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DROITS DE L'HOMME - La schizophrénie australienne

Écrit par Lepetitjournal Sydney
Publié le 7 mai 2015, mis à jour le 9 mai 2015

Mercredi 29 avril, le premier ministre australien Tony Abbott déclarait qu'une étape sans précédent avait été franchie dans les relation australo-indonésiennes. Il rappelait son ambassadeur à Jakarta et suspendait tous les contrats en cours en réponse aux exécutions des deux australiens, Andrew Chan et Myuran Sukumaran, condamnés à mort pour trafic de drogue. Julie Bishop, ministre des Affaires Etrangères évoque ?un symbole de barbarie et d'opportunisme politique?. Mais si les appels de l'Australie n'ont eu aucun effet sur l'Indonésie c'est peut être parce qu'elle peut difficilement tenir le rôle de modèle en la matière.

Tant de compassion dans la nation australienne pour Andrew Chan et Myuran Sukumaran, les deux australiens condamnés pour trafic de drogue et exécutés mardi 28 avril en Indonésie. Tant d'argument pour contrer la peine de mort et défendre son abolition. Tant d'efforts diplomatiques déployés pour sauver ces deux citoyens australiens mais assez peu de considération pour le sort des demandeurs d'asile qui croupissent dans les centres de détentions offshore.

L'Australie se trouve dans une sorte de schizophrénie en matière de droits de l'homme puisque d'un côté le gouvernement les ignore dans sa politique migratoire et d'autre part il les utilise pour déclamer l'abolition de la peine de mort.

En tant que signataire deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (ICCPR) l'Australie a, certes, un engagement international pour l'abolition de la peine de mort. Mais c'est aussi le même texte qui a servi de base pour condamner l'Australie pour sa gestion ?off shore? des demandeurs d'asile. Le gouvernement Abbott a régulièrement rejeté ces critiques et ces condamnations y compris celles de sa propre organisation l'Australian Human Right's Commission. A la condamnation de l'ONU en mars 2015, Tony Abbott avait simplement répondu : "les Australiens en ont assez d'être sermonés par les Nations Unies? ignorant donc le texte qu'il a ensuite mis en avant pour sauver les deux condamnés australiens durant des mois.

Car rappelons que les droits de l'homme sont fondés sur des principes d'universalité et d'indivisibilité. Si un gouvernement dénie ces droits à certains individus (les demandeurs d'asile en l'occurence) il perd sa légitimité à réclamer ces mêmes droits pour d'autres (les deux condamnés du Bali 9). Condamner l'exécution de ces deux hommes sur le fondement des droits humains n'est défendable que si l'on déploie la même motivation à défendre des femmes, des hommes, des enfants qui chaque jours sont détenus dans des conditions qui ne respectent aucunement les droits humains.

L'Australie devrait commencer par adopter une position de légitimité inattaquable pour rendre impossible aux autres Etats de l'accuser d'hypocrisie et donc d'ignorer ses appels. Et pour être inattaquable en matière de droits de l'homme, le gouvernement devrait faire preuve de cohérence et faire face à ses propres violations des droits humains.  La primauté des droits de l'homme, c'est la valorisation de toutes les vies humaines, pas seulement celles qui nous intéressent un agenda politique.

Flore Gregorini (Lepetitjournal.com/sydney), vendredi 1er mai 2015



Le Petit Journal Sydney
Publié le 7 mai 2015, mis à jour le 9 mai 2015

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