Devant le succès du Beaujolais Nouveau, d'autre pays et notamment l'Italie, ont tenté de se lancer dans la production et la commercialisation de ces vins dits ?jeunes?. Vins de piètre qualité ? Gros coup marketing ? Faisons le point sur ces novelli qui occupent une place importante sur le marché international
Depuis le 6 novembre minuit, l'Italie a pu goûter et apprécier sa cuvée 2008 de vino novello. En France, il faudra attendre le 20 novembre pour que les amateurs de vin puissent trinquer, un verre de Beaujolais Nouveau à la main. Cette coutume remonte à 1951, lorsqu'un arrêté français stipula que les vins d'appellation d'origine ne pouvaient être vendus qu'à partir du 15 décembre de l'année de vendange. Cependant, suite au lobbying des syndicats viticoles, une note précisa que certains vins (en particulier le Beaujolais qui est un vin primeur) pouvaient être commercialisés avant. C'est ainsi que naquit l'appellation Beaujolais Nouveau. Variable pendant plusieurs années, la date du troisième jeudi du mois de novembre fut ensuite arrêtée pour rendre plus aisée la mise en place de sa commercialisation.
C'est dans les années 60 qu'est né le fameux concept qui fit le tour du monde et rentra dans le domaine public : ?le Beaujolais Nouveau est arrivé !?. Porté par cette bannière, ce vin gagna rapidement les pays européens puis fut exporté outre-Atlantique, au Japon et dans le Sud-est asiatique.
Aujourd'hui le Beaujolais Nouveau représente une production de 500 000 hectolitres soit l'équivalent de 60 millions de bouteilles, dont la moitié est exportée.
Une fabrication bien particulière
Vin de cépage Gamay de la région lyonnaise, le Beaujolais Nouveau est vinifié selon la méthode de macération carbonique. Le raisin est ramassé à la main afin que les grappes soient les moins écrasées possibles. Puis il est placé dans une cuve hermétiquement close. Les grappes du fond de cuve vont éclater sous le poids des autres et le jus ainsi libéré va fermenter en dégageant du CO2. L'influence du gaz dégagé entraine sur le raisin une fermentation intracellulaire (au c?ur de la baie). Le processus dure de 4 à 10 jours et donne à ce vin les caractéristiques qu'on lui connait bien : des couleurs brillantes et vives, très peu d'acidité et un goût très prononcé de fruit rouge.
En Italie, la fabrication du vino novello s'organise différemment. Le cépage n'est pas unique, on utilise aussi bien du Merlot que du Cabernet Sauvignon, du Sangiovese et bien d'autres. Ce vin est fabriqué dans tout le pays avec néanmoins une forte concentration en Vénétie et Toscane. Mais la grande distinction se trouve dans la vinification. En effet, la législation italienne prévoit qu'au moins 30% du raisin doive subir la méthode de macération carbonique, les 70% restant pouvant être vinifiés de façon traditionnelle.
Le marché du vino novello représente en Italie 15 millions de bouteilles, 112 000 hectolitres (0,28% de la production italienne) et 80 millions d'euros. (Photo Lpj)
Une consommation en baisse
Malgré l'importance de ce commerce, on constate aussi bien en France qu'en Italie une baisse de la consommation de ce type de vin en particulier sur les marchés européens depuis 2000. On note un déplacement de marché de l'Europe de l'Ouest vers l'Asie (le Japon, par exemple, achète 20% de la production française !).
Pourquoi une telle diminution ? Le Beaujolais Nouveau ne serait-il plus tendance ? C'est un début de réponse. Ces vins ont aussi souffert de leur réputation de ?piquette?. Les producteurs craignent que les vins primeurs nuisent à la réputation des autres appellations qu'ils produisent également et qui sont aussi d'excellents vins de garde.
Voilà pourquoi on sort l'artillerie lourde lorsqu'il s'agit de promouvoir ces produits. Le vino novello doit se boire rapidement, ce qui implique un gros travail de promotion sur un temps court puisqu'en 6 mois tout doit être écoulé. La cible marketing idéale a été trouvée : les jeunes, moins expérimentés qui apprécient ce vin en raison de sa légèreté, de son bouquet aromatique et de son côté festif.
Alors quelle place donner au primeur ? Disons qu'il s'agit d'une curiosité ?nologique à déguster une fois l'an, un rite agréable snobé par les passionnés de vin.
Nathalie CHARLANNES. (www.lepetitjournal.com ? Turin) jeudi 13 novembre 2008