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ANALPHABETISME GASTRONOMIQUE - Menus plaisirs ou désagréments à la carte ?

Écrit par Lepetitjournal Turin
Publié le 25 février 2015, mis à jour le 24 février 2015

 

Menu, carte, grande carte, bien des confusions persistent sur ces termes qui devraient appartenir au vocabulaire professionnel des métiers de bouche. Et quand les mots étrangers sont de la partie, le répertoire gourmand risque de friser le ridicule. Quiche, kitch ou chic ?

Le service à la russe 

Un peu d'histoire

Le menu, en tant que feuillet explicatif destiné aux convives, apparaît au xixe siècle avec le service à la russe , introduit par le prince  Alexandre Kourakine, ambassadeur de Russie en France entre 1808 et 1812. Les plats sont désormais servis aux convives par portion et non plus tous posés simultanément sur la table comme dans le service à la française. On dit  cependant qu'Isabeau de Bavière, femme de Charles VI, en aurait été la première introductrice à l'occasion de ses banquets, quelques siècles auparavant. Tous les grands cuisiniers du passé se sont intéressés dans leurs ?uvres culinaires aux cartes et menus, de leur réalisation à leur présentation, en passant par l'équilibre des plats et des garnitures présentés

En Italie, carte ou menu ?

Bien sûr, en Italie, prétendre connaître la différence entre ces deux mots (en français la carte est la liste de mets au choix tandis que le menu est une proposition fixe) relève de la méchanceté pure, du sadisme intellectuel d'un cerveau détraqué de chroniqueur gastronomique en quête de provocations. Mais du moins, on aimerait - et je me fais porte-parole des défenseurs de la belle écriture, de l'orthographe et de la grammaire - que la formulation et la présentation soient impeccables. Sans recourir à l'imprimerie, il est de nos jours tellement facile de proposer des feuillets clairs et élégants, à l'aide d'un simple ordinateur et d'une imprimante ! De même pour la rédaction, nul ne prétend que la liste des mets soit exposée par un académicien mais du moins que les erreurs d'orthographe soient omises, d'autant plus que les correcteurs d'orthographe proposés par Word ou tout autre traitement de textes sont là pour nous aider.

L'orthographe, cette inconnue 

La langue française reste la référence en cuisine et ce malgré les bonnes intentions de Pellegrino Artusi (1820 ? 1911), unificateur des cuisines régionales italiennes, qui souhaitait éliminer le "gergo frangioso". Elle est donc la victime prédestinée et préférée de l'analphabétisme gastro-littéraire. Un florilège de quelques expériences personnelles me permet de vous offrir ces perles savoureuses : kitch alle verdure, tartar, fois gras, gordon bleu et autres cream caramelle. Incontournable et très piémontais, le vulvan n'est qu'une version phonétique du vol au vent. Quant à la terrasse des bars et des restaurants, inutile de préciser que c'est un deor, dehor, très rarement dehors qui s'enrichit ? pléonasme vicieux -  de l'adjectif esterno. Qui l'eût imaginé ? Et que dire de menù écrit avec un accent grave? Absolument exécrable ! Il vaudrait mieux rallier la cause du futuriste Marinetti et écrire tout simplement lista delle vivande.

De la simplicité avant tout

On pourrait consacrer un chapitre infini aux descriptions des mets qui sont devenues toujours plus longues ces dernières années,sans être pour autant exhaustives sur l'essence du plat qu'elles décrivent. Jules Gouffé (1807 ? 1877), célèbre cuisinier et pâtissier français, appelé  l'apôtre de la cuisine décorative, écrivait: "Je commence par expliquer ce qu'il faut entendre par ce qu'on appelle les termes de cuisine, que j'essaye, comme on le verra, de réduire à leur juste valeur, en débarrassant autant que possible le métier des locutions de convention, qui ne servent qu'à l'embrouiller dans la pratique." 

Premier contact

Bien avant de découvrir et de goûter cuisine et vins,  la liste des propositions se doit d'être la carte de visite de l'établissement qui accueille. Trop souvent elle se transforme en cauchemar. Il est indéniable que le fait de parcourir les livres de la restauration classique nous amène à des considérations nostalgiques sur l'art de la table trop souvent oublié voire méconnu par les professionnels (au fait, le sont-ils tous ?) d'aujourd'hui. Escoffier, Chapusot, Vialardi et autres Carême sont-ils encore au menu des élèves des écoles hôtelières ?

Alessandro Felis (www.lepetitjournal.com/Turin) jeudi 26 février 2015

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Publié le 25 février 2015, mis à jour le 24 février 2015

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