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10 ans de prison pour la femme de ménage qui a falsifié son certificat

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Écrit par Aurore Le Perff
Publié le 27 novembre 2018, mis à jour le 28 novembre 2018

Une femme de ménage a été condamnée à 10 ans de prison pour avoir falsifié le nombre d'années passé à l'école primaire afin d'avoir accès à un emploi dans le secteur public en 1996. 

Lors d’un contrôle en 2014, la fonctionnaire de 53 ans a été licenciée après la découverte de cette fraude alors qu’elle travaillait en tant que femme de ménage depuis 18 ans dans la même école maternelle de Volos. 

Bien sûr, elle a falsifié un document pour être embauchée mais mérite-t-elle 10 ans de prison pour autant ? C’est sur cette question que toute la Grèce s’enflamme actuellement. 

La femme de ménage a fourni un faux certificat pour être embauchée

En effet, pour accéder à un emploi dans le secteur public, et en l'occurence pour cet emploi de femme de ménage, il fallait avoir terminé la 6ème année de l'école primaire. Or, se trouvant dans un environnement familial difficile lorsqu'elle était petite, la femme n'a jamais pu finir l'école primaire. Il ne lui manquait pourtant qu'une année.

Plus tard, à 25 ans, avec deux enfants et un mari infirme à 67% qui ne peut plus travailler, elle doit impérativement trouver du travail pour subvenir aux besoins de sa famille. Comme elle ne remplit pas toutes les conditions à l'embauche, elle décide de changer le nombre d'années passé à l'école primaire. Comme elle l'a dit de la prison où elle se trouve actuellement, « J'ai honte mais je voulais que mes enfants aient une vie meilleure que la mienne. »

Une décision juridique particulièrement sévère

La quinquagénaire a été condamnée à 15 ans de prison en première instance en 2016. La décision de la cour d'appel de Larissa a été rendue début novembre 2018 : ce sera finalement 10 ans de prison.

Le raisonnement des juridictions est le suivant : toutes ces années, la fonctionnaire a trompé l’État en fournissant un faux certificat afin d'accéder à un emploi auquel elle n'aurait pas dû prétendre. Elle a fraudé le secteur public. L'État s'estime donc lésé et victime d'un grave préjudice.

La Ligue Hellénique des Droits de l’Homme déclare : « cette décision est inhumaine ». Elle estime que la falsification de document doit bien sûr être punie, mais « le juge doit tout de même respecter le principe de proportionnalité ». Or, les tribunaux n'ont fait qu'appliquer la peine prévue pour ce type de fraude au secteur public : 10 ans minimum.

De plus, cela ne peut pas être vu comme du vol puisqu'elle a bien effectué le ménage dans cette garderie tous les jours pendant 20 ans. C'est ce que déclare le syndicat des travailleurs de nettoyage de la région de Volos pour défendre la femme de ménage qui se trouve en ce moment à la prison de Thèbes : « Elle n’a pas volé ! Elle n’a pas détourné de l’argent de l’État ! Elle a travaillé pour ça ! Pour répondre aux besoins de sa famille. »

Quels recours reste-t-il ?

Il reste encore un espoir puisque la cour de cassation va devoir examiner le dossier d'ici la fin du mois. Toutefois, cette cour ne juge pas du fond des affaires. Elle ne fait que vérifier la conformité des décisions avec le droit grec. Or, c'est justement ce qui est reproché aux décisions des juridictions précédentes, de s'être cantonnées à strictement suivre le droit. Il semble donc difficile de voir une issue de sortie pour la femme de ménage qui se retrouve du jour au lendemain en prison, alors qu'elle n'avait jamais eu affaire avec la Justice auparavant.

En attendant, la femme de ménage espère obtenir une suspension de peine pour être libérée le temps que le procureur de la cour de cassation n'examine les dossiers. Les dossiers, car le cas de la femme de ménage n'est pas un cas isolé. Une dizaine de condamnations du même type ont déjà été prononcées. Les réseaux sociaux se sont emparés de cette histoire et cela a entraîné une pétition en ligne, qui a déjà récolté plus de 46.000 signatures au profit de la libération immédiate de la femme de ménage.

Certains requièrent la grâce présidentielle. Cela pourrait en effet être une solution. D'autres s'adressent directement au ministère de la Justice afin de modifier le code pénal et éviter que d'autres condamnations de ce type ne se présentent à nouveau. Affaire à suivre.

Mise à jour du 28 novembre 2018 à 12h

La demande de suspension de peine de la femme de ménage a été acceptée ce mercredi 28 novembre. Elle a donc été libérée immédiatement dans la matinée et devra maintenant attendre la décision de la cour de cassation pour savoir si sa condamnation à 10 ans de prison est confirmée ou pas.

Aurore Le Perff
Publié le 27 novembre 2018, mis à jour le 28 novembre 2018

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