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La France, l’Eldorado des jeunes Algériens

France eldorado en AlgérieFrance eldorado en Algérie
Marée humaine devant l'Institut français d'Alger
Écrit par Vincent Villemer
Publié le 7 novembre 2017, mis à jour le 18 octobre 2018

L’attroupement de milliers de jeunes Algériens souhaitant étudier en France a suscité l’émoi dans leur pays et illustre le malaise social dont souffre cette génération pourtant privilégiée à l’échelle de la population.

 

Ces images ont beaucoup fait parler en Algérie. Devant l’Institut français d’Alger, une file impressionnante d’étudiants, filles et garçons, se pressait pour s’inscrire au Test de connaissance du français, indispensable pour espérer étudier en France. Une image forte qui symbolise la volonté générale de la jeunesse algérienne qui ne voit pas d’autre alternative que de rejoindre l’hexagone pour réussir sa vie.

 

Pourquoi partir en France ?

L’Algérie dispose pourtant d’une centaine d’établissements d’enseignement supérieur, pouvant accueillir un peu moins de deux millions d’étudiants, mais cela n’est pas suffisant pour retenir une jeunesse ambitieuse, qui se soucie de son avenir, autant sur le plan professionnel que personnel. Parmi les étudiants faisant la queue pour s’inscrire au fameux test de français, nombreux sont ceux déjà diplômés, qui pourraient très bien postuler sur le marché du travail local mais qui préfèrent partir en France pour « améliorer des compétences », ou « s’enrichir sur le plan culturel et intellectuel » avant de revenir en Algérie. Une formule souvent répétée dans la bouche de ces jeunes, qui masque en réalité une vraie envie de s’expatrier définitivement, persuadés que leur avenir sera meilleur en France qu’en Algérie.

Mehdi, jeune ingénieur diplômé présent très tôt devant les locaux de l’IFA a déclaré ce qui résume la situation : « La majorité de ceux qui sont ici veulent s’installer à l’étranger pour de bon et n’ont pas du tout le projet de revenir travailler ici. » Preuve de cette volonté générale, les étudiants n’ont aucun mal à débourser les 10 000 dinars (75 euros) pour les frais d’inscription au test, soit un peu plus de la moitié du salaire minimum algérien. Le rayonnement de la France à l’échelle mondiale, le montant des salaires, la qualité de vie et les nombreux secteurs d’emploi sont les raisons pour lesquelles cette jeunesse est prête à tout donner pour espérer accomplir ses objectifs. L’Algérie est perçue comme un frein dans leur progression pour ces jeunes qui regrettent les diplômes souvent dévalorisés et un marché de l’emploi assez bouché. Cette année, plus de 32 000 jeunes Algériens ont déposé des dossiers en vue d’étudier en France, soit une hausse de 20% comparé à 2016…

les jeunes partent parce que le rêve algérien n’existe plus. Les pauvres partent en barque, les instruits avec un visa.

Partir… quoi qu’il arrive

D’un point de vue social, les Algériennes notamment, constatent que leur nation est un peu en retard sur certains aspects fondamentaux et qu’il sera vital pour leur développement personnel de rejoindre la France. Si les inégalités entre hommes et femmes en France se ressentent encore, elles ont beaucoup plus d’ampleur en Algérie, comme le souligne Akila, titulaire d’un master 2 en français : « Il y a beaucoup de problèmes avec la famille, dans la société ; ici une femme ne peut pas avoir une vie libre. Il n’y a pas d’avenir, l’essentiel est de partir ». Partir oui, mais à tout prix ? C’est ce qui semble être le son de cloche chez cette jeunesse.

Autant chez les plus privilégiés pouvant se financer des études supérieures, que chez les classes les plus difficiles ayant un choix forcément restreint. Comme le dit le sociologue Nacer Djabi : « les jeunes partent parce que le rêve algérien n’existe plus. Les pauvres partent en barque, les instruits avec un visa. » Comme si l’option de rester en Algérie n’était même pas envisageable, ou du moins, fortement déconseillée. Cette génération a pris conscience que leur pays stagnait sur des points sociaux fondamentaux (la place des femmes dans la société par exemple), et qu’il offrait très peu de perspectives réjouissantes, de réussite sociale et professionnelle, et de bonheur.

 

À noter que ces images de la foule d’étudiantes devant l’IFA ont fait jaser et irritent le gouvernement et les autorités algériennes. Le secrétaire général du FLN, Djamel Ould Abbes déclare avoir vu le résultat de « l’invasion culturelle dont l’Algérie est victime » alors que le Premier ministre Ahmed Ouyahia a dénoncé une tentative de « nuire à l’image de son pays ».

vincent villemer
Publié le 7 novembre 2017, mis à jour le 18 octobre 2018

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