1951 et 1970.

Le Premier ministre Kyriakos Mitsotakis évoquait lors d’une conférence à ce sujet fin 2023 un « pari existentiel pour (le) futur » du pays. Les écoles maternelles et primaires en savent quelque chose, donc. Les inscriptions ont diminué de 19% en école primaire depuis 2018. Faute d’élèves, ce sont en majorité ces écoles qui fermeront leurs portes cette année.

 

S’attaquer aux racines du problème

Depuis quelques années, le gouvernement tente de s’attaquer à l’une des racines majeures du problème démographique, la pression économique qui pèse sur les foyers depuis la crise financière et la décennie d’austérité, et notamment les jeunes. Faute d’un salaire suffisant, nombre d’entre eux vivent encore chez leurs parents et envisagent toujours de partir à l’étranger, nous dit le rapport du LDSA.

Début septembre, le Premier ministre a annoncé la mise en place de mesures d’allègement fiscaux dès le début de l’année prochaine. 1,6 milliards d’euros en faveur des familles, une réforme présentée comme « la plus audacieuse révision des tranches d’imposition de revenu depuis 1974 ». En 2020 déjà, le gouvernement actuel avait révélé ses premières mesures pour promouvoir la natalité : un bonus « bébé » pour chaque nouvel enfant mis au monde. De 1700 euros pour le premier, jusqu’à 3500 euros pour le troisième et les suivants.

Cela suffira-t-il ? Rien n’est moins sûr. Le rapport du laboratoire de l’Université de Thessalie, concluant que les conditions de vie actuelles poussent les jeunes soit à l’émigration, soit à ne pas avoir d’enfants, insiste sur leur amélioration structurelle. Et sur le rôle qu’un cadre migratoire maitrisé, portant sur l’intégration d’immigrants et l’enrayement de l’émigration, pourrait jouer dans le renversement du déclin démographique.

En attendant, certains se battent contre l’inéluctable. Sur l’île de Pserimos, 15 kilomètres carrés oubliés des circuits touristiques, peu à peu dépeuplée de ses habitants, fait office de petit miracle. En 2023, avec l’aide de l’Association Internationale Hellénique (IHA) et des habitants de l’île, l’école a réouvert après 16 ans pour un élève. En 2025, elle en compte désormais 5 – et bientôt plus encore avec la naissance de trois bébés.

Isaure_contributrice LPJ
Publié le 9 octobre 2025, mis à jour le 10 octobre 2025
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