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Eric Larue - Le goût est une mémoire

Eric Larue, Cuisine, SingapourEric Larue, Cuisine, Singapour
@Anne Ciolfi Valluy
Écrit par Laetitia Person
Publié le 28 janvier 2019, mis à jour le 28 janvier 2019

Paradoxalement, Eric Larue n’est pas tombé dans la cuisine tout petit ! Il a d’abord embrassé une carrière de commercial, puis de manager, dans une société de service informatique, avant de se former aux métiers de la gastronomie à l’occasion d’une expatriation en Argentine. Il est, depuis 2016, chef privé à Singapour.

 

Quel est votre parcours initial ?

Eric Larue : Je suis contrôleur de gestion de formation mais j’ai toujours exercé dans le secteur des ventes. En 2007, profitant d’une restructuration interne dans ma société et d’une mobilité de ma femme qui se voyait offrir un poste de directrice financière à Buenos Aires, j’ai décidé de me reconvertir.

 

La gastronomie s’est imposée naturellement ?

Très naturellement, oui, car comme tous les Français, la cuisine fait partie de mon ADN. J’ai toujours cuisiné. À l’origine, en arrivant en Argentine, mon projet était d’ouvrir un restaurant. C’est en prenant des conseils autour de moi que j’ai décidé de professionnaliser mon savoir et de me former aux métiers des arts de la table. J’ai intégré l’Institut argentin de gastronomie (IAG) qui propose une formation intensive globale à la gestion d’un établissement. Pendant un an, j’ai suivi des cours de cuisine, de gestion de restaurant et d’hygiène et sécurité.

 

C’est à ce moment-là que vous décidez de vous installer en tant que chef privé ?

J’ai effectivement dû repenser mon projet professionnel, au cœur de mes réflexions pendant ma formation. L’opportunité s’est présentée au hasard des rencontres. Mon voisin était alors l’ancien directeur du protocole de l’ambassade du Costa Rica qui, un jour, m’a sollicité pour un dîner chez lui. Après avoir fait les courses ensemble, j’ai pris conscience qu’il était sous-équipé aussi bien pour cuisiner que pour dresser la table. L’anecdote veut que son dîner a eu lieu finalement chez moi où j’ai fait le service. L’événement s’est reproduit à plusieurs reprises jusqu'au jour où l’un de mes convives m’a fait remarquer que j’étais le meilleur restaurant du quartier. C’est de cette façon que mon activité de chef privé a débuté. Les formalités administratives se sont enchaînées, j’ai ouvert la société Boca a Boca et, très vite, j’ai cuisiné pour divers clients, principalement dans la communauté française. Parallèlement, j’ai collaboré avec le chef doublement étoilé Pierre Marchesseau à l’ouverture du restaurant gastronomique de l’école Vatel.

 

Eric Larue, Cuisine, Singapour

 

Après cinq ans en Argentine, vous déménagez à Taiwan…

En arrivant à Taipei, j’ai eu l’impression de changer d’univers. Il existe une vraie barrière de la langue, car contrairement à Singapour, l’anglais n’est pas utilisé dans la rue. Je suis donc retourné sur les bancs de la fac pour apprendre le mandarin. J’y ai rencontré mon futur associé. Ensemble, nous avons créé une société de conseil et de service traiteur. J’ai aussi repris ma casquette de chef privé. La communauté française de Taipei étant profondément différente de celle de Buenos Aires, mes clients étaient surtout des institutionnels : la chambre de commerce française, le Rotary Club, les bureaux de représentation officiels de plusieurs États pour des déjeuners officiels.

 

Quels types d’évènements organisez-vous ?

Des soirées privées principalement mais également des événements corporate. J’essaie de garder une taille humaine. Pour les buffets, je n’accepte pas plus de 80 personnes. Pour les cocktails, je peux aller au-delà.

 

Vous animez également des dîners privés chez vous ou chez des clients… 

Eric Larue, Cuisine, Singapour

Oui, le dîner à domicile par un chef est un concept qui séduit beaucoup les Singapouriens. C’est une formule plus confidentielle qu’un restaurant, permettant une vraie proximité, un échange complice avec le chef et un cadre propice aux négociations d’affaires. J’organise ainsi deux à trois tables d’hôte chez moi chaque mois. Je me déplace également chez mes clients. Dans ce cas-là, je m’adapte aux exigences, aux souhaits et aux contraintes de la cuisine de mes clients. J’impose simplement un menu unique en fonction des lignes directrices communiquées et du budget imparti.

 

Comment avez-vous constitué votre clientèle à Singapour ?

Mes clients viennent principalement par le « bouche à oreille ». Je rencontre régulièrement les membres de l’AFS, principalement sur Serangoon et Sentosa, et je suis membre d’un club d’affaires, Business Network International (BNI), qui représente environ 30 % de mon activité à ce jour.

 

Quelle est votre spécialité ?

Je n’en ai pas à proprement parler. Ce que j’aime, avant tout, c’est étonner, créer des surprises avec des recettes connues. J’ai, un jour, ébloui mes convives avec un simple bœuf bourguignon dont la recette datait de Louis XIV. J’ai tout de même dû remplacer le Romanée-Conti par un traditionnel Pinot noir ! Mes clients en garde encore le souvenir. C’est ce saisissement que je cherche à atteindre. Il n’est pas nécessaire de réaliser des plats compliqués pour faire une bonne cuisine, il faut une dose de savoir-faire, de la passion, du temps et de la rigueur. Au-delà des tendances actuelles, je préfère me concentrer sur des recettes plus traditionnelles qui parlent à notre mémoire. Car, le goût est une affaire de mémoire. Il naît d’une sensation en bouche toujours associée à un souvenir personnel. Le gratin de pâtes de notre grand-mère n’est-il pas le meilleur du monde ?

 

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