

Les liens entre telenovelas et narcotrafiquants sont intimes et variés. Certains acteurs comme certaines productions télévisuelles entretiennent, en effet, des relations assez ambiguës avec des membres des cartels de la drogue. Parallèlement, des personnages de narcotrafiquants ont fait, depuis quelques mois déjà, une entrée fracassante dans les telenovelas où ils sont présentés comme des héros positifs
La Reina del Sur. Poster de Telemundo
Narcos et showbiz: deux univers distincts mais une frontière perméable
Ces dernières années, plusieurs faits divers sont venus accréditer l'idée selon laquelle les frontières entre l'univers du showbiz et le monde des narcotrafiquants étaient de plus en plus poreuses au Mexique. En 2008, par exemple, la police fédérale s'est intéressée à une maison que louait, dans le sud de la capitale, un membre du cartel des frères Beltran Leyva, et a découvert que le garant du contrat n'était autre qu'un célèbre acteur de telenovelas. La même année, une enquête policière parvint à la conclusion que la fameuse telenovela Rubi, interprétée par la star du genre Barbara Mori était tournée dans une villa, d'un quartier chic du sud de Mexico (les Jardins de Pedregal), qui était, par ailleurs, habitée par un narcotrafiquant colombien.
Les liens sont si ténus entre membres des cartels de la drogue et certaines stars de la télévision que, d'après Roberto Zamarripa, le directeur de la rédaction du quotidien Reforma, les enquêteurs spécialisés dans le crime organisé en viennent à éplucher la presse people pour mettre la main sur des personnes recherchées dans le cadre de leurs investigations.
Les narcotrafiquants, nouveaux héros des telenovelas mexicaines
Les grands propriétaires terriens des haciendas fleuries de la campagne mexicaine ou les femmes aux caractères bien trempés prêtes à tout pour parvenir à leurs fins, ne sont plus les protagonistes fétiches des scénaristes des telenovelas mexicaines. Depuis peu, en effet, ils préfèrent substituer ces héros classiques par d'autres beaucoup moins conventionnels: les personnages de narcotrafiquants (cette tendance n'a pas été inventée par la télévision mexicaine puisqu'avant elle, le petit écran colombien avait cédé à cette tentation). Ainsi, la chaîne de télévision mexicaine Televisa diffuse la série la Reina del sur, une adaptation du roman éponyme d'Arturo Pérez-Reverte, qui retrace en soixante épisodes la carrière criminelle de la belle Teresa Mendoza, personnage de fiction inspiré de la narcotrafiquante mexicaine Sandra Avila Beltrán, surnommée la reine du Pacifique.
La mécanique de la Reina del sur est extrêmement bien huilée et repose sur ce qui fait habituellement le succès des Telenovelas, c'est-à-dire sur un scénario dont les rebondissements sont tels qu'ils en viennent à donner le tournis aux téléspectateurs. Mais cette telenovela introduit aussi une rupture avec les telenovelas plus académiques dans le sens où l'ambiance à l'eau de rose est ici troquée par une atmosphère ultra-violente.
Televisa accusée de présenter les narcotrafiquants comme des héros positifs
A la suite de la diffusion de la Reina del sur, le gouvernement mexicain a accusé le tout puissant groupe Televisa de violer les normes que la chaîne s'était elle-même imposées. En effet, elle avait conclu avec plusieurs autres médias mexicains un pacte pour privilégier les informations positives qui projettent une bonne image du Mexique, pour limiter la couverture des faits violents et pour éviter de présenter les mafieux comme des héros.
Pour les gouvernants mexicains, c'est ce dernier engagement qui est bafoué avec la diffusion de la Reina del sur. Pour eux, cette série habille de glamour l'univers glauque des narcotrafiquants en présentant ces derniers comme des êtres charismatiques engagés dans des aventures palpitantes. Pour exemple, Sandra Avila Beltrán est interprétée par Kate del Castillo qui est une actrice à la plastique irréprochable.
Olivier Charpentier (www.lepetitjournal.com/mexico) mercredi 29 juin 2011







