Édition internationale

SIMPLIFICATION DE LA LANGUE – L’emploi du subjonctif serait-il subjectif ?

Écrit par Lepetitjournal Turin
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 16 avril 2014

La langue est une matière vivante, qui évolue, s'adapte et se transforme à l'image de son époque. Dans un contexte de plus en plus frénétique où la communication se doit d'être rapide et directe, le subjonctif peut-il encore jouer un rôle de premier plan dans le français contemporain ? 

Je ne pense pas que tu aies raison, même si je pense que tu n'as pas tort? 

Voilà de quoi donner de l'urticaire à tous ceux qui osent s'aventurer sur le sentier périlleux de l'apprentissage de la langue française et de ses subtilités. Prenons l'emploi du subjonctif. S'il est tout à fait naturel pour un Français ou un francophone natif de privilégier un mode verbal plutôt qu'un autre (dans ce cas précis l'indicatif ou le subjonctif) selon des critères qui semblent à tous les autres purement arbitraires, aux yeux d'un étranger il s'agit là d'un véritable casse-tête. Et ce, malgré les explications fournies par les grammaires qui multiplient les exemples afin de dissiper une fois pour toutes les innombrables doutes sur son utilisation : pour notre apprenti sorcier aux prises avec les difficultés du français, il sera alors question d'identifier des verbes de sentiment ou de désir, de reconnaître les constructions qui expriment un jugement, une contrainte, de bien comprendre les notions d'objectivité et de subjectivité.

Tous ses efforts pour apprendre le français seront-ils récompensés un jour ? Qu'en est-il de l'usage du subjonctif dans le français contemporain ? Est-il encore indissociable de cette notion de "bien parler" qui s'accompagne d'une parfaite maîtrise de la syntaxe mais également d'une marque de distinction sociale (et parfois même de snobisme pour ses détracteurs) ? 

Le subjonctif, un mode en péril

Dans les transports comme dans la communication, l'heure est à la rapidité, à l'efficacité. A-t-on le temps aujourd'hui de nuancer ses propos, d'envoyer des messages codés en employant des formes verbales qui laissent la place à l'hypothèse, à l'éventualité ? En d'autres mots, peut-on encore se permettre le luxe d'employer le subjonctif  comme s'il s'agissait d'une sorte de rite initiatique à la beauté et à la complexité de la langue française ?  Nous assistons quotidiennement à deux phénomènes parallèles. D'un côté, la langue parlée, par sa nature moins stricte et codifiée, est soumise à un processus de simplification, inévitable, certes, mais très marqué. De l'autre à une "oralisation" de l'écrit, puisqu'on a tendance à écrire de plus en plus comme on parle. A cela s'ajoute la disparition progressive de l'imparfait et du plus-que-parfait du subjonctif à partir de la fin du XIXe siècle, pratiquement achevée aujourd'hui.

Si cette évolution est inéluctable car elle est le miroir d'une époque, d'un nouveau mode de vie, il est important de s'interroger sur les conséquences d'un tel changement  : notre pensée va-t-elle se standardiser sans le bagage de valeurs et de nuances que véhicule l'utilisation du subjonctif ? La guerre est ouverte entre la spontanéité de l'oral, appauvri peut-être, mais vivant, et la réflexion offerte par la langue écrite. Et que le meilleur? gagne. Tiens, un subjonctif !

Luisa Gerini (www.lepetitjournal.com/Turin) mercredi 16 avril 2014

Et en italien ?

Ah, l'Italie? Rappelons que le Bel Paese reste le paradis des amoureux de la concordance des temps, puisque dans la langue de Dante on utilise encore les quatre temps du subjonctif. Et que pour une fois la logique cartésienne a plié armes et bagages pour traverser la frontière et s'installer en Italie. L'emploi de ce mode en italien est donc moins complexe qu'en français : tout ce qui relève du sujet pensant étant forcément subjectif, les verbes comme "penser" ou "croire" sont suivis du subjonctif.

Publié le 15 avril 2014, mis à jour le 16 avril 2014
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