Édition internationale
Radio les français dans le monde
--:--
--:--

LIVRE - «El teatro del engaño» : dénonciation d'une mise en scène judiciaire

Écrit par Lepetitjournal Mexico
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 8 décembre 2015

De nombreux ouvrages ont déjà été consacrés au cas Florence Cassez mais celui de la journaliste Emmanuelle Steels propose de s'intéresser aux autres acteurs de cette affaire troublante des kidnappeurs de «Los Zodiaco». Grâce à un travail d'investigation fouillé et précis, «El teatro del engaño» propose un point de vue inédit en révélant la mise en scène d'une enquête judiciaire commencée en 2005 et en réhabilitant notamment un homme trop vite désigné coupable et jamais jugé, Israel Vallarta.

Présentation du livre «El teatro del engaño»
Mardi 13 octobre à 20h
 
dans la librairie Gandhi, av. Miguel Ángel de Quevedo 121.

Avec la présence de : Miguel Sarre, José Reveles y Enrique Calderón.

Ce livre est la chronique d'une investigation journalistique sur la grande imposture de la bande de "Los Zodiaco". Le cas d'Israel Vallarta et de Florence Cassez est un authentique thriller politico-judiciaire. A l'heure actuelle, six Mexicains, victime de torture et du même montage que la Française, sont toujours incarcérés et accusés de faire partie d'une supposée organisation criminelle. La justice n'a toujours pas fait la lumière sur ce mystère et le simulacre va beaucoup plus loin que le show médiatique qui est dénoncé. Le livre déconstruit les mécanismes de manipulation utilisés dans ce cas très emblématique.   

Este libro es la crónica de una investigación periodística sobre la gran impostura de la banda de los Zodiaco. El caso de Israel Vallarta y de Florence Cassez es un auténtico thriller político-mediático-judicial. En la actualidad, seis mexicanos, víctimas del mismo montaje que la francesa y de tortura, siguen encarcelados y acusados de formar parte de una supuesta organización criminal. La justicia no ha esclarecido este misterio y el simulacro va mucho más allá del show mediático que se denunció. El libro desmonta los mecanismos de manipulación utilizados en este caso emblemático.

Malgré la quantité d'articles, de livres et de documentaires sur l'affaire Cassez, «El teatro del engaño » présente l'intérêt de rompre avec la focalisation systématique sur Florence Cassez et prend le parti de défendre la cause d'Israel Vallarta, l'ex compagnon de la Française systématiquement présenté comme le chef incontestable de «Los Zodiaco», cette bande impitoyable de kidnappeurs.

Des coupables trop vite désignés...

En 2008-2009, alors qu'elle commence à s'intéresser à l'affaire Cassez, Emmanuelle Steels elle-même, pense que la culpabilité d'Israël Vallarta est un fait établi. «Dès le départ, on oublie de dire qu'Israel Vallarta a lui aussi été victime du montage médiatique du 9 décembre 2005.»  Une culpabilité à laquelle elle ne croit désormais plus du tout et qu'elle met à mal dans son livre «El teatro del engaño». 
Le silence qui règne depuis des années autour du «désigné coupable» a en fait ravivé la curiosité de la journaliste. Au cours de son enquête, la journaliste constate que les autorités mexicaines ont toujours veillé à ce que le Mexicain reste dans l'ombre : «Israel Vallarta est incarcéré depuis bientôt dix ans et est toujours dans l'attente d'un jugement !» Dans son ouvrage, l'auteure rompt ce silence et dévoile les multiples violations de la justice élémentaire dont est victime le soi-disant chef de gang «Los Zodiaco». Un parti pris inédit qui fait tout l'intérêt du livre. 

Montage télévisuel et manipulations 

«El teatro del engaño» commence par un événement spectaculaire diffusé le 09 décembre 2005, soit disant en direct, sur TV Azteca et Televisa dans un petit ranch, Las Chinitas, situé au sud de la ville de Mexico. Les équipes de télévision accompagnées des forces spéciales de l'AFI (Agencia Federal de Investigación) montrent la libération de trois otages (Ezequiel Yadir Elizalde Flores, Cristina Ríos Valladares et son fils âgé de 10 ans, Cristian) ainsi que l'arrestation «en flagrant délit» de Florence Cassez et Israel Vallarta accusés d'être les cerveaux de «Los Zodiaco», un réseau de kidnappeurs alors particulièrement recherché. Mais dès février 2006, lors de l'émission de Denise Maerker, Punto de Partida, Florence Cassez dénonce ce montage télévisuel créé de toute pièce par les autorités qui reconnaitront les faits.

Ces images, Emmanuelle Steels les a décortiquées une par une. On y voit notamment Israel Vallarta, menotté et le visage tuméfié. Il tente de répondre aux questions des reporters avec une main qui lui presse le cou, c'est celle de Luis Cárdenas Palomino, directeur de l'AFI, . «Ces images sont incroyables et presque surréalistes, s'insurge Emmanuelle. Ces propos d'Israel Vallarta sont obtenus sous la contrainte de la violence en direct, autrement dit c'est un acte de torture avec en plus la complicité de journalistes. C'est inédit à la télévision !»
Autre fait insolite, les rushs du reportage tourné par Televisa constituant des éléments pour la justice n'ont jamais pas été apportés au dossier. Plusieurs journalistes ont tenté d'y avoir accès mais ces rushs ont "officiellement" disparu des archives du groupe audiovisuel !

Mais dans ce livre, l'auteure va plus loin : «Au cours de ce travail d'enquête, j'ai remarqué qu'il n'existe aucune preuve tangible à l'encontre d'Israel Vallarta et Florence Cassez. Tout a été ensuite construit pour justifier ce montage télévisuel.» Chapitre après chapitre, l'enquêtrice révèle les éléments contradictoires, les changements de versions dans les témoignages, les aveux extorqués, les arrestations arbitraires.  
«La tragédie dans cette affaire est que le montage continue d'agir et d'exister à travers l'opinion publique mexicaine», déplore la journaliste. La majorité des Mexicains continue en effet de croire à la culpabilité de Florence Cassez et Israel Vallarta. «Cela montre que la désignation de responsables et le «story telling» utilisés par les autorités fonctionnent toujours sur l'opinion.»

Les conclusions de la Cour Suprême du Mexique, qui a ordonné la libération immédiate de Florence Cassez en janvier 2013, vont d'ailleurs dans ce sens puisque sont dénoncés «les effets corrupteurs» du montage dans cette enquête. 

Une affaire partie de rien, entretenue par dix ans de mensonges répétés  

«El teatro del engaño» explique donc comment un montage médiatique a conduit à la fabrication progressive d'une bande de kidnappeurs, à travers l'arrestation de membres de la famille Vallarta. Pour l'auteure, le véritable montage n'est pas celui avoué en février 2006 mais les mensonges répétés depuis dix ans pour le confirmer. «Encore aujourd'hui, malgré les changements de gouvernement, le PGR persiste en effet à fabriquer des preuves validant la version initiale, à protéger ses responsables et à court-circuiter toute possibilité d'accusation, tant à l'encontre du montage médiatique qu'à l'encontre des actes de tortures subis par Israël Vallarta.» 

Mais si cette vaste comédie judiciaire qui dure depuis dix ans a des conséquences pour les présumés coupables, elle a aussi des répercussions sur les victimes. «Les kidnappés ayant témoigné pour valider la version gouvernementale sont désormais privés d'une vraie justice tandis que leurs ravisseurs sont protégés et font peser sur eux des pressions incessantes.» Pour la journaliste, ce montage est une véritable manipulation contre l'opinion publique mexicaine en général, une opinion qui, a son insu, a financé depuis toutes ces années les acteurs de cette incroyable mise en scène. 

Pour plus d'informations : page facebook du livre

L'auteure : Emmanuelle Steels


Jeune journaliste belge arrivée au Mexique en 2008, Emmanuelle Steels est notamment correspondante pour la RTBF, Libération et La Presse (Québec). Elle commence à s'intéresser à l'affaire Cassez en 2009, soit à peine un an après la première condamnation de la Française à 96 ans de prison. Suite à la libération Florence Cassez, en janvier 2013, un journal mexicain la contacte pour rédiger un article sur l'affaire. C'est à la lecture de cet article qu'un éditeur mexicain, passionné par son approche, davantage tournée vers les victimes mexicaines de l'affaire, la contacte et lui demande d'écrire un livre sur le sujet. 

Margot Cariou et Jean-Marie Legaud (Lepetitjornal.com/mexico) Mardi 08 décembre 2015 (Republication)

lepetitjournal.com Mexico
Publié le 8 décembre 2015, mis à jour le 8 décembre 2015

Flash infos

    Pensez aussi à découvrir nos autres éditions