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Ce Français reconstruit la ville de Kaikoura après un séisme en Nouvelle-Zélande

Guillaume William LoppéGuillaume William Loppé
G. Loppé, Directeur de programme en charge de la reconstruction de Kaikoura
Écrit par Côme Prieur
Publié le 28 octobre 2020, mis à jour le 30 avril 2024

Deuxième plus grand tremblement de terre de Nouvelle-Zélande, le séisme qui a eu lieu à Kaikoura, en novembre 2016, n’avait fait "que" deux morts mais des dégats considérables en raison des nombreux glissements de terrain notamment. Quatre plus tard et alors que la ville se remet sur pieds, Le Petit Journal Auckland est allé à la rencontré de Guillaume Loppé, Directeur de programme français en charge de la reconstruction de la ville « post earthquake ».

Bonjour Guillaume, pouvez-vous tout d'abord vous présenter ? Qui êtes-vous et d'où venez-vous ?

Mon nom est Guillaume Loppé, mais ici je me fais appeler William Loppé car les gens n’arrivent pas à prononcer mon nom. J’ai d'ailleurs vite réalisé que ça pouvait avoir un impact négatif sur ma vie personnelle et même professionnelle. J’ai grandi à Grenoble et fait des études un peu partout dont notamment Polytech à Lille. Puis j’ai quitté la France vers 21 ans car je voulais me confronter au monde anglophone.

Comment êtes-vous arrivé en Nouvelle-Zélande ?

Je suis arrivé en Nouvelle-Zélande il y a 5/6 ans. À la base, la NZ n’était pas forcément un choix ni même un rêve de vie, je suis venu ici pour suivre ma compagne qui souhaitait y vivre depuis longtemps.

J'ai commencé par faire du landscaping pendant 8 mois, en hiver sous la pluie c’était parfois un peu compliqué, mais c’était le temps de découvrir un peu le pays et de me construire un réseau. Au final je suis très content de vivre ici, c’est vraiment un pays extraordinaire, et je ne bougerais pour rien au monde ! 

Comment vous êtes vous retrouvé à travailler sur le chantier de Kaikoura ?

Au moment du tremblement de terre, je vivais à Wellington. Je travaillais en tant que gestionnaire de projet dans le domaine de la construction commerciale. Le séisme a eu lieu en novembre 2016 et un job d’administrateur de contrat est apparu en ligne. J’ai toujours voulu vivre à Kaikoura mais comme c’est une toute petite ville, il n’y a pas de travail pour des ingénieurs ou des managers en temps normal. Quand j’ai vu ce poste en tant qu’assistant administratif, ça tombait à pique même si c’était un peu en dessous de mes capacités. Je me suis dit que c’était l’occasion d’aller à Kaikoura et j’étais sûr que les opportunités se présenteraient à moi.

En l’espace de 3 ans je suis passé d’administrateur à gestionnaire de projet, et maintenant je suis à la tête de tout le programme. C’est ça qui est formidable avec la Nouvelle-Zélande, tu peux démarrer en faisant n’importe quel job et arriver très rapidement à un travail qui te correspond. Tu peux avoir rapidement ta chance. Inversement si tu ne fais pas bien le job qu'on te demande de faire, on peut aussi te dire au revoir rapidement.

Vous vivez donc à Kaikoura désormais ?

Je vis à environ 10mn de Kaikoura au milieu de la Nouvelle-Zélande. Géographiquement c’est un peu particulier car nous sommes loin de tout. La ville la plus proche se trouve quand à même à 2h30/3h de chaque côté. La route côtière est à flanc de falaise et il y a une 3ème route de montagne avec beaucoup de virages qui part à l’intérieur des terres, la ville est donc très difficile d’accès. Pendant un an, à la suite du séisme, on a été complètement coupés du monde, le seul accès était cette petite route à l’intérieur des terres.

 

Kaikoura Guillaume Poppe Le Petit Journal Auckland
Hawthorne bridge après le tremblement de terre, Kaikoura.

 

4 ans après le séisme où en est la ville de Kaikoura justement ? Les habitants ont-ils retrouvé une vie normale ?

Certaines personnes ont perdu leur travail, leur maison, mais ce n’est pas une majorité. La plupart des gens ici sont restés même si ça a été compliqué pendant un temps. La population est très résiliente et une nouvelle économie s’est développée grâce aux gens qui travaillent sur le chantier.

La ville a-t-elle été reconstruite/réaménagée d’une manière très différente de ce à quoi elle ressemblait avant le séisme ?

Il y a quelques restaurants ou pubs qui ont été détruits mais quelqu’un qui repasse 4 ans après le séisme va reconnaître Kaikoura, c’est très similaire à ce qu’il y avait auparavant. Au niveau de l’infrastructure, on a reconstruit ce qu’il y avait avant, mais avec des matériaux, des techniques de construction et des ingénieries actuelles. On a aussi réussi à renouveler une grande partie de l’infrastructure de la ville à 5% du coût que cela aurait du avoir, ajoutant au passage de nombreuses années de vie a l’infrastructure de la ville au sens large. C’est vraiment une chance pour Kaikoura qui n'aura pas forcément besoin de dépenser de l’argent dans les prochaines années.

En tant que Directeur de programme, en quoi consiste votre travail au quotidien ?

En tant que Directeur de programme, je dois gérer les différents groupes qui financent le programme avec par exemple le ministère des transports, le département du premier ministre et son cabinet, la mairie de Kaikoura, etc. Quand l’argent arrive c’est à moi de décider comment l’utiliser.

Je suis aussi le principal interlocuteur de la mairie pour chacun des projets or il y en a une cinquantaine dans le programme.

Quel a été votre plus gros défi durant le chantier ?

Ce qui m’a marqué n’est pas forcément au niveau technique. Le plus difficile a été d’essayer faire payer le minimum possible à la population via les impôts locaux. Un évènement d'une telle ampleur est impossible à surmonter seul pour une petite ville comme Kaikoura. Avant le tremblement de terre, la mairie n’avait jamais dépenser en 3 ans un 20ème de ce qu’on a depensé sur la même période. Sans maximiser le support financier extérieur et minimiser la participation locale, la ville aurait fait banqueroute en un rien de temps.

Pour faire simple, le département du premier ministre et du cabinet a payé 36% au total du programme, le ministère du transport 45% et le Council 17% dont seulement 5% de taxes, le reste a été payé par les assurances. Donc sur un programme à 40 millions de dollars, on a réussi à ne faire payer que 5% de la facture totale à la population locale.

Prévoyez-vous de rester en Nouvelle-Zélande ?

Là je passe à mon compte. Comme je suis maintenant résident permanent, je monte ma boîte. J’ai ma vie ici. Il y a quelques projets pour l’année prochaine. Le fait d'avoir délivré ce programme de 40 millions à 2% en dessous du budget, ce qui est de l’ordre de l’inexistant dans ce genre de programme, m'a permis de gagner la confiance de l’équipe municipale et même des locaux. Je ne vais donc plus être employé pour la mairie mais je vais venir ici en tant que consultant. J’ai aussi été appointé au comité de direction du Kiwiburn (Burning man national) ainsi que manager de l’infrastructure du festival, comptant un peu moins d’une centaine de volontaires sous ma responsabilité, ce qui occupe largement mon temps libre !

 

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