Célèbre pour ses statues de pierre colossales, l’Ile de Pâques est sur le point de changer officiellement de dénomination. La Chambre des députés chilienne vient en effet d’approuver une loi visant à préserver la culture autochtone de ce territoire aux traditions singulières.
Son nouveau nom ? Rapa Nui, en référence à celui donné par Hotu Matu’a, premier chef de cette tribu insulaire. “La dénomination “île de Pâques” est complètement étrangère à leur histoire” a souligné Osvaldo Andrade, l’un des députés à l’origine de ce projet de loi présenté initialement au Congrès en 2016.
Découverte par les navires néerlandais en avril 1722 puis rattachée au Chili en septembre 1888, l'Île de Pâques tient son appellation actuelle de la fête religieuse éponyme, l’explorateur Jakob Roggeveen ayant foulé son sol… le jour de Pâques. Un mépris de la culture Rapa Nui, auquel s’ajoute un passé esclavagiste douloureux : “Au XIXe siècle, les navires péruviens venaient chercher des insulaires et les ramenaient au pays pour en faire des esclaves” explique au site Emol Martín Lara, professeur d'histoire à l’université catholique Silva Henríquez. Selon un rapport du conseil des anciens Rapa Nui, cette déportation aurait concerné 35% des indigènes alors présents sur l’île et entrainé un affaiblissement notoire de leur culture. “Restaurer le nom “Rapa Nui” permettrait en quelques sortes de restaurer cette mémoire”, précise l’expert.
Une démarche soutenue par le gouvernement, qui s’est engagé à traiter rapidement cette problématique. “Nous voulons faire un acte de revendication historique et reconnaître l'origine millénaire de l'île”, a déclaré début août le Président Piñera. "Il ne s'agit pas de changer le nom, mais simplement de reconnaître le nom que les personnes qui vivent sur cette île lui donne” a renchéri Felipe Ward, Ministre des biens nationaux, au micro de Radio Cooperativa.
S’il salue le projet de loi, le maire de l’actuelle Ile de Pâques, Pedro Edmunds Paoa, rappelle que l’administration chilienne pourrait faire plus encore. “Le Chili n'a pas voulu faire une reconnaissance fondamentale des peuples d'origine, ce qu'ils font avec nous est une chose très mineure du point de vue du législateur” a t-il déploré. Selon Marcelo Diaz, député PS, “si cette résolution rend justice au peuple Rapa Nui, elle n'est que le point de départ d’un long processus en reconnaissance, de respect, d’identité et de dignité”.
Ce projet de loi, qui prévoit également de nouvelles conditions de séjour sur l’île, est actuellement examiné par les Sénateurs.