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PORTRAIT – Benjamin ou la vie "freegan"

Écrit par Lepetitjournal Mexico
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 14 novembre 2012

Des Français, on en croise un certain nombre dans la capitale mexicaine, mais ceux comme Benjamin, beaucoup moins. Arrivé il y a un an au Mexique après un long périple en stop, il est aujourd'hui l'un des organisateurs d'un forum écologique alternatif, le "KlimaXforum", et tient la promesse faite il y a deux ans de vivre sans argent

C'est dans un parc de Mexico que l'on retrouve Benjamin, la vingtaine, plein d'énergie et joyeusement hirsute. Ce jeune Français originaire de Besançon a depuis quelques années décidé de provoquer le changement en transformant son mode de vie. Son leitmotiv: "vivre à sa manière? et faire réagir".

Benjamin lors de la manifestation du mouvement des "Indignés" le 15 octobre 2011, plaza Revolucion, Mexico

Le déclic : une envie de liberté
Tout a commencé en 2009, à La Haye (Pays-Bas), où Benjamin étudie alors. Avec deux de ses amis, il crée une association afin de promouvoir le vivre ensemble et le respect de l'environnement. La joyeuse bande, de plus en plus engagée sur ces thématiques, aura un véritable déclic lors d'une nuit passée à une station service, faute d'automobilistes disposés à les prendre en stop. Les autostoppeurs, sans un sous en poche, se verront offrir des cartons en guise de matelas et des sandwichs invendus par les pompistes. Puis, la situation se révèle tout autre que la galère attendue alors qu'ils sympathisent avec deux Tchétchènes qui passaient par là: "Vivre comme ça, en se sentant libres, ça serait génial!" pensent-ils au diapason. Il n'aura suffit que de quelques mois pour que l'idée prenne forme et, en janvier 2010, les voilà partis en stop vers le sud de l'Europe.

Du défi au choix de vie: vivre sans argent
La spécificité du voyage de ces trois amis: partir sans argent, ne pas en accepter non plus. Leurs sacs à panneaux solaires sur le dos (pour recharger les batteries), ils arriveront jusqu'aux îles Canaries où ils embarquent, en bateau-stop, vers le Cap Vert. Au milieu de l'océan, Benjamin décide que ce qui n'était alors qu'un défi, une façon de "prendre des claques", de "sentir plus d'empathie" en expérimentant la faim et la soif, restera son mode de vie. Il poursuit donc sa route grâce à l'aide des gens rencontrés au fil du voyage, en récupérant la nourriture prête à être jetée dans les restaurants touristiques, en échangeant sa force de travail contre des vivres?
Après le Brésil, la traversée des trois Guyanes, de la Colombie et de toute l'Amérique Centrale, Benjamin passe la frontière mexicaine en novembre 2010, afin d'assister au sommet sur les changements climatiques de Cancun. Une fois ses acolytes rentrés en Europe, c'est un deuxième chapitre qui s'ouvre pour lui : celui d'une vie de "freegan" en plein Distrito Federal et de l'engagement écologique au Mexique.

Benjamin et son amie Marisa distribuant gratuitement des sandwichs élaborés à partir d'aliments récupérés

Un "freegan" dans la ville
Le freeganism nait en occident, d'un souci de récupération et de recyclage des déchets, y compris alimentaires. Les freegans sont donc des personnes se proposant de réduire au maximum leur participation et dépendance aux systèmes majoritaires de production et de consommation, jusqu'à, pour certains, vivre complètement hors du système économique. Dans les pays du sud, où "faire les poubelles" peut relever du geste de survie plus que de l'engagement politique et où le métier de chiffonnier est encore largement répandu, une telle démarche peut sembler aberrante. Pourtant, Benjamin nous explique que, même dans les petits villages, des fruits, des légumes et du pain encore consommables sont jetés. Aujourd'hui vegan (ne consomme aucun produit d'origine animal), ces produits constituent la base de son alimentation.
Et le jeune Français, conscient de la "discrimination positive" dont peuvent jouir les Européens, n'a aucun mal à se procurer la nourriture destinée aux ordures en allant demander aux vendeurs sur les marchés ou dans les restaurants. Ces gros sacs de pains, de fruits et de légumes qu'il collecte dépassent largement sa consommation personnelle: avec ses amis il organise chaque mardi un repas vegan gratuit dans un restaurant de la Roma.

Agir, ici comme ailleurs
Si le quotidien de Benjamin lui donne des airs de pionnier ici au Mexique, son activisme écologique dans un pays qui ne connait pas de véritable mouvement unificateur dans le domaine, a aussi de quoi surprendre. Organisateur de la rencontre "KlimaXforum" dont la troisième édition se tiendra dans quelques jours à Malinalco, ça n'est pourtant ni par goût des situations compliquées ni dans une logique humanitaire que Benjamin a choisi de s'impliquer dans le pays : bien décidé à voir s'opérer un changement au niveau global et à participer à ce changement, le lieu de cette participation n'a pas vraiment d'importance à ses yeux. Ou plutôt, "l'important est de se sentir bien avec soi même, et moi je me sens bien au Mexique" explique-t-il. Car s'il est confronté à des difficultés organisationnelles indéniables du fait de ce qu'il analyse comme "une peur de l'échec" récurrente chez les Mexicains, doublée d'une "résignation globale", ne favorisant ni la prise d'initiatives ni la tenue d'engagements, Benjamin se sent néanmoins porté par une fraternité dont l'Europe lui a peu laissé le souvenir.

Magdalena Le Prévost (www.lepetitjournal.com/mexico) mercredi 19 octobre 2011

Pour en savoir plus:
- Les 21, 22 et 23 octobre prochains se tiendra la troisième édition du KlimaXforum à Malinalco, Estado de Mexico.
Site Internet
- Tous les mardis, repas vegan gratuit offert grâce à la récupération d'aliments: 19h, Corazon de Arbol, 143, Coahuila, colonia Roma. Page Facebook
- Le site/blog de voyage de Benjamin et ses amis. Site Internet

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Publié le 19 octobre 2011, mis à jour le 14 novembre 2012

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